Quatre Saoudiens ont été tués dans une embuscade à l'ouest du Niger, alors qu'ils se rendaient au nord du Mali l Deux autres sont encore dans le coma, tandis que les deux Maliens qui les accompagnaient ont été retrouvés sains et saufs l Les auteurs ne sont pas encore identifiés l L'embuscade intervient alors que le sort du couple italien et de trois Espagnols enlevés par le GSPC en Mauritanie et transférés au nord du Mali se négocie par l'intermédiaire d'officiels maliens. Au moment où le sort du couple italien et des quatre Espagnols détenus respectivement par Abou Zeïd et Belmokhtar, chefs rivaux de deux groupes terroristes du GSPC se proclamant d'Al Qaîda, se négocie au nord du Mali, grâce aux bons offices de Bamako, trois touristes saoudiens ont été tués lundi dernier à l'ouest du Niger par un groupe armé non encore identifié. Au nombre de six, les touristes saoudiens sont tombés dans une embuscade au village de Djamballa, dans la région de Tillaberi, pas très loin de là où deux diplomates canadiens, fonctionnaires de l'ONU, avaient été enlevés à la même période de l'année écoulée, par des contrebandiers, pour être livrés au GSPC qui les a échangés contre une rançon de près de 4 millions d'euros, selon des indiscrétions. Les touristes saoudiens faisaient route vers le Mali, précisément dans la région de Menaka, lorsqu'ils ont été la cible de tirs d'armes automatiques. Trois d'entre eux ont été tués sur le coup, le quatrième a succombé à ses blessures dans la soirée de lundi, alors que deux autres continuent de lutter contre la mort à l'hôpital de Niamey du fait de leurs graves blessures. Selon le communiqué officiel du ministère nigérien de la Communication, les six Saoudiens étaient munis d'un visa de transit et devaient rejoindre, dans un convoi de trois véhicules, un autre groupe de leurs compatriotes déjà installés à Menaka, pour chasser l'outarde. « Des bandits armés non identifiés » les ont attaqués au moment où ils ont fait une halte, très tôt, pour faire la prière du lever du jour. Les deux Maliens qui les accompagnaient ont été retrouvés sains et saufs, les mains ligotés, sur les lieux de l'attaque. Visiblement, les auteurs de l'attaque étaient bien informés de l'itinéraire des Saoudiens. Un itinéraire qui passe, faut-il le préciser, par une région où la contrebande fait rage. L'opération ressemble étrangement au rapt des deux diplomates canadiens, Robert Fowler et Louis Guay, au même endroit à la même date (le 28 décembre 2006). D'ailleurs, quelque temps plus tard, quatre touristes européens ont été enlevés à la frontière nigéro-malienne avant d'être transférés, comme les deux Canadiens, au nord du Mali où se sont déroulées les négociations pour leur libération en contrepartie d'une forte rançon, avec l'aide d'officiels maliens. Les deux rapts ont permis à Belmokhtar et à son rival Abou Zeïd d'obtenir la somme de 8 millions d'euros. Si une partie a servi à l'achat d'armement acheminé vers le QG de Droukdel en Kabylie, d'importantes sommes ont été versées aux officiels ayant servi d'intermédiaires dans les négociations. Parmi eux des officiels appartenant aux services de sécurité maliens et des commerçants brébiches. Si pour l'instant, des sources sécuritaires révèlent que le couple italien enlevé en Mauritanie est entre les mains de Abou Zeïd et les trois Espagnols entre celles de Belmokhtar, aucune information n'a filtré sur l'identité des auteurs de l'attaque contre les Saoudiens. Mais elles privilégient la thèse d'un projet de rapt qui a mal tourné. Un des chauffeurs maliens aurait indiqué que les assaillants ont usé de leurs armes au moment où un Saoudien tentait de résister. Est-ce possible ? La question reste posée. Néanmoins, tous les spécialistes de la lutte antiterroriste s'accordent à présenter le nord du Mali comme une base de repli pour les troupes de Belmokhtar et de Abou Zeïd, mais aussi de logistique pour leur stratégie de terreur dans une région qui s'étend de la Mauritanie jusqu'en Somalie. Les rançons, une manne financière pour le régime malien Une immense étendue où se concentrent la plus importante masse humaine et les plus grands trafics liés, entre autres, aux armes et à la drogue, mais également où les salafistes ont