Il est difficile pour les riverains et les usagers de la RN9 de ne pas voir désormais dans chaque rocher surplombant cette partie de la montagne, Ima Tadrart, une épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête. Des experts algériens et un turc, engagés pour le contrôle du chantier des tunnels de Sidi Aïch, se sont déplacés à Aokas pour prendre connaissance de la topographie du site et proposer des solutions pour ce flanc de montagne à dominante rocheuse. La visite, le soir même de l'éboulement, du ministre des Travaux publics, Abdelkader Kadi, n'a pas apporté de solution immédiate, si ce n'est la programmation d'une réunion qu'il a présidée, jeudi dernier à Alger, en présence d'experts, dont ceux de CAN Algérie et CAN France, spécialisés dans le traitement des falaises, et ceux de l'Entreprise nationale de réalisation d'ouvrages souterrains (Enros). Comme solution d'urgence, les experts de l'Enros étaient attendus, hier, pour entamer une opération de décrochage en faisant tomber les roches instables du flanc de la montagne. La RN9 sera fermée à la circulation à ce niveau pour les véhicules légers qui seront déviés par Tala Khaled, en passant par Tizi n'Berber. Les poids lourds patienteront sur place le temps de passer lors des suspensions momentanées des travaux et le dégagement de la voie, prévues chaque heure. C'est ce qu'a appris El Watan de Rachid Ourabah, directeur des travaux publics à la wilaya de Béjaïa, qui ajoute qu'il a été aussi décidé d'engager une étude en urgence. Pour les habitants d'Aokas, que nous avons interrogés le jour et le lendemain du drame, les scènes apocalyptiques de mardi 24 février ont rappelé le souvenir du grand éboulement de 2005. Le premier éboulement était tellement important qu'il avait fallu 21 jours de travaux pour dégager la voie. «C'est l'œuvre d'Amar Ghoul» commentent des Aokaciens. Ministre des Travaux publics à cette époque, Amar Ghoul avait fait le déplacement à Aokas. Les propositions des experts d'alors ont abouti à la protection de cette partie du flanc par du béton projeté et des tiges d'ancrage. «Cette zone est actuellement totalement stabilisée», estime Rachid Ourabah. Des habitants d'Aokas signalent, en revanche, que le grillage installé à l'entrée du tunnel s'est dégradé. «Le danger demeure toujours. Des dizaines de rochers peuvent lâcher et dégringoler», alerte un autre habitant de la ville. En effet, ce ne sont pas toutes les zones de la route du littoral qui sont aujourd'hui sécurisées. Taillée dans la montagne, voire dans la roche, plus que la RN9, la RN43, qui relie les wilayas de Béjaïa et Jijel, longe des flancs rocheux. «On n'a pas pu traiter tous les flancs rocheux», avoue d'ailleurs R. Ourabah. Affirmant avoir «fait le nécessaire pour les massifs rocheux», il est convaincu que ce qui s'est passé à Aokas est un phénomène imprévisible. La fragilisation de certains endroits de Ima Tadrart d'Aokas s'est manifestée par la dégradation, il y a quelques mois, du chemin pédestre se trouvant au niveau du cap et qui traverse la montagne. «Le problème, c'est la route d'en haut qui ne tient plus», estime un jeune Aokacien. Il se dit même parmi des habitants qu'une «entreprise espagnole a proposé de dévier la route et de contourner le cap par la mer sur 200 mètres». «Au lieu de cela, les autorités ont préféré percer un deuxième tunnel avec de la dynamite», se désolent-ils, estimant que les explosions «ont forcément provoqué des vibrations dont les dégâts se manifestent aujourd'hui». Une carrière existait, il y a quelques années, dans la montagne Ima Tadrart. Des associations ont demandé sa fermeture après s'être plaints des dégâts du dynamitage.