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Algérie 2040 : mes rêves sont devenus réalités !
Publié dans El Watan le 20 - 04 - 2020

«Pour que notre pays ne meurt pas de chagrin, il faut lui parler une autre langue.»
Nous sommes dans la capitale algérienne 20 ans après la terrible pandémie virale qui a emporté des milliers de vies, mis à genoux l'économie mondiale et démontré aux hommes combien il est vain d'ignorer les leçons de l'histoire.
Bien des choses se sont écroulées depuis, y compris les plus fortes certitudes, celles qui ont finalement conduit à leurs propres évanescences.
Les plus belles théories qui ignoraient celles plus simples de la nature se sont effondrées sans soupir, en silence.
Le monde, affligé, s'est ensuite longuement interrogé sur la nature de ses démons (Milton Friedman en tête) mais aussi sur la nature du vent mauvais qui les a disséminés comme la peste sur la planète.
Combien fut dure la chute lorsqu'on est monté si haut, mais combien aussi fut salvateur ce retour sur terre ! Tout ne fut pas noir, loin s'en faut !
En Algérie, l'épreuve fut tragique. Le gouvernement découvrant après cette terrible tempête la fragilité et l'impuissance de ses institutions face à l'inattendu.
Quand au peuple : mobilisé toute l'année 2019 dans un gigantesque mouvement appelé alors «hirak», il dût d'abord reculer devant la menace de l'épidémie. A la fin de celle-ci, il revint, rendu cent fois plus puissant par le sentiment d'humiliation et d'abandon qu'il vécut en cette sinistre épreuve.
A tout malheur quelque chose est bon : la grande pandémie qui dévasta le monde se mua en un gigantesque tribunal de la conscience humaine.
Et l'Algérie ne pouvait y échapper.
Le pouvoir épuisé par la charge, désemparé face au désastre, accepta enfin d'écouter le seul message qui compte : la nécessité d'un nouveau paradigme pour le vivre-ensemble !
Un nouveau départ, sur de nouvelles bases, en accord avec son peuple.
Le bilan établi par les autorités publiques en cette fin de l'année 2020 fut sans appel : les institutions nationales sont en fait une coquille vide qui ne produit plus que de l'échec : la bonne vieille école fondamentale a résisté à toutes les réformes et poursuit son travail de décérébration, l'université n'était plus qu'une vaste garderie pour adultes, ses diplômés rejoignant chaque année les armées de chômeurs. Ses étudiantes planent à plus de 60% des diplômés pour chuter à moins de 20% de présence dans le marché du travail !
Quant à l'économie… : les grandes industries nationales n'ont pas résisté aux assauts répétés des restructurations-déstructurations et la grande majorité de l'industrie privée a vécu, en fait, en siphonnant l'argent public sans apporter une autre plus-value que l'importation en kits du rébus de l'industrie mondiale !
L'agriculture ne nourrit plus le pays et la bourse des hydrocarbures a chuté dramatiquement et ne remonte plus.
Le réveil est douloureux mais le diagnostic de femmes d'hommes d'expérience que le pouvoir daigna enfin consulter laissa entrevoir un espoir : la situation est certes difficile mais pas désespérée. A condition une fois pour toutes d'abandonner les fausses solutions et d'accepter de changer de cap, le pays peut encore être sauvé !
Le changement de paradigme est enfin accueilli avec lucidité et patriotisme par le gouvernement : on décide courageusement d'abandonner les lances à incendie qui ne laissent derrière elles que des cendres pour se consacrer à l'élaboration de réformes structurelles politiques, économiques et sociales.
Une révolution ! Un espoir aussi immense que celui de Novembre 54 !
Le président de la République soutenu par l'état-major de l'armée et le hirak en appelle aux sages. Il donne pouvoir à des personnalités d'expérience, dont l'honnêteté et la crédibilité sont indiscutables pour créer les conditions d'une résurrection politique du pays. La transition se met en œuvre.
Contrairement aux sombres prévisions des Cassandres, ces décisions courageuses vont contribuer à rétablir la confiance, et l'intérêt de la nation finit par prévaloir sur les éternelles querelles de pouvoir et les grotesques manipulations des valeurs nationales. Une conférence nationale se tint, connaîtra des batailles épiques pendant plusieurs jours, mais une fois les cœurs vidés des haines et des rancœurs et les faux discours épuisés, elle finit par accoucher d'une feuille de route pour le pays ! Le compromis politique historique tant attendu par le pays voit enfin le jour !
