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Crise au conseil communal de AÏn Taya
Les citoyens pris en otages
Publié dans El Watan le 02 - 08 - 2004

Le conflit opposant des élus au sein de l'APC de Aïn Taya prend de l'ampleur et pénalise durement les administrés. Cette commune balnéaire vit à la cadence des agitations qui secouent le conseil communal.
En effet, des divergences de taille opposent depuis le mois de février le P/APC, Abdelaziz Rih à son 1er vice-président, Ahmed Malek Belamri. Les deux élus sont issus de la même liste, les indépendants pour la « sincérité et transparence » laquelle a séduit les électeurs au point de s'imposer majoritaire lors des élections municipales du 10 octobre 2002 au sein du conseil communal.
UN BILAN NÉGATIF
La genèse du conflit remonte au 15 février 2004, lorsque les candidats de la liste des indépendants se sont réunis pour évaluer le bilan des réalisations de l'APC et tirer les conclusions sur les perspectives d'avenir. « Après 16 mois à la tête de l'exécutif, nous avons malheureusement fait un constat d'échec. Le bilan s'est avéré un véritable fiasco. Nous avons à cet effet interpellé le P/APC en sa qualité de premier responsable des affaires de la commune afin de regagner, par le travail, la confiance placée en nous par la population. Malheureusement, notre appel n'a pas été pris en considération », nous dira Ahmed Malek Belamri, et de poursuivre : « Devant cette attitude, nous avons, dès lors, invité le maire à se retirer et à laisser la place à la personne la plus apte à concrétiser le programme. » Un procès-verbal (dont nous détenons une copie), a été dressé lors de la rencontre du 15 février 2004. Il est reproché au P/APC, entre autres griefs importants, son laxisme, l'absence d'un plan de travail fiable et réaliste, l'absence de prise de décisions pour l'attribution des logements sociaux et des logements participatifs, le non-respect du programme de la liste des indépendants, la non-application de la loi concernant les constructions illicites et ses absences répétées et prolongées pour ses fréquents déplacements à l'étranger et à l'intérieur du pays en sa qualité de président de la Fédération algérienne de boulisme et membre de la Fédération internationale de la même discipline. Un cumul de fonctions électives que la loi ne permet pas. Les signataires de ce document se démarquent de la gestion du premier magistrat de la ville. Le mouvement associatif (28 associations), pour ne pas rester en marge du conflit, ajoute son grain de sel. Ainsi, en date du 19 juin 2004, les présidents de ces 28 associations, représentantes de la société civile, se sont réunis et ont fait un constat négatif de la gestion du P/APC. Dans une lettre adressée au wali délégué de Dar El Beïda (dont nous détenons une copie), les signataires relèvent la situation de blocage qui prévaut au sein de l'exécutif de leur commune, proposant le retrait de confiance au P/APC. Des copies ont été transmises au wali d'Alger, au ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales et le président de la République.
LE MAIRE TRANSFUGE
Devant une telle pression, le P/APC n'a pas trouvé mieux que de rejoindre les rangs du FLN, tendance « Redresseurs » en compagnie d'un élu FFS. Ce qui devait être une simple échappatoire est jugée par les représentants de la société civile et du chargé de la communication de la section locale du FFS, de « trahison et de hold-up de voix ». La municipalité de Aïn Taya, s'est retrouvée, dès lors, sur une véritable poudrière. La section locale du FFS sort de sa réserve. Lors de son assemblée générale ordinaire, elle décide d'exclure de ses rangs « l'élu transfuge ». La fédération d'Alger du FFS et le secrétariat national sont destinataires d'un rapport en ce sens. « C'est pire qu'une trahison. Ce désormais ex-militant du FFS a floué nos électeurs et le parti », commente Abderrahmane Fekkar, secrétaire chargé de l'information au sein de la section locale du FFS. Ce dernier ne manquera pas d'écorcher au passage le P/APC et sa gestion. « Notre municipalité est gérée par des aventuriers », conclut notre interlocuteur. Les indépendants et les représentants des associations interprètent le revirement du P/APC de hold-up. « Nous avons accordé nos voix à la liste des indépendants. Nous ne tolérons, en aucun cas, que nos voix soient détournées vers une quelconque autre entité politique. » « Le P/APC en rejoignant les rangs du FLN a dépassé le seuil du tolérable. Par son laxisme et son manque de respect envers ses électeurs, il est devenu un danger pour la paix sociale à Aïn Taya », enchaînent plusieurs présidents d'associations.
