Sans tomber dans un populisme béat, ce qui s'est produit la semaine passée à l'Institut national d'alimentation et des techniques agro-alimentaires (INATAA) de Constantine est inadmissible et les témoignages appuyés des vidéos postés sur le Net par les étudiants victimes de cette violence ne font que conforter le sentiment, partagé d'ailleurs par la majorité de la population, que tout va de travers dans ce pays. Des violences qui se sont soldées, rappelons-le, par une trentaine de blessés parmi les étudiants dont certains ont été mordus par les chiens lancés à leur poursuite par le personnel censé veiller à leur sécurité. Quand le responsable d'un institut fait intervenir, d'autre part, des agents pour «casser» une grève d'étudiants, — dont la revendication principale est la valorisation et la reconnaissance de leur diplôme par la Fonction publique -, pour ensuite et afin de justifier cet acte accuser ces étudiants d'avoir tenté de mettre le feu à leurs outils pédagogiques, notamment des labos, cela relève, et le mot est faible, d'un manque flagrant de discernement. Quoi qu'il en soit et après quelques jours, il semblerait que le calme soit revenu à l'INATAA, même si le bras de fer engagé par les étudiants de cet institut avec le rectorat semble loin de connaître son épilogue. Des étudiants dont le noyau dur, constitué d'une quarantaine de jeunes, selon les responsables de l'institut, semblent déterminés à poursuivre le mouvement de protestation initié au mois de janvier dernier jusqu'à ce que leurs revendications soient entendues, étant donné que leur cursus universitaire est sanctionné par un diplôme d'ingénieur d'Etat. «Nous exigeons donc de pouvoir exercer dans les domaines de l'agriculture, les laboratoires de santé et dans l'enseignement. Même le spectre de l'année blanche brandi par le rectorat ne nous fait pas peur. Nous préférons perdre une année d'études que de nous retrouver avec des diplômes qui ne servent à rien si ce n'est à grossir les rangs des chômeurs», nous dira un délégué des étudiants de l'INATAA ayant requis l'anonymat par peur de représailles. La troisième voie Une petite lueur d'espoir laisse tout de même espérer une reprise du dialogue entre les différents protagonistes avec l'intervention des enseignants de l'institut qui, à travers des rencontres périodiques avec les étudiants et des réunions en dehors de la sphère officielle du rectorat, tentent de proposer des solutions à un conflit dont le dénouement «exige l'intervention du ministère de tutelle», comme l'a souligné un enseignant de l' INATAA, joint hier au téléphone, lequel a précisé que les enseignants ont toujours privilégié la voie du dialogue. Et d'ajouter : «Nous sommes autant préoccupés par le devenir professionnel de nos étudiants qu'ils le sont eux-mêmes. Nous avons intérêt à ce que leur diplôme soit reconnu. L'enseignant ne légifère pas. On lui demande de faire une offre de formation, faire une expertise, puis développer les activités de recherche, donc nous ne sommes en aucun cas responsables de la gestion de l'institut. Nous tentons d'expliquer aux étudiants grévistes qu'une réforme de la Fonction publique n'est pas facile à obtenir. Nous avons installé à cet égard, depuis deux jours, une commission mixte composée d'étudiants et d'enseignants qui va œuvrer pour alerter les institutions d'Etat autour de ce problème.» Notre interlocuteur, ayant lui aussi souhaité garder l'anonymat, soutient par ailleurs que les enseignants de l'INATAA rejettent toute forme de violence et la condamnent tout en jugeant la réaction de la direction face à cette crise d'irréfléchie. Nous venons d'apprendre par ailleurs qu'une réunion de conciliation s'est tenue hier après-midi à l'INATAA à l'initiative des autorités de la ville. Une réunion à laquelle ont participé, outre les représentants des étudiants et enseignants, les membres d'une commission ministérielle.