Le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière sort enfin de sa réserve. Il vient de dévoiler, à l'occasion de la journée d'étude consacrée à ce sujet hier au ministère, son plan national de lutte contre la menace de pandémie de grippe aviaire. Un document qui ressemble à tous les plans préparés à travers le monde depuis déjà quelques mois, basé sur les recommandations de l'OMS. Il a pour objectif d'assurer des interventions qui visent à réduire le risque d'émergence d'un virus pandémique, à réduire la morbidité, la mortalité et la désorganisation sociale. Une série de mesures sanitaires et médicales, ainsi que des interventions non médicales sont prévues dans ce programme. La mise en application de ce plan est basée sur sept aspects essentiels et concernent la surveillance virologique, la surveillance clinique et épidémiologique, la vaccination antigrippale, la constitution d'un stock stratégique en antiviraux, l'organisation des soins et planification des besoins, l'information, l'éducation et la communication ainsi que les interventions non médicales. Au plan pratique, le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière n'a mis au point aucune de ces mesures. Mis à part la formation du personnel médical, qui débutera à la fin du mois en cours, le lancement de ce programme ne se fera qu'à partir du mois de novembre prochain en même temps que le programme de vaccination prévu, selon Amar Tou, le 15 novembre prochain. Cette vaccination contre la grippe saisonnière provoquée par la souche actuellement en circulation ne concernera que les personnes âgées de 65 ans et plus ainsi que les personnes présentant des affections chroniques telles que le diabète, les cardiopathies, l'asthme, les insuffisances respiratoires chroniques, les maladies pulmonaires chroniques et les pèlerins. Cette vaccination a pour intérêt, selon le docteur Amrani de la direction de la prévention, de réduire les risques de complication de la grippe, notamment pour les groupes à risque. « Elle permet de réduire les possibilités de recombinaison entre le virus de la grippe humaine et celui de la grippe aviaire », a-t-elle ajouté. Concernant le stock en antiviraux, lesquels doivent être utilisés en attendant la fabrication d'un vaccin contre la nouvelle souche, le ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière dit être approvisionné en ces produits. Quelle est la capacité du stock ? Pour quelle durée ? De combien de doses ? Des questions qui sont restées sans réponse. Amar Tou garde en secret toutes ces informations (lire encadré). Ces antiviraux ne seront, en cas de pandémie, prescrits que pour les personnes dont les activités sont indispensables au fonctionnement du pays et les personnes à risque médical. « Seulement 10% de ces groupes de population en bénéficieront pour cette année 2005. Elle sera de 35% en 2006, de 50% en 2007, de 70% en 2008 et de 75% en 2009 », a-t-il souligné. La question qui se pose est de savoir pourquoi les autres catégories de personnes, telles que les agriculteurs, les éleveurs, ou même un groupe de population à risque, ne sont pas concernées. « L'accès aux vaccins ainsi qu'aux antiviraux reste un problème majeur en raison de la capacité de fabrication limitée et en raison du coût élevé », a signalé le docteur Amrani lors de la présentation du plan. Autres mesures de prévention, les DSP ont été instruites de notifier tous les cas de grippe avec complications et les cas hospitalisés. Au plan virologie, un réseau de surveillance de la grippe est « en voie de réalisation », a signalé le docteur Amrani, en précisant que ce réseau permettra aux services concernés de pouvoir surveiller les virus grippaux circulants et à détecter les variantes inhabituelles. De son côté, le docteur Bougdour, du ministère de L'Agriculture, n'a pas caché son inquiétude quant à la propagation de cette maladie via les oiseaux migrateurs. Les derniers cas de grippe aviaire signalés en Turquie inquiète sérieusement. « Compte tenu de la situation géographique, le danger se rapproche de chez nous. Il faut être extrêmement vigilant », a-t-il alerté, tout en rassurant que l'Algérie a interdit depuis 2003 toute importation de volailles de l'étranger. « Notre pays n'a pas de relation avec la Turquie dans la filiation avicole », a-t-il rassuré. Mais il n'écarte pas les éventuels risques dus aux entrées frauduleuses d'oiseaux exotiques. Le docteur Bougdour rappelle que l'importation de ce genre d'oiseaux est interdite. Comme il a signalé que des mesures de sensibilisation destinées aux voyageurs étaient initiées par le ministère de la Santé depuis 2004 à travers des dépliants. Selon lui, une surveillance active des canards et des oiseaux sauvages est urgente et indispensable. Le ministère de l'Agriculture, en collaboration avec l'Institut Pasteur d'Algérie, va procéder de manière aléatoire au prélèvement de sang chez les canards et les oiseaux sauvages afin de rechercher une éventuelle présence virale. C'est un moyen, d'après lui, de prémunir l'Algérie de ce virus hautement pathogène. Le représentant de l'OMS en Algérie est revenu longuement sur toutes les actions menées par l'OMS pour faire face mondialement à la pandémie de la grippe aviaire de type A H5N1, dont l'historique a été retracé par différents intervenants. A noter que cette pandémie a causé entre 2004 et 2005 l'abattage de 250 millions de volailles dans la région asiatique et le décès de 66 personnes. Aucune transmission interhumaine n'a été enregistrée mais le risque reste élevé. A ce jour, selon l'OMS, 50 pays ont mis en place une politique de lutte contre la menace de pandémie de grippe et 250 millions de doses de vaccins antigrippaux sont produites chaque année pour les pays industrialisés. « Pour riposter en cas de pandémie, il faut être en mesure de fortement augmenter la production de vaccins et constituer des stocks antiviraux capables d'éviter des maladies graves s'ils sont utilisés suffisamment tôt après la survenue de l‘infection », a précisé M. Dekkar, le représentant de l'OMS à Alger.