Le prix Goncourt 2009 a été décerné à Marie Ndiaye pour son livre Trois femmes puissantes et le prix Renaudot à Frédéric Beigbeder pour Un roman français (Grasset). Pour Marie Ndiaye, ce fut même un triomphe. Première femme à décrocher le Goncourt depuis 1998, elle a été distinguée au 1er tour du scrutin. Trouvant la France monstrueuse après l'élection de Nicolas Sarkozy, elle s'est exilée à Berlin. Paris : De notre correspondant n En arrivant devant le restaurant Drouant où le prestigieux prix venait de lui être attribué, Marie Ndiaye ne cachait pas sa joie : « Je suis très contente pour le livre et pour l'éditeur. Je suis très contente d'être une femme qui reçoit le prix Goncourt. Une sorte de miracle s'était déjà produit avec le succès du livre. Ce prix est inattendu. C'est aussi le couronnement et la récompense de vingt-cinq ans d'écriture et de cette opiniâtreté. Ce livre est le portrait de trois femmes fortes, chacune à sa manière. Ce qui les unit, c'est une force profonde, une croyance en qui elles sont, une façon de ne jamais douter de leur propre humanité. Ce sont des femmes tranquillement puissantes. » De père sénégalais et de mère française, l'auteure dit espérer que cette récompense permettra de mieux faire connaître l'histoire des femmes africaines. « L'histoire des migrants est une histoire déjà souvent relatée, mais si le sort de ces gens peut être encore mieux su et compris, j'en serais très contente. » A 42 ans, la Franco-Sénégalaise se retrouve récompensée pour son huitième livre. Pour le juré, le choix s'est imposé très vite. « On pensait que ce serait très disputé. Cela ne l'a pas été. Le livre remplit réellement le rôle qu'on attendait de lui pour faire un Goncourt et donner ce Goncourt à une femme », soulignait la présidente du jury, Edmonde Charles-Roux. Le livre a été tiré en 140 000 exemplaires. Elevée uniquement en France par sa mère professeur de sciences naturelles, elle publie à 18 ans son premier roman, Quant au riche avenir (1985), qu'elle a écrit à l'âge de 17 ans. Elle arrête l'année suivante ses études de linguistique à la Sorbonne pour se consacrer entièrement à l'écriture et obtient une bourse pour s'installer un an à la Villa Médicis à Rome. Remarquée par Jérôme Lindon des éditions de Minuit, l'éditeur historique de Marguerite Duras, elle enchaîne, depuis, romans et recueils de nouvelles. Une vingtaine en 24 ans, parus pour l'essentiel à Minuit puis chez Gallimard. Elle surprend par l'étrangeté de ses récits, qui jonglent avec le réalisme et le surnaturel, et l'originalité de son écriture musicale. Ses livres parlent des femmes, de la famille, de la solitude ou des rapports compliqués entre les gens. Une première consécration vient en 2001 avec le prix Femina pour Rosie Carpe, dont l'héroïne, issue d'un mariage mixte, navigue entre la Guadeloupe et la France profonde. Son travail sur la structure du texte, l'innovation formelle, la conduit à écrire pour le théâtre. Avec Papa doit manger, elle est l'un des très rares auteurs vivants à entrer, en 2003, au répertoire de la Comédie-Française. Epouse de l'écrivain Jean-Yves Cendrey, avec qui elle a également écrit pour le théâtre, elle est la sœur de l'historien et sociologue Pap Ndiaye, auteur de travaux sur la place des Noirs dans la société française. Marie Ndiaye, qui trouve la France de Nicolas Sarkozy « monstrueuse », s'est installée à Berlin avec sa famille après l'élection présidentielle de 2007.