Emus par la disparition d'El Hachemi Chérif, secrétaire général du MDS, plusieurs dizaines d'Algériennes et d'Algériens résidant au Canada se sont rencontrés à Montréal, autour d'un couscous traditionnel, dans la soirée du vendredi 12 août, pour saluer la mémoire du défunt et évoquer son itinéraire de militant politique, de syndicaliste, d'intellectuel et d'homme de culture. Ils ont exprimé leur respect devant le patriotisme ardent et l'engagement constant de ce valeureux défenseur des idéaux de liberté, de démocratie, de justice sociale et de dignité humaine. Divers témoignages ont souligné l'envergure politique et morale de celui qui restera dans les mémoires comme un exemple de courage, d'esprit de sacrifice et de probité, d'abord en tant que moudjahid sur les champs de bataille, du combat pour l'indépendance du pays puis comme animateur de la mobilisation populaire au service de l'édification nationale et enfin comme résistant de première ligne dans la lutte contre l'intégrisme islamiste, son projet totalitaire et son action destructrice. A sa famille, ses proches, ses camarades et amis, les membres de la communauté algérienne ayant assisté à cette commémoration présentent leurs sincères condoléances et les assurent de leurs sentiments de solidarité. C'est dans une ambiance chargée de douleur, mais porteuse de vie et d'espérance dans le charmant restaurant La Kemia de la rue Saint-Denis à Montréal, tenu par un couple d'Algériens, qu'une cinquantaine de compatriotes très émus par la disparition de Hachemi Chérif, secrétaire général du MDS, décédé le 2 août dernier à la suite d'une terrible maladie, se sont réunis, le 12 août dernier, pour lui rendre un dernier hommage, en présence du consul général d'Algérie à Montréal, Abdelaziz Sbaâ, de nombreux intellectuels, artistes et anciens militants du PAGS. Divers compagnons de route de cet infatigable militant de l'Algérie moderne se sont relayés pour souligner ses multiples contributions, se souvenir de l'officier de l'ALN, raconter le militant politique, le syndicaliste, l'intellectuel et l'homme de culture, pour célébrer cet amoureux de la vie, du théâtre, de la musique, du cinéma et des arts et pour partager quelques anecdotes touchantes et révélatrices sur ce personnage chaleureux et taquin qui ne se prenait jamais au sérieux. « Comment parler de quelqu'un qui a consacré cinquante ans de sa vie au même combat : de l'ORP au PAGS puis de l'Ettahadi au MDS », s'interrogeait Idir Sadou qui fut un compagnon de route d'El Hachemi Chérif pendant près de trente ans. Les deux hommes se sont d'abord côtoyés au PAGS durant les années de clandestinité puis dans les années 1990 alors que l'un prit la tête du nouveau mouvement Ettahadi-Tafat, l'autre devint membre du bureau politique du même parti. De l'avis de Sadou, d'El Hachemi Chérif n'a jamais été un politicien au service d'une carrière politique, mais un militant politique qui s'est battu pour des idées politiques nobles et la conquête de la société. « Ce que je retiens de lui, ajoute-t-il, c'est son intransigeance par rapport à l'intégrisme ; il a été durant toute cette période du terrorisme un phare pour mettre en garde contre le péril islamiste, il a joué un rôle de vigile pour être un repère permanent. » La gorge nouée, le regard triste, Idir Sadou a également souligné le parcours d'El Hachemi Chérif au sein de l'ALN-FLN, son engagement dans l'action sociale et syndicale et sa grande fascination pour le monde des arts. « Qu'est-ce que je retiens de lui ? s'est-il encore demandé. Sa rigueur intellectuelle et sa compréhension des phénomènes sociaux et économiques ». D'ailleurs, cette loyauté, cette fidélité à des idéaux politiques a également été soulignée par de nombreux orateurs dont Mortada Zabouri, ancien militant du PAGS, qui a tenu à saluer le courage d'El Hachemi Chérif « qui s'est battu jusqu'au bout, en repoussant aux extrêmes les limites de son corps face à la maladie », a précisé ce dernier. Deux autres témoignages très émouvants furent ceux de Alia Ferhat et Thouria Bekka, qui toutes deux ont côtoyé le défunt durant de nombreuses années, puisqu'elles fréquentaient la même cellule politique que lui. Chacune à sa façon a témoigné de la disponibilité et de la proximité d'El Hachemi Chérif à l'égard des autres camarades. Si bien que « la première personne qui est venue me féliciter pour la naissance de ma fille et m'a offert la khamsa de sa fille en 1988, c'était El Hachemi », a raconté Alia Ferhat. « Pour moi, c'était extraordinaire », a-t-elle poursuivi, la voix entrecoupée de grands soupirs. « Il avait toujours une phrase d'encouragement dans les moments d'obscurité, un mot, une expression, il me disait : ‘'c'est impossible que la mort (l'intégrisme) triomphe de la vie, nous sommes la vie, ils (les intégristes) sont la mort'' », a confié Thouria Bekka à l'assistance composée de nombreuses femmes venues saluer la mémoire de celui qui fit du combat des femmes une priorité absolue. « Il (d'El Hachemi) avait deux préoccupations particulières : les jeunes et les femmes », a rappelé Mourad Chikhi de la Fondation Boudiaf, en soulignant également l'esprit d'ouverture qui caractérisait la démarche d'El Hachemi Chérif lorsque venait le moment de parler de l'Algérie et d'y associer d'autres forces démocratiques. Confiance aux jeunes, aux femmes et rassemblement des forces démocratiques autour d'un idéal commun, tel était le souci principal du secrétaire général du MDS, a souligné Mourad Chikhi. Pour clôturer la série de témoignages, Fewzi Benhabib, membre du bureau fédéral du MDS à Paris, de passage à Montréal, en a profité pour évoquer le patrimoine extraordinaire que laisse El Hachemi Chérif : « Une pensée et une organisation politiques trempées dans deux idées principales : l'identification de l'islamisme politique comme un mouvement totalitaire, d'où la nécessité de le combattre et de le disqualifier de l'échiquier politique, et l'identification du système rentier bureaucratique comme le verrou à l'avancement de l'Algérie vers la modernité et le progrès ». Aussi, selon l'orateur, « la meilleure façon de rendre hommage à El Hachemi Chérif est de continuer son combat et de fructifier plus que jamais son héritage. Fiers de ce legs, les militants du MDS tiendront leur congrès les 22 et 23 décembre prochain à Alger », a rappelé ce dernier. Grâce aux talents de Salah Benlabed, Salah Bediari, Redouane Hamza et Abdelhak, la soirée animée par Djamel Hamoumi, un proche du défunt, a été agrémentée d'un récital de haute tenue, qui en dit long sur la qualité des poètes invités et sur le choix des morceaux poétiques. Une chose est sûre, pour de nombreux Algériens qui se trouvent à des milliers de kilomètres de La Blanche, un phare vient de s'éteindre. D'El Hachemi Chérif va laisser un immense vide, il va terriblement nous manquer....