Les syndicalistes de l'entreprise ont tenté de convaincre les protestataires de reprendre le travail tout en leur assurant que leurs revendications sont transmises à la centrale de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA) pour être examinées lors des prochaines négociations avec les pouvoirs publics. Négociations qui se dérouleront en ce mois de janvier ou février, selon le secrétaire général du syndicat de l'entreprise, Mohand Ameziane Ben Mouloud. Les revendications portent sur deux points, à savoir l'augmentation des salaires et le maintien du régime des retraites à 32 ans de service et non la soumettre à la condition d'âge fixé à 60 ans comme il a été décidé récemment par la tripartite. Les travailleurs ont évoqué aussi la question du pouvoir d'achat qui ne cesse de s'effriter et les difficultés de cette frange socio-professionnelle à vivoter. Cela dit, les travailleurs se disent déterminés à poursuivre leur mouvement de grève tout en reprochant aux syndicalistes de ne pas défendre les droits des ouvriers. « Je travaille depuis 28 ans dans cette société. Les syndicalistes répètent les mêmes paroles. Nous demandons la présence du SG de l'UGTA, Sidi Saïd, pour lui dire que nous n'avons pas besoin de lui. D'ailleurs, nous avons initié nous-mêmes cette grève. Nos syndicalistes ne sont ici que pour nous demander de l'arrêter », explique un travailleur. « Nous n'avons pas de syndicat. Ces syndicalistes ne représentent qu'eux-mêmes. Ils servent uniquement à étouffer les grèves. L'UGTA, c'est l'union avec le pouvoir », observe son voisin. D'autres ouvriers parlent des « dures » conditions dans lesquelles ils travaillent. « En hiver, le toit de l'atelier s'égoutte. Il se transforme en passoire au bonheur des eaux pluviales. Ils nous ont ramené des machines neuves qui ont fonctionné durant deux ou trois mois. Aujourd'hui, elles sont à l'arrêt. Quant à la cantine, elle est gérée par un privé qui nous sert des repas maigres et de mauvaise qualité. Quant aux conditions d'hygiène, elles sont inexistantes. Aujourd'hui, on nous impose l'âge de la retraite à 60 ans. Qui va vivre 60 ans dans toutes ces conditions ? Un travailleur est mort d'un cancer un mois après sa retraite. Il comptabilise plus de 40 ans de service dans cette entreprise. Vu les conditions de travail, une fois les 60 ans atteints, nous ne partirons pas en retraite, nos responsables doivent penser à nous préparer des cercueils et aménager une partie de cette entreprise en cimetière », indique non sans amertume un ouvrier. D'autres salariés dénoncent à cette occasion des pratiques qu'ils qualifient de malsaines constatées dans l'entreprise. « Concernant la sous-traitance, nos responsables nous affirment que notre entreprise n'a pas de contrat à honorer. Or, ils les concèdent pour des sous-traitants privés. Une fois les pièces réceptionnées dans l'entreprise, nos responsables nous demandent de revoir leur confection et ainsi refaire le travail des sous-traitants privés. Pourquoi accorder à des sous-traitants privés des contrats de fabrication de pièces que nous pouvons confectionner nous-mêmes dans notre entreprise ? », s'interroge un ouvrier. « Même les recrutements se font par connaissance. Alors que la priorité en la matière est aux enfants des ouvriers. A chaque fois que nous demandons des augmentations de salaire et soulevons la question des retraites, les pouvoirs publics nous répondent que les caisses de l'Etat sont vides. Mais ils dépensent des milliards pour envoyer les gens au Soudan et en Angola pour assister aux rencontres de l'équipe nationale. Récemment, le PDG de la SNVI a déclaré à la télévision que notre entreprise va bien et peut même faire de la concurrence aux produits européens. Il veut nous berner, cela nous fait rire de dépit », relève un travailleur. Rencontré à son tour, le SG du syndicat de la SNVI rappelle que la société en question voit au fil des ans son effectif se réduire, conformément aux dispositifs relatifs aux départs volontaires et à la retraite anticipée. En 1998, il est compté 13 500 travailleurs. Il n'en reste aujourd'hui que 7000. Entre-temps, constate-t-il, « l'entreprise n'a bénéficié ni d'investissements ni d'opération d'assainissement ». Membre du bureau du syndicat de la SNVI, Mustapha Zetoutou relève que le Conseil des participations de l'Etat a proposé en juillet 2009 aux responsables de l'entreprise un plan de redressement comportant des mesures d'effacement des dettes, l'idée d'un plan d'investissement « à définir par la société » et l'option pour un fonds de roulement comme une des solutions pour donner un nouveau souffle à l'activité. Les dettes et le découvert bancaire de l'entreprise s'élèvent respectivement à 60 et 42 milliards de dinars, selon le même responsable. Ce dernier indique que l'entreprise a proposé au CPE et au ministre de l'Industrie et de la Promotion des investissements une enveloppe de 12 milliards de dinars à titre d'investissements s'étalant sur trois ans et un fonds de roulement de 3 à 4 milliards de dinars. Reste la réponse de ces deux institutions.