Les journées médicales organisées le week-end dernier à Yakouren, à l'initiative de l'Amicale du corps médical d'Azazga (ACMA), ont permis de débattre une question d'une grande importance relative au traitement par les antibiotiques. La communication intitulée « L'ATB dans les maladies infectieuses » a mis à la lumière le grand décalage entre les normes universellement fixées pour les antibiothérapies et la réalité de la pratique au niveau national. Les conséquences de l'usage inconsidéré de ce type de médicaments sont extrêmement graves pour la santé publique et pas suffisamment évoquées par les professionnels du secteur et les autorités médicales. La « sélection » de souches bactériennes résistantes est largement favorisée. C'est l'un des derniers tabous de la médecine en Algérie : la vente sans ordonnance des antibiotiques en pharmacie ou la prescription quasi automatique d'antibiothérapie à des enfants présentant dans la majorité des cas d'affections virales. Le taux d'affection d'origine virale est de 80% pour les enfants, mais la prescription d'antibiotiques est de 100%, et le praticien prend le soin de prescrire le médicament au plus large spectre et le plus cher. Ce qui revient à l'exact contraire des orientations adoptées par les professionnels : « Décision justifiée, antibiotique le moins toxique, le spectre le plus étroit, le moins coûteux. » Des parents emmenant leurs enfants aux urgences, notamment pour des pics de fièvre, ont fini par se poser des questions sur le traitement réservé par les médecins. « Je peux très bien remplacer le médecin s'il s'agit de prescrire à chaque fois Augmentin à 800 DA la boîte. On me donne le même médicament à chaque consultation, même si j'y vais quatre fois par mois », dit le père d'un enfant de trois ans, soumis d'entrée de jeu à l'antibiotique le plus cher, le plus fort et au plus large spectre. Le générique est encore inconnu et le praticien affecte le quart du salaire du père pour l'achat d'un médicament, dont l'enfant n'a pas besoin. Son système immunitaire est en fait mis à mal dès son jeune âge, puisque la prise répétée d'antibiotiques empêche le développement normal du corps, qui, en réalité, « profite » des affections virales pour développer naturellement les anticorps. Des médecins présents aux journées médicales ont exprimé des interrogations sur ce volet, alors que pour le commun des « sujets », la maîtrise de l'antibiothérapie est élémentaire et basique dans la pratique médicale. « Quand et comment prescrire l'antibiotique ? », se sont interrogé des médecins ayant parfois de longues années d'exercice. Le conférencier a répondu : « Poser l'indication de l'ATB est à votre portée et vous devez l'avoir à l'esprit. Ce n'est pas le dernier antibiotique qui est forcément le meilleur, c'est celui qui est indiqué. » Il ajoutera qu'on peut reconnaître une affection virale lorsqu'elle touche, à titre d'exemple, toutes les voies respiratoires, alors l'affection bactérienne est plus localisée. Notons qu'une vingtaine de communications ont été présentées lors de ces journées médicales auxquelles ont pris part des médecins venus de plusieurs établissements hospitaliers du pays.