«Aït Ahmed ou le FFS hostile à la réconciliation? C'est une blague !» Un événement aussi important que le rendez-vous du 29 septembre n'aurait pas pu passer sans l'intervention dans le débat du leader charismatique Hocine Aït Ahmed. C'est ce qu'il vient de faire, avec un sens de l'à-propos, dans une longue interview au journal El Watan, parue hier. Cette intervention est importante et capitale, parce que le chef historique et président du FFS, a toujours milité pour la réconciliation nationale, d'où l'étonnement de plusieurs citoyens devant l'appel au boycott lancé par son parti. On ne peut donc comprendre la position du FFS sans reprendre l'argumentaire développé par Hocine Aït Ahmed qui a axé son raisonnement autour de quelques points principaux. Que dit-il en substance: «Aït Ahmed ou le FFS hostile à la réconciliation? C'est une blague!» C'est justement là que le bât blesse. Car on ne peut admettre que le FFS s'oppose à la paix civile et à la réconciliation entre les Algériens, connaissant son nationalisme et son parcours politique. Dans la grille de lecture qui nous est présentée maintenant, Hocine Aït Ahmed peut apparaître dans le costume d'un éradicateur, et cela justement brouille les pistes, d'autant plus que lui-même affirme qu'on ne peut marginaliser tout un courant politique national, à savoir les islamistes, qui ont un électorat, une base sociale et un programme politique. «Qu'on ne compte pas sur moi pour criminaliser ou bannir un pan entier de notre société qu'il s'agit au contraire d'intégrer au jeu politique.» Dans son rejet de la charte pour la paix et la réconciliation qui est proposée à référendum, deux arguments essentiels reviennent. Le premier a trait à ce qu'il appelle l'impunité des services de sécurité, et le deuxième concerne la question des disparus. Les deux l'amènent à conclure que la charte est un «acte de guerre contre la société» en se basant sur le fait que le projet mandate le président à prendre toutes les mesures visant à concrétiser les dispositions. On reste là, qu'on le veuille ou non, dans une stricte vision politique, ne prenant pas en considération l'aspiration de la population à tourner la page de la tragédie nationale. En disant que le référendum instaurera une paix illusoire, le leader du FFS sous-entend qu'on va lâcher la proie pour l'ombre, sans tenir compte du fait que les populations des hameaux isolés, qui ont longtemps souffert de la violence terroriste, accueillent la réconciliation avec beaucoup d'espoir. L'autre argument avancé par le président du FFS concerne le déroulement du scrutin lui-même, en le qualifiant de mascarade électorale. Sans mettre en avant le fait que le référendum ne comporte pas d'enjeu électoraliste en termes de sièges à pourvoir et donc de parcelles de pouvoir à conquérir. C'est-à-dire que lorsqu'on y regarde de près, on voit bien que le FFS reste dans une sorte de «ni-ni» auquel il nous avait habitués, et qui malheureusement rend plus ardue la lisibilité de son programme et de son projet. «Ana man votich» était resté assez flou et si peu rentable en termes de moisson politique, jusqu'au jour où le FFS avait décidé d'entrer dans la compétition politique normale, mesurant sa force à celle des autres partis. Il y a plus de cohérence et de visibilité dans la position de Louisa Hanoune et de Djaballah, deux personnalités politiques de l'opposition qui restent fidèles à leur ligne politique tout en soutenant le principe même de la paix et de la réconciliation. Car au fond, l'enjeu est aussi économique. Ce que Hocine Aït Ahmed, lui-même, signale en mettant l'accent sur l'importance des hydrocarbures dans l'indépendance politique et économique du pays, mais en en faisant une lecture a contrario. En cette étape cruciale, il ne fait aucun doute que le discours politique du FFS est brouillé, ne parvenant pas à éclairer les luttes politiques en cours et ne recadrant pas le débat et le projet de société. Au fond il ressort de cette campagne électorale que le FFS a été absent de la scène politique. Les signaux qu'il distille ne permettent pas de décoder son discours, ni d'éclairer l'opinion sur les enjeux réels, lui qui nous a habitués à plus de perspicacité et de pugnacité. En se positionnant par rapport au président, et non pas par rapport au contenu de la charte, M.Hocine Ait Ahmed déboussole ses sympathisants et son électorat traditionnel.