A chaque fin d'année, les Algériens ont de plus en plus tendance à vouloir faire la fête. Dans ce contexte, la panoplie des offres des établissements hôteliers et des agences de voyages est étoffée. En plus des trois mois de l'été, c'est l'occasion pour de nombreux professionnels de faire l'essentiel de leur chiffre d'affaires de l'année. Crise oblige, les Algériens rognent sur leur budget vacances. Ils sont à la recherche d'opportunités à saisir et de destinations abordables. En donnant la parole à plusieurs gérants d'agences de voyages, deux tendances ont été décelées : la destination Tunisie, qui a toujours la cote malgré un petit recul en termes de fréquentation, et l'émergence du Grand Sud algérien qui jouit d'une réputation exceptionnelle en matière d'authenticité et de soleil. Cette destination est devenue si branchée que les hôtels sont déjà complets. La Tunisie surfe sur la vague Comment expliquer que la Tunisie reste toujours une escale incontournable ? Bien sûr, il y a des explications officielles comme la proximité géographique, la culture commune, l'absence de visas, mais derrière ces arguments se cache une autre raison. Les responsables tunisiens accordent une grande importance aux Algériens. Ils multiplient les opérations de charme, sont présents lors des salons organisés en Algérie et font des appels du pied durant toute l'année. La chaîne El Mouradi, par exemple, insère des encarts publicitaires sur des journaux algériens. La recette qui marche est la promotion tous azimuts. Le slogan a été choisi avec soin : « Profiter chaleureusement de l'hiver ». Elle incarne et revendique les valeurs immuables du pays : hospitalité, ouverture et diversité. Ses hôtels proposent un choix de destinations (du Nord au Sud, de la côte au désert), d'hébergement (hôtels quatre et cinq étoiles, clubs et même « all inclusive » et de motivations (détente, santé, affaires, découverte). La « all inclusive » (les voyages tout compris) propose un tarif affiché qui comprend à la fois le vol A/R, l'hébergement en hôtel, les repas principaux, les boissons non alcoolisées et les alcools locaux consommés à l'hôtel ainsi que les snacks au cours de la journée, pour un prix beaucoup moins élevé que le total de ces mêmes prestations achetées séparément. Une formule particulièrement adaptée aux familles qui souhaitent maîtriser leur budget et plus généralement à tous ceux qui veulent se détendre sans compter. Cette formule divise néanmoins les touristes. Les raisons de leur colère ? Le fait qu'ils ne quittent plus l'hôtel et ne découvrent pas vraiment la destination. Les statistiques montrent clairement que le touriste algérien est classé parmi les dépensiers avec une moyenne de 300 dollars par semaine. La manne algérienne est d'autant plus importante que le secteur touristique en Tunisie traverse une récession à cause de la crise financière mondiale et que les prévisions des professionnels tunisiens tablent sur 1,2 million de touristes algériens et plus de 250 millions de dinars de recettes en devises. Lesquelles prévisions optimistes se sont traduites par un intérêt particulier des autorités tunisiennes pour améliorer les conditions de passage aux frontières. Très dépensiers, les Algériens font la joie des banquiers (en échangeant des millions d'euros contre des dinars), des supermarchés et de tous les petits commerces de quartier. A la recherche d'un séjour de rêve Hammouche Belkacemi, PDG de l'Onat, est dans le secteur depuis plusieurs années. Il confirme que « la Tunisie est en haut de l'affiche avec le Maroc. L'Egypte a été complètement abandonnée suite aux récents événements et en réaction à la campagne médiatique haineuse menée par de nombreuses chaînes satellitaires de ce pays. La Turquie continue à être fréquentée par une clientèle féminine, composée essentiellement d'enseignants. Cette année, la destination Algérie revient en force particulièrement Timimoun et la Saoura où il est pratiquement impossible de trouver actuellement un lit ». Des étrangers ont aussi choisi ce petit coin du désert pour réveillonner. Le Sahara représente une destination très prisée, notamment par la catégorie dite senior composée essentiellement d'une clientèle avertie qui dispose de suffisamment de moyens et qui vient surtout chercher dans notre pays la sérénité du désert. Cependant, le PDG de l'Onat constate qu'il y a « une légère baisse » des nationaux due probablement à l'effondrement du pouvoir d'achat mais surtout à la cherté du billet d'avion. Un vol de la compagnie nationale Air Algérie Alger-Tamanrasset-Alger coûte dans les 30 000 DA. Un séjour au Sud revient très cher : il faut entre 40 000 DA et 50 000 DA pour passer de bonnes vacances. Des tarifs qui ne sont nullement incitatifs et c'est par cette brèche que la Tunisie s'est infiltrée pour proposer des produits moins chers et adaptés à la demande. Larbaoui Farid, gérant de Tropic Tour à Sétif, confirme que certains Algériens ont renoncé aux vacances. Cependant, la Tunisie et le Maroc sont les deux destinations les plus demandées. 80% d'entre eux partent au pays de Sidi Bou Saïd par route « généralement en famille mais moins fréquemment en groupes ». Avec les partenaires, les prix sont négociés durant toute l'année en fonction du nombre de groupe. Un séjour dans une hôtel 5 étoiles en demi-pension revient à 13 000 DA (hors transport) ! Les Algériens bénéficient d'un dîner gala (méchoui) et trouvent leurs tables réservées. Une clientèle d'un nouveau genre Hamina Salah-Eddine, président du Syndicat national des agences de voyages Algérie (Centre), nous a déclaré : « Les départs prévus pour l'Egypte ont basculé vers le Maroc, notamment Marrakech. On s'est pris en retard et nous avons eu du mal à décrocher des places à Fès, Mekness et Agadir. » Selon lui, « la grande bonne nouvelle est la forte demande concernant le Sud algérien (Timimoun, Djanet et Taghit). A cette période de l'année, il y a beaucoup de festivités et le temps est beau. Mais pour aller admirer le coucher du soleil, il faut casquer 30 000 DA en billet d'avion. En Tunisie, 4 jours/5nuits revient à 15 000 DA, ce qui équivaut à 2 jours au Sud ». La clientèle est à la recherche de dépaysement et de découverte. « Elle fuit la pression de tous les jours, l'informatique, l'ambiance des bureaux et le stress. Ce sont les gens du centre du pays qui travaillent dans des sociétés privées et qui veulent se régénérer », dira-t-il. Selon ses observations, « ce sera encore le cas pour les prochaines années. C'est à nous de mettre les moyens pour accompagner cette nouvelle tendance ». Le produit Grand Sud, notamment le Hoggar et le Tassili, attire énormément. Depuis quelque temps, c'est un marché qui s'ouvre de plus en plus, suscitant beaucoup de curiosité. Le Sud a sa clientèle et l'Algérie, pour peu qu'elle s'en donne les moyens, peut drainer plus de vacanciers.