Carrefour de trois wilayas : Béjaïa, Tizi Ouzou et Bouira, les villages et hameaux de la région d'Illilten et d'Iferhounene accusent, de l'avis de responsables locaux, un retard immense en infrastructures de base par rapport à d'autres localités. L'état des routes est pour beaucoup dans cet isolement. La RN 15, la reliant à Bouira, est impraticable à partir du col de Tirourda. Le deuxième axe routier, la CW 253 Béjaïa-Illilten-Aïn El Hammam, dont l'état laisse à désirer, manque cruellement de fonds pour son entretien, d'où la nécessité qu'il soit érigé en route nationale. Un autre axe attend depuis des lustres sa concrétisation, reliant Tifilkout-Taghzout vers Azazga (Tizi Ouzou) sur un tronçon d'une dizaine de kilomètres et servira de dégagement lors des intempéries hivernales. Dans une commune, où en dépit d'un enneigement excessif durant l'hiver, qui ne dispose pas encore de chasse-neige, les autorités locales et les comités de village n'ont de cesse de réclamer la concrétisation de cet axe routier. « La route, c'est le développement », dit un responsable local pour qui la région aura tout à gagner en cas de jonction entre la R15 et la CW253 en passant par Azrou N'thor. Il ne désespère pas de voir naître une industrie touristique dans cette région au cas où l'Etat s'occuperait de l'état des routes. Après les routes, l'électricité. Non pas que la région n'est pas encore électrifiée, mais la vétusté des lignes électriques (dépassant les 30 ans d'âge) et la faiblesse des transformateurs aériens rendent les coupures en hiver trop fréquentes, au point que de nombreux foyers s'équipent désormais de groupes électrogènes. Le problème de la carence en eau potable n'est pas en reste et a failli même empoisonner la vie des villageois, en créant des dissensions graves entre eux. Si à Iferhounene, toute la commune s'alimente d'une seule source, Tala Meloulène, à Illilten l'eau est gérée exclusivement par les villageois qui l'ont, à juste titre, acheminée des pics de montagne jusqu'aux foyers par leurs propres moyens, qu'ils soient d'ordre pécuniaire ou en main-d'œuvre. Parler de gaz de ville devient une hérésie sachant qu'une localité comme Larbaâ Nath Irathen, à une vingtaine de kilomètres du chef- lieu de wilaya, n'en dispose pas encore. A l'instar des localités avoisinantes, le chômage bat son plein. En dehors de l'administration (mairie, poste,... ) et le secteur de l'éducation, dans ses trois paliers, aucun autre secteur n'est consommateur de main-d'œuvre. Ici, c'est presque tout le monde qui vit de la rente des émigrés. Mais après la rente, plus rien. Si le problème du foncier se pose avec acuité dans ces régions où 90% des terres sont privées et sans titres, elles resteront des communes-dortoirs avec des déficits budgétaires chroniques. Le logement est une affaire individuelle. Chacun a appris à construire sa propre maison. Aucun programme de logements n'est réalisé depuis l'indépendance à ce jour. Par contre, environ 900 aides aux logements ruraux sont débloquées durant ce quinquennat pour les trois communes de la daïra d'Iferhounene. Des aides de 500 000 DA, sont réparties parcimonieusement pour une population majoritairement nécessiteuse. Quant aux 100 locaux promis annuellement aux jeunes chômeurs, un responsable local nous a fait savoir qu'aucun local n'a encore été attribué à un chômeur. Sans ressources, ces localités en marge du développement nécessitent un quantum d'infrastructures. Vivant dans le dénuement à huis clos, les populations usent de la solidarité et de... l'humour pour faire face aux vicissitudes de la vie. Un jeune a eu cette réplique à une question relative à la situation sécuritaire dans la région : « Vous voulez savoir si c'est calme chez nous, alors sachez Monsieur qu'ici, c'est le calme qui nous terrorise ! » Un véritable no man's land effectivement.