DES ESPACES VERTS... VENDUS
Au moment où le conflit prend des proportions alarmantes et éclabousse toute l'actualité au niveau de Aïn Taya, la population fait face à une situation déplorable. La misère est omniprésente. La dilapidation du foncier est un secret de polichinelle. Les conditions d'hygiène sont désastreuses. Les abattoirs clandestins de volaille prospèrent sous le regard complice des élus locaux. Les chaussées délabrées sont occupées par des vendeurs à la sauvette. L'anarchie est partout. Les sinistrés de Langer 1 et 2, de Amar Bouadou, de Surcouf, de Dergana 1 et 2 et ceux de Haï R'mel vivent encore sous des tentes. Le P/APC est montré du doigt. « Le maire se comporte en bachagha. Il nous méprise. Même lors des journées de réception, il refuse de nous recevoir. Il procède par sélection sur la base des pièces d'identité », témoignent plusieurs sinistrés. Au lotissement Si El Houès, c'est l'anarchie totale. 170 villas sont construites anarchiquement, des extensions sauvages n'ont pas épargné les chaussées. Un élu local figure parmi ces « extentionnistes ». Puisque les malheurs de ce lotissement se conjuguent au pluriel, 16 espaces verts ont été vendus à des citoyens. « Notre lotissement fait face à de graves violations des règles de l'urbanisme. Le P/APC ne craint pas de fouler les lois pour régulariser la vente des espaces verts », nous dira Salah Chaffi, président de l'association pour la gestion et la promotion du lotissement Si El Houès à Aïn Taya. Il nous remet également une copie d'une plainte déposée par l'avocat de l'association auprès du procureur de la République près le tribunal de Rouiba en date du 4 juillet 2004. Quatorze abattoirs clandestins sont éparpillés à travers les terres agricoles de la commune. Ils représentent un danger certain pour la santé des citoyens et de l'environnement. Les plages sont laissées à l'abandon. Des gargotiers, à l'aide de tôles de ferraille, ont construit des boutiques de fortune. « C'est un véritable massacre ». « L'autorité chargée de mettre un frein à une telle anarchie manifeste ouvertement son mépris et son laxisme », nous diront plusieurs citoyens.
UN P/APC « SEREIN »
Le P/APC Abdellaziz Rih que nous avons contacté afin d'avoir sa version des faits s'est montré très réservé. Après nous avoir prié de ne pas utiliser notre dictaphone, le maire répondait sommairement à nos interrogations. Il refuse de rappeler la genèse du conflit qui l'oppose à son adjoint. « C'est un fils de général qui voulait m'imposer sa vision de voir les choses. Je refuse de faire avec, puisque c'est contraire à ma vision ». Au sujet des sinistrés, le P/APC se montre aussi avare en éclaircissements. Il nous dira simplement que la loi est claire au sujet des sinistrés résidant dans des fermes agricoles. Par contre, au sujet des extensions opérées au niveau de la cité Si El Houès, le maire se montre impuissant. « Je ne vais, toutefois, pas démolir des villas de 3 et 4 étages », s'écrit-il. Et de poursuivre : « J'ai hérité d'une situation que personne n'a daigné résoudre. Ce n'est donc pas à moi de mettre le doigt dans l'engrenage. » En matière d'hygiène notamment, la présence d'abattoirs clandestins de volailles, le P/APC préfère ne pas s'étaler sur le sujet. Il dira : « Nous faisons le maximum en matière d'hygiène. Par contre, pour ce qui est des abattoirs de volailles, cela est du ressort des services de l'agriculture. C'est à eux d'agir. » Il ne fait pas dans la dentelle, lorsque nous évoquons avec lui son cumul de fonctions. « Avant mon élection à la tête de la commune, j'étais déjà président de la FAB. Il n'est donc pas question de quitter l'une ou l'autre des deux fonctions pour être clair avec mes détracteurs ». Concernant le détournement des voix des citoyens vers l'ex-parti unique, le P/APC dira : « Je suis libre de mes actes. A ce sujet j'ai la conscience tranquille, et je n'ai de compte à rendre à personne. »


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