Les nappes se tarissent à vue d'œil, l'eau n'arrive dans les robinets qu'une fois tous les 10 jours dans les meilleurs des cas, et la population, alimentée exclusivement à partir des eaux souterraines, vit un véritable calvaire, et se trouve aujourd'hui confrontée, en cette période hivernale, à une dramatique pénurie d'eau. Cette situation est d'autant plus grave par le fait que cette eau est rendue salée par le rabattement de la nappe du Hodna, qui a atteint le niveau record de 80 m, entraînant de fait l'effondrement de plusieurs forages, que l'ADE s'attelle à remplacer instantanément pour se prémunir contre toute éventualité. Cet baisse du niveau de la nappe a eu pour conséquence la pollution de l'eau par des sulfates, affectant la qualité de l'eau, et rendant problématique l'approvisionnement en eau potable d'une population de plus de un million d'habitants, qui, faut-il le souligner, a été exclue jusqu'à cette date du plan national de l'eau, et ne bénéficie d'aucune opération de transfert digne de ce nom. La surexploitation des différentes zones de captage de l'eau pour satisfaire une population en constante augmentation, conjuguée au phénomène de sécheresse qui sévit depuis des années, ont été à l'origine de la pénurie d'eau dans les grandes agglomérations de la wilaya, notamment au chef-lieu de wilaya, où le pompage quotidien de 20000 m3 ne suffit plus à étancher la soif de plus de 200 000 habitants, dont les besoins s'élèvent à 37 000 m3 par jour, soit un déficit de 17000 m3, dont la gestion constitue, aux yeux de la direction des ressources en eau et l'ADE, la quadrature du cercle. Le caractère dramatique de la situation se trouve être vérifié par l'utilisation de tous les moyens pour se procurer le précieux liquide, en faisant fi de sa composition chimique quant à sa nature potable. L'essentiel, faire dissiper la hantise du manque d'eau. D'ailleurs, une activité commerciale florissante autour de cet élément vital s'est développée à M'sila, et ce, à travers la prolifération des camions citernes, dont le nombre dépasse les 100 au chef-lieu de wilaya qui achètent la citerne de 3000 litres à 100 DA et la cèdent à pas moins de 600 DA. La côte d'alerte atteinte depuis fort longtemps ne semble pas être appréhendée par les autorités de la wilaya, lesquelles, à défaut d'une vision prospective du problème, continuent, bon an, mal an, à faire leurs prévisions en matière d'alimentation en eau potable en se basant sur les ressources hydriques souterraines, s'excluant de fait de la politique de transfert des eaux mise en œuvre par le secteur des ressources en eau depuis quelque temps déjà. La preuve est que les prévisions des différents plans quinquennaux parlent toujours de la réalisation de forages et d'infrastructures de stockage. Pour la seule année 2011, il a été réceptionné 20 forages dans différentes communes de la wilaya, et 13 vont l'être au terme de l'année en cours. Il faut dire cependant qu'outre la surexploitation de la nappe pour les besoins en eau potable, la baisse record de 80 m du niveau des eaux souterraines a également été l'œuvre du département ministériel de Rachid Benaïssa, qui a voulu greffer l'activité agricole intensive à la vocation naturelle de la wilaya, qui est l'élevage ovin, à travers notamment les 3000 forages autorisés et autant non agréés, ayant été réalisés ces dernières années pour l'irrigation agricole. Ces forages ont contribué à donner le coup de grâce aux ressources hydriques existantes de la wilaya. Il faut signaler, au passage, qu'hormis le transfert des eaux à partir du barrage de Koudiat Acerdoune pour les besoins en eau potable de 4 agglomérations du nord de la wilaya (Sidi Aïssa, Aïn Hadjel, Bouti Sayeh et Sidi Hadjerès), qui s'approvisionnent présentement d'une série de forages de la région de Birine dans la wilaya de Djelfa, plus de 98% sont exclus du plan national, et ne bénéficient d'aucun transfert d'eau à partir d'un quelconque