A ce train-là, l'hôpital restera éternellement en chantier. » Cette remarque est d'autant plus pertinente qu'elle émane d'un cadre de la Direction de la santé sollicité pour s'exprimer sur le dossier de l'opération d'équipement de cette imposante structure baptisée EHU (établissement hospitalo-universitaire) 1er Novembre, une expérience pilote initiée à Oran et appelée à se généraliser dans les grandes métropoles du pays. En ce moment, on en est au quatrième avis d'appel d'offres. Plusieurs séances de travail ont déjà été consacrées durant le mois d'avril - avec des professeurs de rang magistral comme, à titre indicatif, Mme Nehili dans le domaine de l'ophtalmologie, les Prs Kezzal, Hamadi et Chachoua pour venir à bout des caractéristiques techniques des 1000 articles répertoriés dans le cahier des charges. Les propositions seront étudiées dans le détail. Les sous-commissions - la commission locale de suivi présidée par le directeur de la santé est formée du président de l'APW, du DPAT, du responsable de la Direction du commerce, du directeur de l'EHU, du directeur du CHU et de deux représentants du ministère de la Santé - chargées localement de cette opération en présence d'experts dépêchés d'Alger ont privilégié le travail par groupes représentant des domaines d'activité. Lancé il y a quelques mois, le premier avis d'appel d'offres a été annulé par la commission nationale de suivi qui n'a pas validé le lot unique proposé. « C'était pourtant une démarche tout à fait réglementaire, car il y a bien des firmes assez solides qui fournissent des structures clés en main », affirme-t-on. Le bureau d'études espagnol qui a élaboré le cahier des charges a été cependant maintenu et il a tenu compte des réserves émises. L'appel d'offres suivant a tenu compte du premier refus et a été lancé par lots - 12 plus exactement -, mais son contenu a été jugé obsolète au niveau central. « Quelques mois se sont écoulés et on ne voyait pas encore le bout du tunnel », affirme-t-on à la DDS où, après ce deuxième refus, notre interlocuteur s'est permis cette remarque : « Si on veut donner le marché à une marque précise, en insistant sur des détails très pointus, il ne fallait pas à ce moment-là lancer des avis d'appel d'offres. » Le fait de considérer que le cahier des charges « orienté matériel » n'était pas à la hauteur d'un grand hôpital comme celui-ci a provoqué l'ire du personnel qui a travaillé sur ce dossier. Ce deuxième avis a été annulé, alors qu'il était à sa phase finale. Le troisième avis d'appel d'offres a été refusé pour vice de forme. L'annulation émanant de la commission d'ouverture des plis a été prononcée une dizaine de jours seulement après le début des travaux. Le quatrième et dernier appel d'offres a été lancé il y a trois mois pour des équipements tout à fait nouveaux avec des spécifications techniques. Ce dossier, clos, exigera néanmoins une période d'étude des propositions qui peut aller jusqu'à un mois ou peut-être plus. Les articles en question vont de l'imagerie à résonance magnétique (IRM) au simple bistouri, en passant par le scanner, les appareils de radiologie, les équipements de laboratoire, la stérilisation centrale... Le retard pris ne concerne cependant pas uniquement les équipements médicaux. A titre d'exemple, les 59 ascenseurs dont dispose cette immense bâtisse doivent être gérés de manière optimale. On cite à ce propos le problème du courant faible pour une gestion centralisée des équipements (salle de contrôle) comme également les chaudières, un lot à la charge d'un bureau d'études qui n'a pas de compétence dans ce domaine, précise-t-on. L'étude de réalisation a été confiée à un expert belge. Et on estime à 90% l'avancement des travaux. A la gestion centralisée (GTC) il faut adjoindre la gestion technique des bâtiments (GTB), les caméras, le système antifeu (comme les portes qui se ferment automatiquement en cas d'incendie), le déclenchement des produits antifeu, etc. La sécurité est un domaine non négligeable des préoccupations des concepteurs de cet hôpital. « Quand les Chinois se sont installés sur le chantier, ils ont tout de suite demandé un plan d'ensemble. Et cette façon de faire nous a évité des dépenses supplémentaires et un retard, car ils ont découvert des anomalies non visibles quand on tient compte des plans partiels comme la capacité des chaudières et les réseaux », a indiqué M. Abed de la DDS en affirmant : « Les Chinois sont même revenus avec des solutions après avoir étudié, par exemple, le bilan énergétique, calorifique, etc. » Du retard, il y en a eu au tout début du lancement des travaux, en septembre 2001. Ce retard estimé à huit mois est mis officiellement sur le compte du bureau d'études chargé du suivi. Celui-ci venait juste d'être « lâché », terme utilisé par ses partenaires suisses et d'Alger avec qui il avait auparavant soumissionné. Mais les responsables du projet ont néanmoins loué les efforts fournis par ce bureau d'études pour combler le vide. Un seul ingénieur, a-t-on confié, effectuait, par exemple, le suivi de tout un groupe de lots : climatisation, chauffage, plomberie, fluides médicaux... Comme pour respecter les délais, trois services ont été transférés vers cette structure : la chirurgie cardiaque, la chirurgie cardiovasculaire et le service de néphrologie (l'hémodialyse uniquement). C'est que le projet est suivi à un plus haut niveau de la hiérarchie gouvernementale. Il y a quelques mois, l'EHU 1er Novembre a fait l'objet d'une réunion interministérielle présidée par M. Ouyahia et en présence même, dit-on, de M. Zerhouni, ministre de l'Intérieur.