Cet homme de grande qualité, c'est notre fils, notre frère, notre compagnon et ami Mourad Kacer. Il a vu le jour dans cette contrée de Kabylie, dans ce village d'Ath Si Youcef au pied du majestueux Djurdjura, berceau de l'honneur, du courage, de la dignité humaine, du respect d'autrui et de la solidarité. Mourad est donc arrivé au monde dans l'honorable famille des Kacer en cette année 1968, et dans cette Algérie qui, à peine sortie de la terrible nuit coloniale, s'enfonçait déjà dans cette autre réalité, dite nationale, faite de confiscation de l'indépendance, de répression en tout genre, de privation de liberté, de toutes libertés, obligeant l'Algérien à subir d'autres formes d'aliénations, notamment, dans les domaines culturel, identitaire et politique. L'enfant Mourad grandira parmi les siens et fera des scolarités honorables, voire brillantes dans les établissements scolaires et à l'université de Tizi Ouzou, qui porte le nom de notre illustre aîné Mouloud Mammeri. L'enfant d'abord, l'adolescent après et le jeune étudiant ensuite sera attentif et se retrouvera dans les différentes tragédies que subira cette région de Kabylie. En 1988, après les sanglants événements d'Octobre, en particulier à Alger, Mourad se mobilisera avec ses camarades dans le cadre des actions initiées par le MCB. C'est donc déjà un jeune averti et tourné vers l'action qui découvre le FFS, parti chargé d'histoire, d'espoir et d'émotion, sorti de la clandestinité en 1989. C'est ce parti qu'il choisira et y adhèrera pour développer son action politique. Il se distinguera notamment avec ses autres camarades au sein de la section Ali Mecili de l'université Mouloud Mameri. Il apportera ses précieuses et souvent déterminantes contributions pour soutenir et porter les actions du FFS et de la LDDH, avec son aîné Arab Aknine, toujours aux avant-gardes de la défense des droits de l'homme et des libertés. Le militant actif, sérieux et intelligent apportera sa contribution sur le terrain, tant au niveau de l'université qu'auprès de la population, preuve de son engagement total pour la défense des idées et des thèses du FFS. Insoumis, Mourad sera incorporé d'office dans les rangs de l'armée, interrompant ses études universitaires qu'il ne reprendra qu'à sa sortie. Mourad sera là, en 1998, après le lâche et odieux assassinat du grand Matoub Lounès pour dénoncer et contrecarrer les manœuvres, les manipulations et autres intrigues de ceux qui poussaient à l'embrasement de la Kabylie. Son action, ses prises de position pertinentes et argumentées lui valurent respect et considération auprès de ses camarades et autres responsables du FFS. Il sera alors appelé à assurer la responsabilité de la grande Fédération FFS de Tizi Ouzou. Cette structure, en proie comme d'autres à des difficultés d'ordre organique, connaîtra avec Mourad un sursaut qualitatif et un regain de vitalité. Le jeune homme saura montrer des qualités de dirigeant qui lui ont valu le respect des militants et de ses aînés qu'il traite avec respect et considération. L'homme formé aux sciences exactes est également en quête de connaissances de l'histoire, notamment de l'histoire récente de l'Algérie, du mouvement national et bien entendu de l'histoire du FFS. Il invitait les anciens clandestins du FFS pour lui apporter leur témoignage sur cette période épique du parti. Le jeune responsable sera de nouveau au feu avec la terrible tragédie des années 2001, avec ses dizaines d'assassinats et ses milliers de blessés parmi les jeunes, par la gendarmerie des pouvoirs. Il se démènera pour s'informer, comprendre et informer. Car encore une fois, la colère légitime de la population et de sa jeunesse fera l'objet de surenchères à l'origine de dérives dangereuses. Mourad sera encore là pour faire triompher la «force de la politique contre la politique de la force». C'est dans cet esprit qu'il mènera campagne, en 2002, pour les élections auxquelles a participé le FFS, alors que la Kabylie n'avait pas fini de panser ses blessures. Mourad fera preuve à la fois de courage, de pédagogie pour expliquer et défendre les positions du FFS, qui n'étaient pas toujours comprises par une population meurtrie et révoltée. Une fois l'épreuve vécue et que les accalmies se sont manifestées, Mourad en proie, comme d'autres camarades qui l'avaient précédé, à des rivalités et autres intrigues de la part de cette faune de parvenus politiques ne reculant devant aucune ignominie pour satisfaire ses desseins, est contraint de quitter le poste de fédéral. Il restera toujours disponible pour le parti et commencera à organiser sa vie professionnelle et personnelle. L'occasion lui est offerte pour émigrer aux USA qu'il rejoint à partir de l'année 2007. Les dures conditions de l'émigration ne le découragent pas. Il apprend et maîtrise la langue anglaise et réussit à s'insérer dans le monde du travail américain. Malheureusement, en cette année 2013, une grave maladie l'oblige à suivre un traitement lourd aux USA. Conscient de la gravité de la situation, il décide de rentrer en Algérie, en avril de cette année. Il poursuivra ses soins à l'hôpital de Tizi Ouzou et dans celui de Boghni, où il décèdera le mardi 23 juillet 2013. Mourad a donc décidé de répondre à l'appel de «sa terre et de son sang» pour revenir reposer parmi les siens. Certes, il n'y a pas d'âge pour mourir, mais mourir à l'âge de Mourad est un coup terrible pour tous les siens, ses aînés et compagnons et pour son parti le FFS, qui le gardera toujours au plus profond de lui-même. Il manquera à tous, mais il sera de ceux, comme l'écrivait Da El Mouloud Mammeri, «qui sont toujours présents dans les cœurs et esprits des leurs, quand ils ne sont plus là». Pour ses aînés et compagnons, Mourad sera le militant modèle qui a mené un combat jusqu'à la fin de ses jours. Il leur manquera par ses nombreuses qualités, au moment où le FFS bouclera, le 29 septembre 2013, ses cinquante années d'existence et a besoin de ses militants sincères et totalement engagés pour relever les nombreux défis, relancer, développer ses activités et rester fidèle à ses fondateurs de 1963, qui avaient fait le serment solennel de combattre la dictature pour permettre aux Algériens de recouvrer leurs droits et instaurer la justice et l'égalité pour tous. Pour cela, le FFS, parti populaire, doit rester ouvert sur la population où de nombreux jeunes inspirés par l'exemple de Mourad et des autres aînés pourront poursuivre le combat jusqu'à la victoire finale. Dors du sommeil du juste, Mourad, notre fils, notre ami et notre compagnon. Les causes justes perdent en toi leur serviteur et défenseur.