trouvé un terrain fertile constitué d'associations de daâwa (prédication) et d'écoles coraniques « à la talibanaise », financées par le royaume wahhabite. L'atterrissage d'un Boeing transportant des tonnes de cocaïne au nord de Gao, il y a quelques semaines, et la facilité avec laquelle son équipage et sa cargaison ont disparu dans la nature ont choqué plus d'un et suscité de vives inquiétudes. Les complicités ne sont plus à démontrer. Les salafistes agissent à la frontière de la Mauritanie et du Niger, puis se replient au nord du Mali tout simplement parce qu'au Niger et en Mauritanie, la complaisance n'est pas de mise lorsqu'il s'agit de terrorisme. De ce fait, le président malien ne peut plus continuer à tromper le monde en exhibant l'argument de la misère et le manque de moyens dont souffrent la Mauritanie et le Niger, faut-il le rappeler. Les prises d'otages successives et leur dénouement au nord du Mali, en contrepartie de rançons, montrent que ces opérations sont aussi rentables pour les auteurs (le GSPC) que pour le régime malien et ses représentants officieux et officiels. Comment peut-on croire que les moyens mis en place, selon le chef d'état-major général des armées, le général de brigade Gabriel Poudiougou, pour combattre le terrorisme et le trafic de drogue n'ont pas eu de résultats probants ? Le général avait déclaré, dans un discours rendu public à la veille des fêtes de Noël, que le contexte actuel a nécessité « l'intensification des patrouilles et l'exécution de missions d'escorte sur les axes routiers dans le nord, la sécurisation des frontières, le soutien logistique et le maintien en condition du matériel, l'exécution de missions de sécurité publique par la gendarmerie et la Garde nationale et l'accompagnement des forces de sécurité civile par leurs collègues des forces armées ». Mais le général n'avait pas manqué de noter que « l'ampleur de l'insécurité dans la bande sahélo-saharienne dépasse aujourd'hui les capacités de nos Etats pris isolément. Nos forces armées et de sécurité soutiennent les efforts du chef de l'Etat dans le sens d'une gestion concertée de la résolution des problèmes sécuritaires de cet espace ». Il rejoint en fait l'idée de son président, ATT, qui depuis plus de deux ans ne cesse d'appeler à un sommet des chefs d'Etat de la région sahélo-saharienne, arguant du fait que son pays est pauvre et qu'il ne peut assumer seul la lutte contre le terrorisme. Or, les aides militaires et financières provenant aussi bien de l'Algérie que de la France, des Etats-Unis d'Amérique, d'Allemagne, d'Espagne, de Libye, de l'Union européenne et des différents organismes de l'ONU n'ont cessé d'arriver à Bamako. Résultat : le GSPC, qui comptait dans ses rangs, il y a moins de quatre ans, pas plus de 80 éléments en majorité algériens, est aujourd'hui composé de plus de 250 terroristes, parmi lesquels une majorité libyenne, mais aussi des Tunisiens, des Marocains, des Yéménites, des Pakistanais, des Nigérians, des Maliens, des Nigériens et même des Somaliens, puissamment armés et bien équipés. La volonté de venir à bout des activités d'Al Qaîda au Mali ne s'est jamais exprimée sur le terrain. Les deux seuls salafistes, dont un artificier (considérés comme étant importants pour les services algériens et mauritaniens), arrêtés au Mali ont fini par être libérés par ATT lors des négociations pour la libération des otages occidentaux détenus au nord de son pays, au début de l'année en cours. La politique de ATT vis-à-vis des menaces qui pèsent dangereusement sur la région suscite la méfiance et l'inquiétude non seulement de ses voisins, mais également de ses partenaires extra-régionaux. Les derniers enlèvements risquent de ne pas connaître la fin de ceux qui les ont précédés. D'abord parce qu'il n'est pas évident que les Italiens ou les Espagnols, connus pour leur intransigeance vis-à-vis des terroristes, puissent accepter de payer une rançon et de ce fait aider au financement du terrorisme international. De plus, ATT n'acceptera jamais que ces Etats prennent en charge la libération de leurs ressortissants, lui qui a pour politique de ménager le GSPC en profitant de la manne financière engendrée par les rançons et les trafics d'armes et de cocaïne.