Djilali Hadjadj, président de l'Association algérienne de lutte contre la corruption (AALCC), affiliée à Trensparency International (également médecin et journaliste), a finalement été embarqué hier à bord d'un fourgon cellulaire (puis un véhicule bariolé) pour rejoindre la capitale, sous bonne escorte policière. Le convoi devait faire une halte au niveau de chaque sûreté de daïra des quatre wilayas (Sétif, Bordj Bou Arréridj, Bouira et Boumerdès), qu'il traverse tout en s'arrêtant à Bordj Bou Arréridj, pour y passer la nuit et reprendre aujourd'hui le chemin vers Alger, qu'il atteindra certainement en fin de journée. Djilali Hadjadj avait été arrêté dimanche dernier, à l'aéroport de Constantine, au moment où il embarquait avec son épouse à destination de Marseille. Présenté devant le procureur du tribunal de Constantine, il a été placé en détention et c'est là où il a appris qu'un mandat d'arrêt avait été lancé à son encontre par le juge d'instruction de la troisième chambre près le tribunal de Sidi M'hamed, près la cour d'Alger, le 17 février 2010. En fait, selon des sources judiciaires, il s'agirait d'une affaire pour «faux et usage de faux» liée à des «prescriptions d'ordonnance et d'arrêt de travail pour son épouse» qu'il aurait signées sans en avoir la qualité. Une affaire que la brigade économique et financière près la sûreté de wilaya d'Alger avait ouverte en 2006, à la suite d'une lettre de dénonciation anonyme. En réalité, il n'y a pas eu de plainte du ministère du Travail, ni de la Cnas, son ancien employeur, mais une auto-saisine du parquet de Sidi M'hamed. Ce n'est que le 23 mai 2010 que l'affaire est jugée par défaut. Hadjadj et son épouse ont été condamnés respectivement à 3 et 1 an de prison ferme assortie d'une amende de 5000 DA. Contactée par téléphone, Mme Hadjadj est formelle. Ni elle ni son mari n'ont été entendus par le juge d'instruction et encore moins reçu une quelconque convocation de la justice pour être entendus ou jugés. «Mon mari a été entendu une seule fois, en 2006, par la police à la sûreté de wilaya d'Alger. Depuis, jamais nous n'avons reçu un quelconque courrier ni de la police ni du parquet…», a souligné Mme Hadjadj. Elle précise que de février, date à laquelle le mandat d'arrêt a été lancé, jusqu'à dimanche dernier, son mari «a beaucoup voyagé et n'a jamais été inquiété» par les services de police au niveau des postes-frontières. De ce fait, elle s'interroge sur «l'opportunité» d'une telle décision et craint qu'elle ne soit liée aux activités de son mari au sein de l'association. Hier, Mme Hadjadj n'a pas quitté d'un pas son époux. Elle a fait le voyage avec lui de Constantine jusqu'à Alger, en suivant le véhicule de police qui le transportait à travers l'ensemble des sûretés de daïra. Elle espère qu'une fois à Alger, «le calvaire prendra fin» et elle pourra rentrer avec son mari à la maison avant la fête de l'Aïd. «J'espère que l'autorité judiciaire fera tout pour vider le mandat d'arrêt aujourd'hui et éviter ainsi que mon époux passe l'Aïd, à la prison. Je ne pense pas que sa place soit dans ce lieu en ces jours de fête», lance-t-elle amèrement. A signaler que l'arrestation de Djilali Hadjadj a suscité la réaction de nombreuses associations et ONG militant pour les droits de l'homme et contre la corruption. Il est évident que dans cette affaire, il y a anguille sous roche, d'autant que depuis le 17 février dernier à ce jour, il s'est passé six mois, sans que les services de la police exécutent le mandat d'arrêt. Peut-on croire à une simple mauvaise gestion de ces services ou s'agit-il de dessous politiques ? Dans les deux cas, il est à craindre pour le pays…