Parlez-nous de votre travail ? Mon travail consiste à créer des tableaux. Je “peins” avec le feu. J'utilise le feu provenant d'une chandelle ou d'une torche pour dessiner. En guise de pinceau ou de crayon, j'utilise donc une chandelle pour laisser des traces de suie. Je travaille avec la technique du fumage depuis maintenant 16 ans. En ce moment, je travaille sur ma prochaine exposition qui aura lieu à Montréal, en novembre prochain. Les gens pensent qu'un artiste visuel est toujours dans son atelier, à son chevalet, en train de peindre, mais ce qu'ils ne savent pas, c'est que l'action de peindre représente peut-être le tiers du temps passé au travail. Les deux autres tiers sont consacrés à la préparation, au vernissage, à la numérisation, à la prise de photos pour l'inventaire, aux relations d'affaires avec les collectionneurs et les galeries, la promotion. Comment vous est venue l'idée de travailler avec le feu ? On me pose souvent cette question et chaque fois, je suis un peu embarrassé par ma réponse. La vérité est que cette idée de peindre avec le feu est venue dans un rêve. J'étais dans une galerie (dans mon rêve) et je regardais ce tableau d'un paysage noir et blanc, je savais que cette œuvre avait été faite avec le feu. Le lendemain matin, lorsque je me suis réveillé, je me suis souvenu de ce rêve et j'ai commencé à expérimenter. Ce fut une révélation, une épiphanie, une histoire d'amour instantanée avec le médium. C'était en avril 2001 et je travaille avec le feu depuis… Je n'ai pas inventé la technique, probablement que les hommes des cavernes l'ont utilisée, mais celui qui l'a nommée est Wolfgang Paalen, un artiste suréaliste des années 1940. Comment êtes-vous arrivé à la maîtriser ? Je suis un autodidacte du fumage. Au début, j'ai beaucoup expérimenté sur différents supports et fait beaucoup de recherches pour la conservation des œuvres. C'est d'ailleurs une partie importante du fumage que celle du vernissage des œuvres pour pouvoir les conserver. La suie que j'applique sur la surface du papier reste très fragile et peut être altérée au moindre toucher. Même une fourmi qui marcherait sur la suie déposée sur le papier y laisserait une trace… Je travaille des fois avec les insectes pour faire ce que j'appelle des entomogrames. Via vos dessins, essayez-vous de faire passer un quelconque message ? Je m'exprime sur la fragilité de la vie des espèces qui partagent notre espace vital. Je suis un artiste engagé et je parle de mes préoccupations… la fragilité de la vie et l'espace que nous occupons sur notre planète. Je suis préoccupé par tous les écosystèmes, les sujets de mon travail sont souvent des animaux en voie de disparition, que je mets en images de façon conceptuelle ou figurative. La technique du fumage est pour moi le moyen idéal pour parler des problèmes environnementaux. Après tout, la suie, c'est de la pollution, c'est du carbone et cela fait du sens et donne un autre niveau de lecture à mes œuvres.
Avez-vous déjà exposé vos œuvres ? Je fais au moins deux expositions solo par année, je participe souvent à des expos collectives. J'ai participé à diverses expositions et performances à Montréal, New York, Milan, Toronto, Berlin, Florence, Nagano, Madrid et Stavanger en Norvège.
Avez-vous pensé à venir faire découvrir votre travail en Algérie ? J'aimerais beaucoup visiter l'Algérie. Souvent mon travail me fait voyager. Si une galerie en Algérie est intéressée par mon travail, je viendrais y exposer avec plaisir. Des projets en perspective ? Je travaille sur une exposition qui aura lieu en novembre à Montréal. Une autre à NY en 2018. Je travaille aussi présentement sur mon deuxième livre et sur la continuité de notre projet Révérence. Les deux prochaines années seront chargées et passionnantes.