Pour eux, la réalisation d'un quelconque projet aquacole sans prendre en considération la création préalable d'une zone marine est une violation de l'accord conclu avec l'administration dans le cadre de la commission de wilaya, qui inclut le comité de pilotage de l'installation de la zone protégée mis en place par l'ex-wali. Pour Karim Khima, président de l'association Ardh, «ce comité doit être réactivé pour l'accélération du processus de création de cette zone avec l'implication de la direction de la pêche, qui semble naviguer à contre-courant de ce projet, qui est encouragé, pourtant, au niveau central». Et de préciser que la démarche des associations «ne vise pas à s'opposer à l'investissement dans le domaine de l'aquaculture. Car ce créneau reste un moyen pour la création d'emplois et l'un des segments sur lesquels l'Etat compte pour combler la diminution des ressources et l'alimentation du marché en poissons». Mais, précise notre interlocuteur, «cela ne doit pas se faire à n'importe quel prix. Ce genre d'investissement doit être réfléchi et respectueux de l'environnement marin et de la pêche traditionnelle, qui ne doit pas disparaître, car de nombreuses familles vivent de la pêche». «Lors de nos rencontres avec les responsables du ministère, nous avons obtenu gain de cause concernant la nécessité de protéger le patrimoine marin national. Les lois internationales et celles de l'Algérie, notamment à travers la charte d'adhésion volontaire signée entre le ministère, les pêcheurs et les aquaculteurs en 2014, suggèrent aux professionnels du secteur de s'engager à développer la pêche et l'aquaculture d'une manière responsable et durable», ajoute de son côté Mokhtari Mohammed, coordinateur de la zone est du réseau national de la pêche artisanale en Algérie. Il s'agit d'«un développement qui préserve les ressources et les écosystèmes halieutiques», précise-t-il, avant d'ajouter que «cette charte place également les associations professionnelles comme partenaires incontournables dans l'organisation des zones de pêche». Le représentant local du réseau national de la pêche artisanale en Algérie menace de recourir «à tous les moyens légaux, dont la saisine de la justice, pour bloquer les investissements, si l'avis des scientifiques et des pêcheurs n'est pas pris en considération». Les associations craignent une mise en œuvre anarchique des projets aquacoles, où l'impact négatif de la multiplication des cages flottantes et le non- respect des conditions d'investissement dans ce domaine seront irréversibles, malgré les assurances de la direction de la pêche de Béjaïa. Il faut savoir qu'il a été retenu, pour la wilaya de Béjaïa, 502 projets, dont 34 dans le domaine de l'aquaculture à travers le programme «Aquapêche 2020», conçu dans le plan d'action du gouvernement pour 2014-2019. Officiellement, ce plan vise «à la promotion des filières de la pêche et de l'aquaculture orientées vers l'intégration et la durabilité et favorisant la création d'emplois, ainsi que la satisfaction du marché en matière de poissons». A cet effet, la direction de la pêche et des ressources halieutiques a procédé à la localisation de trois sites pouvant accueillir des activités, comme la conchyliculture et la pisciculture. Ces zones d'activité aquacole (ZAA) ont été localisées en mer, essentiellement sur la côte ouest de Béjaïa. Il s'agit de Saket, où quatre fermes sont projetées, une ZAA, à Tighremt et Timri-n-Tgarfa, qui accueilleront respectivement 2 et 3 fermes pour la pisciculture.