La condition de la femme a, à peine, évolué ces deux dernières décennies dans la région arabe en dépit de la ténacité des associations de promotion de leurs droits. Toutefois, les mentalités restent figées : la tradition relègue la femme à un rôle mineur dans la société et ses droits n'égalent pas encore ceux de l'homme. Situation qui traduit l'incohérence des hommes, en qui s'affrontent deux tendances : d'une part, une grande aspiration à l'évolution et au développement et, d'autre part, un profond attachement au passé. Cela fait des femmes leurs premières victimes. Elles partagent la même culture, les mêmes discriminations, mais chaque pays a sa spécificité. Le taux de participation politique limité et l'accès aux postes-clés restent la préoccupation essentielle des ONG qui œuvrent pour les droits de la femme dans cette région. Selon des chiffres communiqués lors de la dernière rencontre de la femme arabe, qui s'est tenue en mai 2004, le taux moyen de participation politique féminine dans ces Etats varie entre 0 et 2%. Le Maroc est le seul pays à enregistrer un chiffre record, avec 30 députées au Parlement sur 300, soit 10%. D'ailleurs, la femme a pu accéder, en 2002, au poste de conseillère auprès du roi, 3 femmes sur 37 ont été nommées au sein des ministères lors du dernier remaniement. La participation des femmes en Egypte reste limitée : 2,4% au Parlement et 1% dans les municipalités. En Arabie Saoudite, la femme est complètement écartée de la vie politique, elle n'a pas droit au vote. Et au Koweït, l'initiative du gouvernement d'ouvrir aux femmes l'accès aux urnes a été avortée par les députés conservateurs. S'agissant de l'accès aux postes-clés, le défi reste à relever. Malgré un taux élevé de femmes qui ont réussi ces dernières années à s'intégrer dans la vie active, rares sont celles qui ont pu accéder à des postes importants au Bahreïn : aucune femme n'a pu accéder à un portefeuille de ministre et seule une a été nommée par le ministère des Affaires étrangères comme ambassadrice. Dans le sultanat d'Oman, les 41 membres du Conseil d'Etat ne comptent que 4 femmes et la première ambassadrice omanaise a été nommée en 1999, aux Pays-Bas. Net recul Dans ce sultanat, la femme représente 20% de la force de travail, mais seulement 13% pourront espérer être promues à des postes-clés. A ce propos, un net recul de l'accès des femmes à certaines fonctions importantes est noté dans certains pays arabes, dont le Yémen actuel. Avant 1994, à l'époque du Yémen du Nord et celui du Sud, la femme avait plus de facilité à être nommée à des postes-clés. D'ailleurs, au Sud, la moitié des juges était des femmes. Depuis l'union, les conservateurs ont réussi à réduire son rôle de juges à néant et à la cantonner dans des postes administratifs et rédactionnels. Les lois relatives au statut personnel restent un grand dilemme. Dans presque tous les pays arabes, la charia demeure une source de législation et d'interprétation nuancée. La Tunisie est le pays qui applique le code civil le plus conforme aux droits de l'homme dans le monde arabe. Ce pays s'avère être « le paradis » des femmes arabes parce que, sans renier l'Islam et sans y faire aucune référence directe dans ce code, il a adopté des interprétations plus libérales, répondant aux évolutions du temps. Dans certains pays comme l'Arabie Saoudite, il n'existe pas de code de la famille. Le sort de la femme dépend des juges, de leurs tendances et interprétations de l'Islam. Idem à Bahreïn. Quant au Liban, la condition de la femme dépend de la communauté à laquelle elle appartient. Au total 19. En Egypte, malgré les réformes qu'a connues la loi sur le statut personnel depuis quelques années, l'expérience sur le terrain a révélé beaucoup de lacunes, principalement en ce qui concerne le kholea (le droit de la femme à divorcer moyennant la restitution de la dot). Cependant, si le manque de participation politique, l'accès aux postes-clés et les questions du code civil sont des soucis communs partagés par beaucoup de femmes, chaque pays arabe a ses propres problèmes dus à ses conditions. Suivant les critères internationaux, le développement de la société est jugé d'après l'évolution de la femme et celle du livre. La première reflète les conditions sociales et la seconde la vie intellectuelle. D'où des divergences de taille concernant les conditions des femmes dans différents pays arabes. En Tunisie, l'un des plus grands défis que la femme doit relever à notre époque est la création d'une presse féminine. Un souci jugé luxueux par d'autres femmes arabes. Pour la Saoudienne, par exemple, qui, à ce jour, n'a pas le droit de conduire une voiture et qui doit obtenir l'autorisation de son mari pour avoir une ligne de portable. Une Saoudienne qui vient à peine d'avoir le droit à une carte d'identité. En Palestine, la femme a d'autres préoccupations : constamment exposée à la violence politique, le souci des familles est de protéger leurs filles des viols des soldats israéliens en les mariant tôt. Aussi, beaucoup de filles ont dû quitter l'école à cause du prix élevé des moyens de transport. Pour la Jordanienne, le problème majeur reste les crimes d'honneur, d'autant que la condamnation des coupables ne dépasse parfois même pas les 6 mois de prison. Reste encore les oubliés du monde arabe : la Somalie et Djibouti, où c'est la femme qui subit, en premier lieu, les conséquences de la pauvreté et des conflits régionaux. Le degré d'évolution de la femme dépend de plusieurs facteurs déterminants, notamment du degré de flexibilité des décideurs. Comme au Maroc. L'adoption de la Moudaouana - qui prévoit le recours au juge en cas de divorce, donc l'annulation de la répudiation, et en cas de polygamie et d'annulation du tuteur - a soulevé un tollé. Mais l'intervention du roi Mohammed VI a permis d'adopter le code. En Egypte, c'est l'épouse du président, Mme Suzanne Moubarak, qui a joué un rôle essentiel dans le droit d'obtention des enfants nés de père étranger de la nationalité de leur mère égyptienne. Ou encore le kholea. Peut-être que l'une des solutions d'urgence est entre les mains des premières dames !