Même si la période sanglante du terrorisme tire à sa fin, la population n'en connaît toujours pas le bilan réel puisque plusieurs chiffres différents ont été avancés par les plus hautes autorités du pays. On se rappelle de ce 21 janvier 1998 quand le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, annonça, devant le Parlement, le chiffre de quelque 27 000 victimes du terrorisme. M. Ouyahia a qualifié, à juste titre, le terrorisme de phénomène « résiduel ». Selon ce bilan, il est fort probable que le chef du gouvernement ait exclu dans son décompte les morts enregistrés dans le camp des services de sécurité mais aussi dans la partie des terroristes. Ces 27 000 ne représentent, en principe, que les victimes civiles. Le phénomène des disparitions qui s'est greffé sur les actes d'assassinat a compliqué davantage toute tentative d'établir un bilan fiable. Ainsi, le président de la commission ad hoc pour les disparus, Farouk Ksentini, déclare recenser 6146 disparus durant la période allant de 1992 à 1998. Un chiffre, explique-t-il, établi sur la base des rapports de la Gendarmerie nationale. Pas loin de ce chiffre, SOS Disparus avance 8000 personnes portées disparues. Sur la même question, la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH), présidée par Ali Yahia Abdenour, avançait, le 3 août 2004, le chiffre de 18 000 disparus. Ali Yahia Abdenour explique l'importance de ce chiffre par le fait que plusieurs familles de disparus craignaient de déposer plainte pour « ne pas subir de sévices ». S'agissant du bilan de la décennie 1992-2002, le président de la République est revenu sur ce sujet, lors de son discours prononcé au siège de l'UGTA à l'occasion de la fête du 24 février, en annonçant un chiffre de 150 000 victimes. Moins de deux mois plus tard, le 7 avril 2005, M. Bouteflika a déclaré, devant les cadres de la nation, que « la tragédie nationale » s'est soldée par la mort de 200 000 personnes. A voir ces chiffres qui contrastent les uns avec les autres, on peut supposer que le chiffre réel ne serait jamais connu par l'opinion publique. Pourtant, un bilan crédible ne peut que renforcer la vérité sur cette époque tragique.