L'Association des collectionneurs du Grand-Alger (ACA) rassemble les collectionneurs invétérés de timbres, cartes postales et pièces de monnaie. N'ayant pas encore réussi à se trouver un siège, les adhérents se retrouvent sur la placette de la Grande Poste. « Une première association créée, il y a plus de 30 ans, existait déjà avant celle-ci », nous révèle Hamid Istitène, son président. A l'époque, on se retrouvait tous les dimanches matin pour échanger timbres, cartes postales et anciennes pièces de monnaie, et d'ajouter : « La philatélie n'est hélas pas très développée chez nous, pourtant le timbre est un ambassadeur qui voyage à travers le monde et véhicule toujours des messages. » C'est au lendemain de l'indépendance que notre passionné a démarré sa collection. « A l'époque, j'habitais La Casbah. Au début, je collectionnais des timbres internationaux puis je me sens spécialisé dans les timbres d'Algérie neufs et oblitérés.” C'est avec fierté que notre interlocuteur déballe ses trésors : des albums contenant tous les timbres spécifiques à l'Algérie émis depuis 1924. Une collection qu'il continue d'enrichir en acquérant au fur et à mesure les timbres émis par Algérie Poste. « Je les achète dès le 1er jour pour les avoir avec le cachet “1er jour'' qui leur donne plus de valeur », dit-il. Quant au timbre algérien le plus cher, il s'agit du « 1.00 + 9.00 » émis en 1962. « Il a été tiré à environ 12 000 exemplaires et coûte 400 euros », indique notre source. Et d'ajouter : « Notre association se demande pourquoi il n'y a pas eu à ce jour d'émission de timbres à l'effigie de nos chouhada tels que Didouche Mourad, Badji Mokhtar, Mostefa Ben Boulaïd... » Les cartes postales constituent l'autre fierté des collectionneurs. Des cartes en noir et blanc, jaunies par le temps et dont certaines, chargées d'histoire et d'émotion, ont plus d'un siècle d'âge. « En 1830, au début du colonialisme et avant même l'avènement de la photographie, des peintres et des dessinateurs français reproduisaient tout ce qu'ils voyaient », explique Hamid Istitène. A travers l'album qu'il exhibe et où sont soigneusement rangées près de 2000 cartes postales, l'histoire d'Alger et ses environs se déroule sous nos yeux étonnés. Sur l'une d'entre elles, on peut voir Alger telle qu'elle était en 1830, avec pour seule cité : La Casbah. Sur une autre carte postale, datant de l'an 1900 (début du XXe siècle), on peut apercevoir l'ascenseur qui reliait à cette époque la place des Martyrs à la Pêcherie. Ascenseur qui n'existe plus aujourd'hui. Une autre carte nous montre l'avenue Pasteur avant même la construction du tunnel des Facultés. Reconnaître sur ces cartes des endroits totalement métamorphosés aujourd'hui laisse une étrange impression. C'est notamment le cas de la Grande Poste. Avant sa construction, au début du XXe siècle, une église anglicane était érigée à sa place. Cette dernière a, par la suite, été démolie pour laisser place à ce monument. En regardant d'autres cartes postales, on constate que face au lycée Emir Abdelkader, et à la place de la DGSN, il y avait une caserne (Pelissier) qui, elle-même, jouxtait un casino (1905). Arrêt sur image sur un quartier, une ruelle, un édifice, un personnage, un square, une scène du quotidien... des centaines de cartes du vieil Alger existent retraçant des pans entiers d'histoire. A titre d'exemple, on retrouve des cartes jaunies du square Bresson (face au Théâtre national) où les enfants pouvaient faire des petits tour à dos d'âne moyennant une petite pièce. D'autres cartes présentent la Basilique Notre-Dame d'Afrique en 1906 lorsqu'on ne pouvait y accéder qu'à dos d'âne... Alger en tramway, Alger en calèche, Alger en trolley... Les souvenirs défilent sur les bouts de carton. Ruelles montantes, Algéroises en tenue traditionnelle (avec des serouals de 18 m de tissu), portrait de cireurs... La Casbah, à elle seule, compte des centaines de cartes postales. Sur l'une d'entre elles, on peut admirer les deux célèbres fontaines Zoudj Aïoun qui n'existent plus aujourd'hui. Il y a même des cartes montrant les maisons closes de la vieille médina datant du début du XXe siècle. La plupart de ces cartes postales ont voyagé puisqu'elles étaient expédiées par les colons français vers leurs familles restées en France. « C'est principalement en France que je les ai achetées, confie le président de l'ACA, actuellement, elles sont vendues entre 2000 et 1000 DA l'une, à Alger. » Anciennes pièces de monnaie en bronze, premiers timbres algériens, cartes postales du vieil Alger, les adhérents de l'association, des collectionneurs du Grand Alger sont toujours à l'affût d'une « pièce » qui manquerait à leur collection personnelle. En attendant de se trouver un toit, ils invitent tous les collectionneurs à les rejoindre sur l'esplanade de la Grande Poste où ils se retrouvent presque tous les jours. A. C. A. BP n° 264