Les rédacteurs de la déclaration du 1er Novembre sont les héritiers du mouvement nationaliste indépendantiste dont l'expression moderne date des année 1920 avec la création de l'Etoile Nord Africaine. Mouvement qui a posé clairement la question de l'indépendance, de la souveraineté, puis qui a inclus la question des élections, du suffrage universel, de la constitution d'un parlement algérien, d'une armée algérienne. C'est-à-dire la mise en place des instruments de la souveraineté nationale. Depuis 1926, 1937 puis 1947, chaque plate-forme politique du nationalisme indépendandentiste hérita du programme de l'Etoile Nord Africaine. Les militants de la seconde génération - après la seconde guerre mondiale – ont hérité de ce programme et l'ont mis à jour. Le PPA-MTLD, dès les élections municipales de 1947, et avec ses 80 000 votants, devint le premier parti nationaliste de masse. Un parti représentatif, le plus démocrate puisqu'il représentait la majorité dans sa volonté d'accéder à l'indépendance. La deuxième dimension du nationalisme indépendantiste est qu'il repose sur les couches populaire dans les grands centres urbains, au sein des couches intermédiaires. Progressivement se sont répandues les idées de l'organisation indépendantiste dans la campagne, là où l'on souffre le plus du système colonialiste. Le programme du PPA-MTLD devint alors, en plus de nationaliste, démocrate et social. Dès les élections de 1947 jusqu'au début des années 1950, le MTLD eut besoin de cadres lettrés qui se distinguent par leur origine et leur statut social. Des divergences apparurent alors, qui ne concernaient pas le programme nationaliste : la ligne de démarcation séparait ceux qui privilégiaient le renforcement de l'organisation, de l'action politique, et ceux qui voulaient passer à l'action tout en formant une direction – organique et idéologique - à la lutte. Ces derniers étaient des jeunes en rupture avec la lutte pacifique. Les plus « modérés » pensaient au contraire qu'il fallait encadrer la population avant de passer à l'action. C'était le débat sur la primauté du civil sur le militaire. Ces divergences ont éclaté en conflit ouvert en 1953-1954. Ces jeunes militants considéraient que leur parti avait dévié. Le parti était corrompu, selon eux, par des gens faisant de l'électoralisme une fin en soi. Le passage à la lutte armée devait avoir deux objectifs : débarrasser le parti des professionnels de la politique et engager tous les Algériens dans la lutte pour la libération. Une double déclaration de guerre ! Mais ce n'est pas nouveau : les cadres de l'OS avaient demandé de transférer les moyens du MTLD à leur organisation en 1948. La Déclaration du 1er Novembre avalisa la même démarche et les hommes de l'OS rejoignirent le groupe des Six pour le double déclenchement de la guerre. En 1954, il y eut aussi d'autres mouvements concurrents, comme les Oulémas. La Déclaration les appela à intégrer la lutte, d'où la phrase « dans le cadre des principes islamiques ». Un appel ouvert à tous les Algériens comme on peut le lire au début de la Déclaration, qui est un trait tracé au cœur de cet héritage et qui sera la démarcation. Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, ces jeunes militants posèrent problème (par la création par exemple du Comité d'action révolutionnaire nord-africain, premier groupe armé au sein du PPA). Nous les retrouverons à l'OS ensuite. Les sections jeunes du PPA étaient impatientes de passer à l'action. Cette période de fin de guerre mondiale coïncidait avec l'exode important des habitants des campagnes vers les villes (reprises des activités économiques, retombées du plan Marshall). Une population qui habitait les faubourgs des villes, substrat radical, et qui a pris en main les cellules jeunes du PPA. Ils étaient plus radicaux, en rupture par rapport aux origines et aux politiques classiques qu'ils qualifiaient de voie sans issue. Comme aujourd'hui : pourquoi mobiliser les gens pour aller voter si le résultat n'est pas celui des urnes mais celui du ministère de l'Intérieur ?! Les anciens cadres politiques de l'époque, vénérés par la base proclamaient : « mobiliser, organiser, agir ». Les jeunes cadres disaient : « agir, organiser, mobiliser ». C'est la logique même de la Déclaration.