Au cœur d'une véritable polémique médiatique, depuis le début de l'année, le groupe d'entreprises Benziane (du nom de son propriétaire, Ahmed Benziane), ne cesse d'intriguer nombre d'observateurs de la place financière locale. Appartenant au cercle restreint des grands clients de la Banque d'agriculture et de développement rural (Badr), à Sidi Bel Abbès, cet ancien officier de la gendarmerie nationale est accusé de « dilapidation de deniers publics » et fait l'objet de plusieurs poursuites judiciaires. Ses démêlés avec la justice sont largement commentés et constamment repris par la presse. Mais de nombreuses zones d'ombres entourent cette histoire de crédits bancaires « douteux ». L'homme en question se défend d'avoir « détourné » l'argent de la banque et parle, ouvertement, d'un « règlement de compte, orchestré par des lobbies commerciaux, visant à [l'] écarter du circuit de la grande distribution ». Pour étayer ses accusations, il cite (sans les nommer), dans une des lettres adressées à la direction générale de la Badr, des inspecteurs de la banque qui lui auraient, selon ses dires, « cousu un audit sur mesure ». « Un rapport d'audit a atterri sur le bureau des policiers de la brigade financière et économique (BEF) avant même d'être expédié aux responsables d'Alger », dit-il avec conviction. En l'absence de plainte émanant du service juridique de la Badr, c'est suite aux conclusions contenues dans ce document que l'« action publique a été mise en branle ». Lequel document, assure t-il, aurait été élaboré sur la base de lettres anonymes ! « Dès qu'il s'agit de deniers publics, la justice s'autosaisira autant de fois qu'il le faudra », avait affirmé en revanche, il y'a quatre mois, le procureur général près la Cour de Sidi Bel Abbès, en réponse à une question posée, précisément, au sujet de cette affaire. « Certaines personnes veulent me ruiner pour solder leurs comptes avec le directeur de la succursale et, par ricochet, disqualifier mes fournisseurs qui ont pu placer leurs produits sur le marché, créant une mévente des leurs », soutien le patron du groupe. « Plus grave encore, tous les banquiers de la région ont été approchés dans le seul but de me discréditer », se plaint-t-il en exhibant une pile de documents « prouvant » sa solvabilité et la régularité de ses opérations commerciales et bancaires. Crédits Impayés Le groupe Benziane comprend douze sociétés de distribution de produits alimentaires, à Oran, Blida ainsi qu'à Alger et couvre pas moins de 16 points de vente à l'échelle nationale. Une activité commerciale qui lui a « ouvert » les portes du monde agricole et permis l'acquisition de plusieurs exploitations arboricoles (400 hectares de plantation en tous genres), employant plus de 500 personnes à Ain Kada, Zelifa, Zaouïa et à Oued Mebtouh, entre autres. Actuellement placé sous contrôle judiciaire pour deux affaires distinctes, l'une concernant la Banque national d'Algérie (BNA) et l'autre la BADR, sa descente aux enfers a entraîné plusieurs responsables de banques. Parmi eux, le directeur du groupement régional d'exploitation (GRE) qui fait l'objet d'« une mesure administrative interne », tout comme le directeur de l'agence 314. Ils ont été déchargés de leurs fonctions lorsque M.Bouyacoub était encore à la tête de la BADR. Selon une source bancaire, Benziane a bénéficié de plusieurs autorisations de crédits d'exploitation, accordées par la commission nationale des crédits de la BADR, pour un montant dépassant les 15 milliards de centimes (25 selon une autre source). Qui décide, au niveau de cette commission ? Et sur la base de quoi a-t-il (Benziane) transgressé, avec les deux responsables incriminés de la banque, les règles prudentielles en matière de crédits ? La justice se chargera, certainement, d'apporter des réponses, tout comme elle devrait traiter d'autres dossiers similaires. Car, selon la même source, pas moins de 150 dossiers, portant sur des crédits impayés au niveau de la BADR de Sidi Bel Abbès (dont il est difficile de déterminer le montant faramineux au demeurant) devraient être examinés par la justice (chambre commerciale), dans les semaines à venir. « Cela se chiffre à des dizaines de milliards, si ce n'est plus (....) D'ailleurs, l'on s'attend à des actions en justice, en cascade », assure t-on.