Le référendum sur la « charte pour la paix et la réconciliation nationale pourrait être une farce s'il n'était, sur le fond, une nouvelle agression contre la société algérienne ». Le ton est donné. C'est par ces premières lignes d'une déclaration liminaire que Hocine Aït Ahmed, le président du FFS, a engagé le dialogue avec des représentants de la presse internationale hier au Centre d'accueil de la presse étrangère (CAPE) à Paris. La veille, au même moment, Hachemi Djiar, conseiller du Président Bouteflika, s'était livré au même exercice, si ce n'est à l'inverse du leader du FFS, pour défendre le projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale. Même sujet, deux tonalités différentes. Le premier pour dénoncer le projet, le second pour le justifier et le défendre. Hocine Aït Ahmed a dénoncé une campagne référendaire « à sens unique », « les contradicteurs sont interdits d'expression quand ils ne sont pas arrêtés et poursuivis, à l'image des parents de disparus », a-t-il dit. Et d'ajouter : « La machine policière a entrepris de fabriquer un plébiscite pour blanchir le régime, consacrer son impunité et décréter la société algérienne responsable de la sale guerre. Il s'agit également - personne ne s'y trompe - de préparer une révision constitutionnelle indispensable pour permettre un troisième mandat à Abdelaziz Bouteflika. Il s'agit enfin d'octroyer un blanc seing à une gestion tyrannique. »...« La paix et la réconciliation n'ont de réalité que dans la démocratie, l'Etat de droit et l'exercice effectif des libertés. » A une question de notre consœur du Soir d'Algérie sur le soutien de membres de la section locale du FFS de Batna au référendum du 29 septembre, Aït Ahmed réplique : « Si ce sont des militants du FFS, ils répondront devant la justice du parti. » Et d'enchaîner : « Nous sommes le parti le plus démocratique, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de forces démocratiques ailleurs. Ceux qui ont signé le contrat de Rome ont subi des coups de force, à l'instar du FLN, le FFS a résisté. » Sur la loi du 23 février 2005, adoptée par le Parlement français, le leader du FFS la considère comme « une loi intolérable » qui « constitue une insulte aux Algériens qui ont chèrement payé leur libération, mais aussi stupide, car elle revient à contester le principe de la décolonisation ». « L'instrumentalisation démagogique d'un nationalisme archaïque et revanchard est aussi détestable. » Et de dire plus loin à une réponse sur les relations franco-algériennes, le traité d'amitié, Aït Ahmed lance : « Bouteflika est persuadé qu'il aura la repentance (par l'Etat français sur les crimes coloniaux, ndlr) pour en tirer gloriole. » Sur la Kabylie, Aït Ahmed, qui a eu des mots très durs en direction des représentants des archs, dénonçant une tentative de « tribalisation » et d'« afghanisation » de l'Algérie, affirme : « La tchétchénisation de la Kabylie est l'un des axes du Pouvoir ». Il a également été très dur envers les partenaires européens de l'Algérie qui ont adopté « une démarche ségrégationniste » envers l'Algérie. « Si les partenaires de l'Algérie n'avaient pas trahi leurs professions de foi, ils n'auraient pas permis que l'armée tire sur les manifestants. » Sur les changements intervenus à la tête de l'armée, notamment ces derniers mois, selon Aït Ahmed « il ne faut pas réduire la machine policière à quelques hommes ». « Le vrai pouvoir, c'est la police politique. » Pour le leader du FFS, l'établissement de la paix dépend du changement de système politique. « Comment amener ce système bloqué à accepter un dialogue avec les forces politiques et sociales qui existent. » Et de dire : « Nous sommes en train de charger la société des ingrédients d'une autre crise sanglante. » « On a arrêté la transition démocratique, il faut la reprendre. » A une question sur Benchicou, Aït Ahmed déclare : « Je suis un démocrate, même un adversaire a le droit à la liberté. Benchicou a été un adversaire politique, il a été un chantre de l'éradication, je sais que la plupart de ce qu'il a écrit dans son livre est vrai. »