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Pourquoi tant d'impunité
Publié dans El Watan le 25 - 07 - 2017

Jamais l'Algérie n'a connu autant de scandales financiers que durant ces quinze dernières années sans que la justice, souvent très prompte à réagir lorsqu'il s'agit de délit d'opinion, ne joue son rôle. Les exemples sont nombreux et on pourrait citer les plus révélateurs. D'abord le scandale BRC, cette filiale créée par Sonatrach, avec le groupe américain Halliburton, au début des années 1990, dirigée depuis 1994 par Abdelmoumen Ould Kaddour, un jeune cadre qui avait fait ses études aux Etats-Unis, avant de rejoindre un bureau d'études de la Présidence spécialisé dans l'engineering et le développement.
Dès 2006, sur instruction de la Présidence, une enquête menée par les officiers du défunt service de la police judiciaire du DRS (Département de renseignement et de sécurité), dépendant du ministère de la Défense, mettait cette filiale, accusée d'avoir bénéficié d'un statut de privilégiée, pour arracher de nombreux marchés de gré à gré dans tous les domaines, y compris l'armée et d'avoir pratiqué la surfacturation. L'inspection des finances met les pieds dans le plat et les conclusions du rapport d'enquête est accablant. Le dossier est pris en charge par le tribunal de Bir Mourad Raïs, où l'instruction dure des mois, patine puis s'arrête.
Chakib Khelil, alors ministre de l'Energie, voyait mal l'immixtion des services dans la gestion de son département. Pour mieux préserver ses partenaires, il a carrément dissous la filiale, dont le responsable, Abdelmoumène Ould Kaddour, est vite rattrapé par une autre affaire. Les officiers du défunt DRS l'arrêtent pour le déférer devant le tribunal militaire de Blida, avec deux autres personnes, Adel Miloud et Mehdi Chetouh, un lieutenant du service d'écoute, pour «divulgation d'informations classées secret défense».
L'affaire tourne autour d'un enregistrement d'une conversation téléphonique entre Ould Kaddour et un officier des services libyens, que le lieutenant aurait téléchargée sur un flash-disc, remis au nommé Adel Miloud, lequel, à son tour, l'a donné à Ould Kaddour. Jugés le 26 novembre 2007, les trois accusés plaident l'innocence, mais le parquet a requis 7 ans de réclusion criminelle contre le militaire, 6 ans contre Adel Miloud et 5 ans contre Abdelmoumen Ould Kaddour, alors que le tribunal militaire prononce trois peines de réclusion criminelle : 30 mois contre Ould Kaddour, 5 ans contre le militaire et 3 ans contre Adel Miloud, un ami commun aux deux premiers.
Ould Kaddour n'introduit pas de pourvoi en cassation contre l'arrêt du tribunal, qui le rend coupable «de divulgation d'informations classées secret défense sans intension d'espionnage ou de trahison». Il reste en prison pendant 26 mois, avant qu'une personnalité de la guerre de Libération, très connue, n'intervienne auprès du président de la République pour le faire sortir au mois de mai 2010, au moment où Sonatrach était éclaboussée par un immense scandale de corruption, au centre duquel se trouvaient l'ancien PDG, Mohamed Meziane, et Chakib Khelil.
Privé de ses protecteurs et soutiens avérés, Ould Kaddour s'envole pour les pays du Golfe, précisément à Abou Dhabi, où il s'installe avec son épouse, enseignante de langue française et ses deux enfants, le temps de se faire oublier. Et pendant qu'Ould Kaddour était jugé par le tribunal militaire de Blida, le procès Khalifa fait la Une de tous les journaux.
Medelci, Sidi Saïd, Aboudjerra Soltani, Tayeb Belaïz et Abdelmoumène Khalifa
Les révélations sont fracassantes. Un ministre des Finances, Mourad Medelci, qui reconnaît ne pas avoir été suffisamment intelligeant pour décrypter le rapport de l'IGF faisant état de graves anomalies dans le dossier de Khalifa Bank, une longue liste de responsables des OPGI (Offices de promotion et de gestion immobilières), qui se cachent derrière une instruction du ministère pour retirer les fonds des banques publiques et les confier à Khalifa Bank, et des accusés qui racontent comment plus de 100 milliards de dinars appartenant aux déposants ont été détournés avec la complicité des plus hauts dirigeants du pays. Dans cette affaire, de nombreux noms sont cités par les accusés pour avoir profité des avantages offerts par Abdelmoumène Khalifa, en contrepartie de leur complicité, mais ils ont comparu comme témoins.
Parmi eux, ceux de l'ancien ministre de l'Industrie, Abdesselam Bouchouareb, l'ancien ministre de la Justice, Tayeb Belaïz, l'ancien ministre de la Solidarité, Aboudjerra Soltani, l'ancien ministre de l'Habitat, Abdelmadjid Tebboune, le secrétaire général de l'Ugta, Abdelmadjid Sidi Saïd, etc. Durant la même période, une autre affaire de corruption au centre de laquelle se trouve l'ex-président de l'Association des zaouïas, Kaddour Gouaïche, l'ex-conseiller du président de la République, est au rôle du tribunal d'Alger.
Neuf personnes, entre autres le patron de la société italienne Estaldi, une secrétaire (à la retraite) du ministre de l'Hydraulique de l'époque, alors Abdelmalek Sellal, son secrétaire général, Mustapha Rahial, ainsi qu'un cadre du ministère des Finances étaient en détention et quatre autres en liberté provisoire. L'enquête des officiers du DRS les met en cause pour avoir aidé, en contrepartie de pots-de-vin, des sociétés étrangères à décrocher des marchés auprès des institutions de l'Etat, notamment l'hydraulique, la Présidence, l'armée et d'autres secteurs.