Dés lors le travail politique peut commencer sur la base du premier principe retenu : aucun pouvoir, aussi puissant,puisse-t-il être, ne peut gouverner sans relais politiques avec la société. Les médias publics s'ouvrirent au débat, une nouvelle classe de femmes et d'hommes politiques émergea, de nouveaux partis politiques partirent à la conquête de l'opinion et vers la fin 2021, les conditions d'élections générales se trouvèrent réunies. L'automne 2021 verra ainsi naître après des élections ouvertes, transparentes et enthousiastes, la 2e République algérienne, bâtie pierre par pierre de bas vers le haut, disposant de la légitimité et des pouvoirs nécessaires pour lancer les réformes tant attendues par le pays.
Depuis cette date, donc depuis près de vingt ans, les gouvernements vont se succéder, légitimés par des élections libres et placés sous le contrôle du Parlement et des nombreux contre-pouvoirs issus de la société civile. Les réformes vont enfin trouver leurs idées fondatrices, les hommes qui les défendent, les lois qui les fondent et la chaîne de commandement qui les traduisent en actions sur le terrain.
Le premier secteur a en bénéficier fut celui de l'éducation-formation : la réforme progressive et lucide de l'école est enfin acceptée par tous : enseignants, syndicats, parents et décideurs politiques s'accordent sur la nécessité du changement. Débarrassée des miasmes des sombres complots idéologiques et des combats d'arrière-garde, la réforme de l'école fut acceptée par tous, comme un souffle salvateur.
Les programmes furent allégés, partant du principe qu'«une tête bien faite, vaut mieux une tête bien pleine» : les enseignants apprennent à leurs élèves à apprendre en leur donnant les instruments de la connaissance, ceux-là mêmes qui leur ouvrent l'accès libre et ouvert à la connaissance universelle. La moitié du temps de l'enseignement est consacré au développement des capacités sensorielles et cognitives de l'enfant : apprendre à observer et pas seulement à voir, apprendre à humer et pas seulement à sentir, apprendre à percevoir et pas seulement à toucher, apprendre à écouter et pas seulement à entendre !
Après une génération le résultat est là : en 2040, des jeunes gens arrivent au seuil de l'université, intuitifs, pleins de talent et de curiosité, parfaitement bi, voire trilingues, instruits de leur histoire et fiers des valeurs de leur civilisation.
Le bac, cet examen irrationnel qui mettait chaque année 50% des candidats dans la rue, est supprimé, l'accès à l'université est ouvert à tous ceux qui ont achevé leur cycle secondaire à la seule condition de satisfaire aux concours d'entrée.
L'université est ainsi ouverte à la compétition scientifique, artistique et littéraire, les campus se multiplient à travers le pays, développant mille et cent idées pour attirer les meilleurs enseignants et les étudiants les plus brillants. L'industrie nationale publique et privée s'investie dans ce creuset du savoir et de l'innovation pour assurer son développement et être à la mesure de la concurrence internationale.
Ainsi, en 2040, notre système d'éducation formation produit chaque année techniciens, ingénieurs, médecins, hommes de loi qui assurent fièrement le fonctionnement de leur pays, mais aussi des enseignants pour tous les paliers, des chercheurs de niveau international qui défendent honorablement la production scientifique de leur pays sur la scène mondiale.
Le système d'éducation formation de notre pays, en 2040, fort de ses écoles et académie de l'art, forme également artistes, auteurs, plasticiens, femmes et hommes de théâtre qui portent la culture de leur pays au firmament et donnent au monde entier l'image d'une Algérie plurielle, libre, fière de son passé, de son histoire et de ses traditions, mais aussi ouverte à l'échange, à la réflexion et à l'innovation.
En 2040, l'Algérie compte parmi les nations méditerranéennes et africaines les plus avancées dans le domaine de la connaissance et de l'innovation. De jeunes entrepreneurs se sont massivement investis dans les techniques modernes de l'information et de la communication, nos centres de recherche et de production dans les domaines des nanotechnologies et de l'intelligence artificielle sont en compétition avec les meilleurs dans le monde. Grâce à la découverte de gisements de terre rares, notre industrie de pointe exporte des intrants dans la production mondiale en robotique, communication, avionique et technologies de l'espace.
