Après avoir raté son virage technologique, l'Algérie tente de rattraper son retard. Jusque-là, les effets d'annonce ont contraint les entreprises algériennes à rester en retrait de la révolution du numérique en dépit de l'accélération des usages des TIC, notamment de la part de la jeune génération, boostée par la téléphonie mobile (3G et 4G). Dans ce contexte, le système de câble sous-marin en fibre optique Alval/Orval (reliant Alger et Oran à Valence, en Espagne) est opérationnel et sa mise en exploitation effective permettra à l'Algérie de disposer, à terme, d'une capacité allant jusqu'à 40 térabits, soit près de 20 fois les besoins actuels du pays, améliorant, ainsi, de manière sensible le débit internet. Ce système, qui devait être lancé en décembre 2019, n'a été mis en service que le 31 décembre 2020. Ce câble sous-marin en fibre optique est un système stratégique pour l'Algérie, qui concrétise ainsi la démarche de consolidation de la souveraineté nationale dans le domaine des télécommunications. Le nouveau système devrait permettre de gérer efficacement le flux internet entrant et sortant du pays, le transfert de la Data tout en augmentant la vitesse et le flux d'informations vers l'Algérie, mais aussi les capacités de connexion à domicile et dans les entreprises, selon le ministère de la Poste et des Télécommunications. Orval/Alval vient renforcer les deux autres liaisons sous-marines passant par Annaba, dont Medex d'une capacité atteignant les 2 téras, et d'un troisième câble Alpal 2 passant par Alger via Palma Di Mallorca (Espagne) avec un débit de 85 gigas, jugés «insuffisants». Le câble sous-marin à fibre optique Alval (Alger-Valence) et Orval (Oran-Valence) relie précisément le réseau de communication national, à partir de la station d'El Djamila à Alger et celle d'Oran, au réseau européen, au niveau de la ville de Valence. Sa longueur dépasse les 770 km de fibre optique sous la mer. Selon le site du ministère de la Poste et des Télécommunications, le câble Alval/Orval est doté de 4 paires de fibres optiques reliant les trois stations. Il délivrera initialement 3×100 gigabits/s par paire de fibres et peut augmenter jusqu'à 10 terabits/s par paire de fibre, soit un total de 40 térabits/s, en utilisant la dernière technologie à 100 Gb/s pour chaque longueur d'onde. Ce projet permet de doubler et protéger efficacement (redondance en cas de catastrophe naturelle) les deux liaisons sous-marines Alger-Palma (Alpal2) au Centre et Annaba-Marseille (SMW4) à l'Est, d'offrir une diversité des points d'atterrissement à l'international et d'augmenter la capacité de l'opérateur historique Algérie Télécom dans le domaine des communications et du haut débit internet. C'est une infrastructure 100% algérienne, qui sera exploitée dans son intégralité par l'opérateur public national, à travers Algérie Télécom en Algérie et Algérie Télécom Europe en Espagne. Compte tenu de leur importance de premier ordre, l'endommagement des câbles sous-marins a des conséquences majeures sur les télécommunications et donc sur l'économie des pays touchés par une panne. En avril 2017, la coupure d'un câble SeaMeWE 4 sur la côte algérienne de Annaba avait causé l'arrêt quasi-total d'internet et la perte temporaire de 90% des capacités de connexion du pays avec l'extérieur. Il est donc capital de pouvoir garantir l'intégrité du réseau de câbles car elle détermine la sécurité des Etats et la défense de leur position économique et industrielle. Seul 1% du trafic internet transite par les réseaux satellitaires. Les 99% des flux de données restants passent par ces câbles. Contribution à la numérisation La bande passante internationale est passée de 1,7 à 2,4 Tbps entre janvier 2020 et janvier 2021. Cette capacité sera doublée durant l'année 2021. Il faut signaler le déploiement de la technologie FTTx de haut et très haut débit : 133 000 nouveaux accès FTTx réalisés en 2020. Il a été procédé à la modernisation des réseaux de télécommunication vétustes des grandes agglomérations pour l'amélioration de la qualité de la connexion internet au profit des citoyens : un total de 203 672 accès modernisés au niveau des wilayas d'Alger, Oran et Constantine. Il faut préciser aussi que la réussite des opérations de numérisation et la modernisation des procédures administratives est tributaire d'un bon et stable débit internet. Il est aussi nécessaire dans le cadre de l'inclusion financière et la généralisation des moyens de paiement électronique. «Le débit minimum de 2 mégas, inchangé depuis 2018, reste insuffisant pour permettre une navigation aisée sur le Net», reconnaît Brahim Boumzar, ministre de la Poste et des Télécommunications. «Nous allons augmenter le débit internet minimum (actuellement 2 Mégas). L'objectif à court terme est d'arriver à un débit minimum de 4 à 8 Mégas pour que le citoyen puisse accéder à des services à valeur ajoutée, comme la VOD (Video On Demande) et la vidéo haute définition», a-t-il annoncé sans donner de date précise à cette mutation. Le système TDM (technologie utilisant le fil en cuivre) est remplacé progressivement par la technologie de pointe en fibre optique FTTX (fibre jusqu'au domicile, entre autres). Selon les statistiques officielles, jusqu'au 31 décembre 2020, il a été procédé au basculement vers le FTTX de plus de 203 600 abonnés et la cadence sera accélérée en 2021 pour connecter le maximum des 700 000 abonnés restants vers la nouvelle technologie. Pour Ali Kahlane, consultant en transformation et maturation numériques, s'appuyant sur les analyses des organisations internationales, «seule la démocratisation de l'internet permet au citoyen, quelle que soit sa condition, de pouvoir s'informer et d'accéder aux services en ligne, tout en permettant aux TPE/PME/PMI d'évoluer et de réussir leur transformation ou transition numérique, à moindre coût, en utilisant l'internet fixe. L'internet est le levier de croissance par excellence de toute économie, depuis plus de 10 ans. C'est dire son importance pour le programme de relance économique que le gouvernement a adopté». Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, avait ordonné en août dernier au ministre de la Poste et des Télécommunications de venir, immédiatement, à bout du problème de la faiblesse du débit internet et de définir «les facteurs nuisibles». Si le président de la République en personne a haussé le ton, c'est qu'il a conscience qu'avec un débit internet faible, c'est son propre programme économique et social qui risque de ne pas se concrétiser, ou du moins perdre toute crédibilité. Plus qu'un simple outil de partage d'informations et de divertissement, internet s'impose au fur et à mesure du perfectionnement de nos systèmes de transmission, non plus comme un espace parallèle, mais comme une entité fusionnant avec notre environnement naturel. Advertisements