barrage. Pour Kara Ali Salah, directeur des ressources en eau, il dira, tout en déplorant cette grave situation en phase de frapper de plein fouet le chef-lieu de wilaya qui devrait faire face, à très court terme, à des besoins incompressibles, «que la politique de bricolage se basant sur les eaux souterraines doit cesser, et qu'il est temps d'intégrer la wilaya dans le plan national de l'eau en urgence, à travers l'opération de transfert d'eau pour la ville de M'sila à partir du barrage de Taballout (Jijel). Ce réservoir, destiné à alimenter les wilayas de Sétif et Bordj Bou Arréridj en eau potable, peut constituer la solution adéquate, et régler le déficit structurel sévissant dans la wilaya de M'sila». En attendant la résolution de l'équation de l'eau avec ses contraintes, l'aridité du climat où la pluviométrie ne dépasse guère les 200 mm/an, conjuguée au pompage effréné de la nappe, les populations de la wilaya de M'sila continueront à étancher leur soif en buvant les eaux boueuses et saumâtres de la nappe finissante du Hodna. Etat désastreux de l'infrastructure hydraulique La situation de l'infrastructure de stockage des eaux superficielles n'est pas reluisante, réduite presque à néant. La wilaya, zone inondable par excellence pour être le réceptacle de 5 wilayas limitrophes, recevant pas moins de 300 milliards de m3 des eaux de crues, ne compte plus que le barrage du Ksob, qui est envasé à 85% et n'emmagasinant que 12 millions de m3 sur un total de 30 millions de m3, et se voit exclue des projets hydrauliques structurants. Si le barrage de Fella n'a pas tenu face à la puissance des crues qui envahissent la plaine ouest du Hodna à la moindre averse, engloutissant 30 milliards de centimes sans que l'on puisse conserver un litre d'eau, le barrage de Bounasroune, quant à lui, implanté en amont des Ouled Tebbane, sur les hauteurs des monts du Hodna, dans la commune de Dehahna, n'a pas résisté à une année d'exploitation. Il a été mis en service en juillet 2005, et la digue s'est écroulée le 3 mai 2006. Ce barrage, pour lequel il a été consenti 6 milliards de centimes et devant mobiliser 500 000 m3 et irrigué 400 hectares, n'immobilise plus rien, l'eau passe, depuis 2006, à travers cette masse en béton et se perd irrémédiablement dans l'immensité de l'oued Boubasroune. L'autre ouvrage d'envergure qui se meurt est le barrage Ksob, qui est en train de périr sous le poids des millions de tonnes de vase, et les seules actions de sauvetage de cet ouvrage de 30 millions de m3, menées entre les années 2001 et 2008, n'ont aucunement abouti aux résultats escomptés. L'Agence nationale des barrages et transfert (ANBT), n'ayant pas mis les moyens adéquats pour débloquer les vannes de fond et évacuer la vase se trouvant dans les profondeurs du barrage, a bricolé pendant plus de 10 ans. Preuve en est que le bateau ramené de Hollande à l'état neuf n'a jamais fonctionné et baigne, à ce jour, dans les eaux boueuses du Ksob. On ne finira jamais de dire que c'est un secteur stratégique du service public, il n'empêche que le barrage du Ksob se meurt dans l'indifférence la plus totale sous le poids de millions de tonnes de vase. La menace de la disparition de ce barrage est réelle, et l'ANBT, qui semble frappée d'autisme face à ses engagements, ne daigne même pas répondre aux requêtes de la direction de l'hydraulique, notamment celle du 20 juillet 2011 sous le n° 1660, qui fait état «de l'abandon des barrages de Bounesroune et Fella, et l'arrêt des travaux de dévasement du barrage Ksob, sous le motif du manque de pièces de rechange au niveau de la DRAG». 68 milliards de centimes ont été consentis pour ce projet qui n'en finit pas de faire du surplace, compromettant ainsi la disparition à tout jamais de la zone des jardins, véritable poumon d'oxygène de la ville de M'sila, avec ses 5000 hectares de vergers et terres irriguées, et jetant des centaines de familles dans la pauvreté et la misère.