Cette politique a permis à l'Algérie de compenser largement la chute de ses revenus en hydrocarbures, asséchés dès 2030, et d'équilibrer durablement sa balance commerciale. Nos exportations en technologies de pointe ont porté notre PIB de moins de 6000 $ en 2020 à plus de 30 000 en 2039. En portant progressivement la part des dépenses de santé de 5% en 2020 à 12% en 2040, le dépense globale de santé est passée de moins de 400$/habitant à plus de 3000 en 2039 ! 150 000 lits hospitaliers nouveaux, publics et privés, ont été créés, faisant passer le ratio de 1.7 lits/1000 habitant en 2020 à près de 4 actuellement (pour une population de 50 millions d'habitants) permettant à l'Algérie de rejoindre le peloton de tête des pays les mieux pourvus.
La politique de protection sociale, portée par le plein emploi, s'est trouvée renforcée, l'assurance maladie est désormais universelle, ouvrant à chaque citoyen le libre accès aux soins dans toutes les structures tant publiques que privées.
Pour lutter contre la déperdition des cadres féminins des solutions sont mises à leur disposition pour la garde des enfants ou, à défaut pour leur permettre d'effectuer leur travail à distance.
Enfin, fierté ultime, les Algériens ont fini par découvrir l'intérêt capital de leur environnement. Des milliers d'associations, encouragées par les nouveaux pouvoirs publiques sont parties à la reconquête de leur qualité de vie.
Nos villes sont plus propres, nos véhicules circulent à l'énergie électrique, le solaire est devenu la première source de production d'énergie et la gestion de nos déchets s'est organisée efficacement grâce aux efforts conjugués des citoyens et des services de l'Etat.
Le pays avance au-delà de toute espérance.
Au-delà de ce que ma génération pouvait espérer, je suis né en 1998, en pleine guerre civile, je n'ai pas connu mon père, assassiné avant ma naissance par je ne sais qui ni pourquoi, 24 ans après persistent des zones d'ombre au sujet de cette période que ma mère n'a jamais voulu évoquer pour moi.
A 20 ans, alors que je m'organisais pour fuir le pays, je me suis retrouvé propulsé dans le peloton de tête du hirak, en cette année 2019, jubilant d'avoir fait tomber le seul président que j'avais eu à connaître depuis ma naissance !!
Et puis survint cette funeste épidémie et ses conséquences qui nous rappela à tous combien nous sommes vulnérables, à quel point nous nous sommes égarés sur de fausses pistes, fourvoyés dans des impasses.
Mais cette épreuve commune nous montra aussi que tout peut se reconstruire à condition de reconnaître ses erreurs, de prendre conscience des ses forces et de ses faiblesses et d'apprendre avec courage et humilité de changer de cap avant le précipice.
Le temps de cette épidémie, j'ai vu la panique nous gagner, nous avions presque perdu les valeurs qui commençaient à naître avec le hirak.
Submergés par l'effroi, dévastés par la peur de perdre un être aimé, de s'enfoncer encore et encore dans le deuil, nous étions menacés par le retour de l'égoïsme et le repli sur soi. Mais la prise de conscience de notre fragile existence d'hommes y compris chez les puissants : ces géants qui assistent impuissants face à l'écroulement en quelques jours de leurs empires, fut pour moi, à 20 ans, en ce printemps 2019, le choc de ma vie.
J'ai tourné le dos à la frêle embarcation dans laquelle j'avais placé mon dernier espoir de vivre ou de mourir, j'ai pleuré de devoir encore renoncer, mais le «monde civilisé» me paru brutalement si loin de mes espérances.
Et finalement, au moment où je n'y croyais plus, quelque chose s'est mise à bouger. Je ne connaissais rien à la politique, il m'a fallu des années pour comprendre que, dans ce domaine, un virus peut faire mourir et faire revivre en même temps.
Mes enfants, en ce printemps 2040, parlent avec enthousiasme de la révolution du printemps 2019 et en citent ses héros. Moi je suis sur un nuage, mon rêve s'est accompli.


Par Farid Chaoui , Spécialiste en gastro-entérologie


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