Homme habile et respecté, il occupait un poste dans une banque à Tunis, puis fait partie en tant qu'expert financier de la délégation du GPRA qui a négocié les Accords d'Evian, signés le 18 mars 1962. Porte-parole de la délégation algérienne de ces Accords, Rédha Malek parle d'un «homme passionné, dévoué à la cause nationale». Seghir Mostefaï a joué un rôle essentiel en s'intégrant à la commission de préparation des négociations d'Evian, dirigée par Ahmed Francis. Mostefaï était à la Banque centrale tunisienne lorsque le GPRA a fait appel à lui. L'homme qui a acquis de l'expérience de son passage dans cette banque a toujours gardé contact avec le FLN. Choisi pour ses compétences, Mostefaï avait en face de lui, côté français, Yves Roland-Billecart (conseiller technique du cabinet du ministre des Affaires algériennes, Louis Joxe), qui s'occupait des questions liées à la zone franc et aux relations douanières entre autres. «L'apport de Seghir Mostefaï était très important», témoigne l'auteur du livre L'Algérie à Evian : histoire des négociations secrètes, 1956-1962. L'engagement de Seghir Mostefai ne s'est pas arrêté là. La diplomatie algérienne fera appel à lui lors des négociations pour la libération des otages américains de Téhéran, en 1980. «Mostefaï était là aussi lorsque les Américains nous ont sollicités pour faire libérer leurs otages. Seghir avait l'art de mettre en forme les propositions des Iraniens qui voulaient rapatrier les avoirs gelés par le président américain Jimmy Carter. La question était délicate puisque les avoirs étaient composés, entre autres, de l'argent du shah déposé par la révolution. On est arrivé à une solution. L'argent a transité par la Banque d'Angleterre. C'est une fois qu'on a vérifié que l'argent était arrivé que les 52 otages ont été libérés», explique l'ancien négociateur. Le premier billet de banque, c'est lui A l'indépendance, Seghir Mostefaï est nommé par arrêté du 30 juin 1962 au conseil d'administration de la SNCF Algérie, avant d'être désigné, quelques mois après, gouverneur de la Banque centrale algérienne (actuellement Banque d'Algérie), poste qu'il occupa durant presque vingt ans (du 28 décembre 1962 au 30 juin 1981). «Durant l'été 1962, la Banque d'Algérie a annoncé qu'elle cesserait toute activité au 31 décembre 1962. Il a fallu rapidement mettre en place une banque algérienne et c'est Seghir Mostefaï qui a été chargé, en raison de ses compétences, de cette délicate mission. Il a tout fait en quelques mois malgré les conditions difficiles. La Banque centrale verra le jour le 2 janvier 1963», raconte Badreddine Nouioua, lui-même ancien gouverneur de la Banque d'Algérie. Ayant occupé des fonctions dans une agence à Oran et à la direction centrale, M. Nouioua témoigne de la difficile mission de produire le premier billet de banque algérien face à la présidence de l'époque. «L'homme était rigoureux, compétent, dévoué. Toutefois, il a su mener son travail dans des conditions difficiles puisqu'on ne comprenait pas alors le rôle de la Banque centrale. Le chef de l'Etat pensait que la banque pouvait faire des avances aux Trésor sans condition. Elle le pouvait, mais seulement dans le cadre de ses statuts que le chef de l'Etat a modifiés. Mostefaï a essayé de convaincre, en vain, les autorités. Il devait accepter ou se démettre. Malgré toutes les difficultés, Mostefaï a mené son travail qui a permis de limiter les dégâts», se souvient M. Nouioua.