Gouaïche Kaddour, qui avait été libéré dans des conditions troublantes sans même que ses avocats n'en soient informés, a été condamné par défaut à 4 ans de prison, dont trois ans avec sursis, alors que Mustapha Rahial a écopé d'une année de prison ferme. Autre affaire, celle de la GCA (General des concessions agricoles), qui a éclaboussé l'ex-président de l'APN, Amar Saadani, propulsé secrétaire général du FLN. Plus de 3000 milliards de centimes ont été dilapidés des fonds destinés à la revalorisation des terres agricoles.
La justice a ouvert le dossier, mais seuls quelques lampistes ont été condamnés après plus de dix ans de détention préventive. Mais aucune enquête n'a été ouverte sur la fortune de Saadani à Alger et en France. Entre-temps, au mois de mai 2010, et alors qu'Ould Kaddour retrouvait la liberté, une quinzaine de cadres dirigeants de Sonatrach, dont le PDG, sont poursuivis, et à l'exception de ce dernier, la majorité est placée en détention. Appelée Sontrach 1, l'affaire a mis au-devant de la scène médiatico-politique la gestion suspicieuse de l'ancien ministre de l'Energie, Chakib Khelil, l'un des hommes proches du Président.
De nombreux contrats se comptant en milliards de dinars sentaient l'odeur de la corruption, et le nom de Khelil revenait dans la bouche de nombreux accusés, sans pour autant qu'il soit inquiété. Quelques semaines plus tôt, c'est le secteur des Travaux publics d'être éclaboussé par le scandale de l'autoroute Est-Ouest. De graves accusations sont portées contre le ministre de l'époque, Amar Ghoul, mais ce dernier reste imperturbable. Il ne sera même pas convoqué en tant que témoin par le juge, qui a préféré lui transmettre les questions par écrit.
Sellal, Rahial, Gouaïche, Ghoul, Khelil et le DRS
L'enquête menée par les éléments du DRS ne touche pas uniquement les travaux publics, mais également les transports et l'hydraulique, où l'on retrouve encore une fois le nom de Abdelmalek Sellal, en relation avec un ancien conseiller de Sarkozy, cité par un des mis en cause. Lors de l'instruction, l'affaire est recentrée autour de l'autoroute et des transports, où seuls les cadres sont convoqués. L'été 2013 éclate le scandale Sonatrach 2, après le retour des commissions rogatoires transmises par le juge en Italie. Les révélations sont hallucinantes.
Elles impliquent directement l'ancien ministre de l'Energie, qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt international, lui son épouse et ses deux enfants. Il s'envole vers les Etats-Unis, le temps de se faire oublier. A l'automne 2013, la guerre autour du 4e mandat présidentiel fait rage au sommet. Le DRS est accusé d'avoir utilisé ces affaires de corruption pour empêcher le Président de briguer un autre mandat.
Une année après, le DRS devient la cible des attaques les plus virulentes et le service des enquêtes économique est dissous. Ses éléments sont «broyés» et beaucoup envoyés à la retraite ou mutés au fin fond du pays. Le ministre de la Justice, qui avait validé les poursuites contre Chakib Khelil, a été relevé et tous les cadres qui ont joué un rôle dans cette affaire mis au vert.
Les procès de Sonatrach 1 et de l'autoroute Est-ouest se transforment en tribune pour dénoncer les circonstances dans lesquelles les enquêtes ont été menées par les officiers du DRS. Quelque temps plus tard, Chakib Khelil est réhabilité. Il revient au pays par la grande porte.
Mustapha Rahial, après avoir été recyclé par Ali Haddad au sein de l'administration de USMA, est rappelé par le Premier ministre Abdelmalek Sellal comme directeur de cabinet, le statut de ministre hors cadre. Abdelmadjid Tebboune et Abdesselam Bouchouareb, tous deux faisant l'objet d'une poursuite judiciaire par la cour suprême, vu leur statut de ministre, bénéficient d'un non-lieu deux semaines avant leur nomination en tant que ministres dans le gouvernement de Abdelmalek Sellal.
Amar Ghoul est remercié avec le poste de sénateur du tiers présidentiel. Tayeb Belaïz se retrouve conseiller à la Présidence ; Chelghoum, le secrétaire général qui avait couvert les dossiers de la CGA, est nommé ministre de l'Agriculture, alors que Abdelmoumène Ould Kaddour est nommé à la tête de Sonatrach.
A la lumière de cet état de fait, il est difficile aujourd'hui de faire croire à l'opinion publique que le gouvernement de Abdelmadjid Tebboune est dans une logique de lutte contre la corruption. Toute oligarchie nourrie à l'argent des fonds publics n'aurait jamais été touchée si elle n'avait pas lorgné vers le rendez-vous électoral de 2019. Pour le cercle présidentiel, la succession est une ligne rouge à ne pas franchir.
Il l'a bien montré aussi bien en 2009 qu'en 2014, et il le fait rappeler aujourd'hui non seulement aux oligarques du FCE, et bien d'autres promus par Abdelmalek Sellal. La guerre n'est donc pas contre la corruption qui ronge tous les secteurs de l'économie, mais plutôt contre les corrompus qui ont osé franchir l'interdit. Le message est passé, mais faudra-t-il s'attendre à ce que la justice aille jusqu'au bout pour sanctionner ceux qui ont siphonné les fonds publics, mais aussi ceux qui les ont aidés et accompagnés pour le faire ? Le temps nous le dira…


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