C'est un hameau déshérité que même le réseau de la téléphonie mobile « peine » à atteindre. Enserré entre les montagnes de Sidi Ali Bounab, à l'ouest de la wilaya de Tizi Ouzou, Ichakalen est de ces villages de la Kabylie profonde oubliés par le développement. « Nous n'avons même pas de mosquée », dit un homme d'un certain âge qui discute avec des adolescents, agglutinés sous une baraque de fortune faisant office d'abribus. « C'est nous-mêmes qui l'avons aménagé avec nos propres moyens. Cela nous a coûté 2000 DA », explique un jeune. Le lieu, ouvert aux quatre vents, sert aussi de lieu de rencontre aux chômeurs du village. « C'est notre maison de jeunes », ironise un habitant. Une virée à l'intérieur du village renseigne sur la précarité des conditions de vie de la population. L'eau se fait rare même en hiver. Une seule source, au liquide douteux, alimente les foyers. « En été, la population est approvisionnée par citerne mais cela reste insuffisant. On nous dit que l'eau provenant de la source n'est pas bonne à boire mais on n'a pas le choix. Durant le mois de décembre dernier, les robinets sont restés à sec pendant deux semaines. Parfois, l'alimentation n'est rétablie que le soir mais pendant une demi heure seulement », affirment des citoyens. Le non raccordement du village au réseau du gaz naturel irrite également les habitants qui continuent de recourir à la bonbonne et au bois pour cuisiner et se chauffer. « Nous vivons dans des conditions difficiles. Faute de réseau d'assainissement, on était contraints de recourir aux fosses septiques, creusées parfois à une dizaine de mètres seulement des habitations. Par endroits, les eaux usées se déversent directement dans l'oued. L'éclairage public est défectueux et les ruelles du village sont dans un état de dégradation avancé. Récemment, un cortège funèbre a failli glisser avec le cercueil sur la route du cimetière. L'accès y est tellement difficile en hiver qu'il faut attendre que la pluie cesse pour enterrer un mort. Nous attendons toujours la concrétisation des promesses des autorités faites lors des élections précédentes, notamment l'achèvement de la 2e tranche de la route menant à Ialouachène », nous a indiqué un membre du comité du village. Sur un autre plan, les citoyens nous ont fait part des difficultés qu'éprouvent les élèves pour se rendre à Tadmait. « Le camion affecté au ramassage scolaire n'assure qu'un seul voyage par jour. De ce fait, 24 élèves seulement sont pris en charge. Les autres doivent se débrouiller seuls pour rejoindre leur établissement ». Pour des soins, les habitants se rendent à Tadmait, distante de 3 km. Un centre de santé a été réalisé à Abla, en 2002, mais il n'a jamais fonctionné pour « des raisons de sécurité ». Abandonnée, la structure sert aujourd'hui de grange à foin. « Tout va mal ici », résument les habitants de ce hameau enclavé. Ce constat n'est pas propre à Ickakalen. Ne voyant rien venir de la part des pouvoirs publics, les habitants des villages mitoyens, Ait Chelmoune, Tala Benamane, Abla et Akbou, ont fermé récemment le siège de l' APC de Tadmait pour exiger une prise en charge rapide de leurs doléances. Les problèmes sont communs à tous les villages de la région : eau potable, raccordement au réseau du gaz naturel, aménagement des routes, installation de l'éclairage public, réalisation d'un stade de proximité et l'assainissement. Selon un PV de réunion, qui nous a été remis par les membres des comités des villages, les autorités se sont engagées à satisfaire ces revendications dans le programme des plans communaux de développement (PCD) 2010. « Si ces revendications ne seront pas satisfaites, les habitants reprendront le chemin de la protestation, surtout le problème d'eau potable qui devra être réglé dans les plus brefs délais », ont menacé les représentants des cinq villages concernés.