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Les produits dérivés en clair
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Publié dans El Watan le 10 - 01 - 2011

A l'origine, les produits dérivés ont donc été créés pour permettre aux entreprises de se couvrir contre différents types de risques financiers. Le premier risque est celui des cours des matières premières. Par exemple, un fabricant de confiture s'engage sur un prix constant sur l'année. Il ne peut donc pas répercuter les fluctuations des prix du sucre sur celui des pots de confiture.
Quand il détermine le prix de vente de ses pots, il doit donc faire l'hypothèse d'un prix moyen du sucre pour la suite de l'année. S'il achète son sucre au prix du marché pendant le reste de l'année, il peut alors rencontrer deux situations :
1- Le prix réel est en dessous de ses prévisions, il augmente ses marges. Il fait une rentrée d'argent inattendue.
2- Le prix réel augmente cela entraîne des problèmes qui risquent d'affecter le processus industriel. Au pire, on peut imaginer qu'il n'ait plus assez d'argent pour acheter au prix du marché et qu'il soit obligé de stopper sa production.
Les risques spéculatifs sont donc très dissymétriques pour notre fabricant de confiture:
1- En positif puisqu'il s'agit d'une simple entrée d'argent non prévue, qui viendra donc dormir dans la trésorerie de l'entreprise,
2- En négatif puisqu'il y a un blocage complet de la production.
Il serait donc préférable pour le fabricant de laisser ce risque spéculatif à d'autres. Justement c'est ce qu'il fait en achetant par exemple au 1er janvier des options d'achat pour chacun des mois de l'année.
Une autre utilisation courante est le risque de change par exemple pour une fonderie qui achète la tonne de fonte en dollar et vend des pièces mécaniques en euro. L'objectif poursuivi par les produits dérivés est, dans tous les cas, de permettre aux parties contractantes de réaliser une transaction dont il serait plus difficile ou coûteux de réaliser sur l'actif sous-jacent lui-même, pour des raisons qui peuvent être d'origine réglementaire, comptable, fiscale ou financière, voire il serait impossible de réaliser parce que l'actif en question n'existe encore que théoriquement, son existence pouvant dépendre par exemple du déroulement éventuel d'un événement.
Définition des produits dérivés :
La définition proposée par IAS 39 : un dérivé est un instrument financier dont la valeur varie selon l'évolution d'un taux d'intérêt de référence, du prix d'un titre ou d'une marchandise, d'un cours de change, d'un indice de référence, d'une cotation de crédit ou de toute autre « sous-jacent » et qui requiert un placement relativement faible (ou nul) par rapport à d'autres types de contrat réagissant de manière similaire aux évolutions des conditions de marché et qui est réglé à une date ultérieure (1).
Il convient néanmoins de distinguer deux types de produits dérivés bien distincts : Les produits fermes et les produits optionnels.
Marchés à terme organisés :
Le développement des transactions de gré à gré a amené (par gré à gré, on entend la libre négociation entre les deux parties contractantes, dans le souci d'assurer la sécurité des règlements/livraisons) la création des marchés à terme organisés. On y négocie des engagements de livraison standardisés à des échéances également standardisées.
Le progrès décisif ici vient de ce que la chambre de compensation du marché à terme se substitue à tous les intervenants : Elle est l'acheteur de tous les vendeurs et le vendeur de tous les acheteurs. Dès qu'une transaction bilatérale est enregistrée à la chambre de compensation, ses contractants n'ont plus que la chambre de compensation elle-même comme contrepartie. Celle-ci leur demande individuellement, dans le but de protéger le marché, un dépôt de garantie correspondant à l'équivalent d'un ou deux jours de fluctuation maximale des prix puis, généralement une fois par jour ouvré, procède à un appel de marge.
De même montant mais en sens inverse pour les deux intervenants, celui-ci correspondant à la dépréciation, pour l'un, et à l'appréciation, pour l'autre sur la journée des contrats qu'ils ont échangés. Le non-paiement dans les délais d'un appel de marge entraîne, habituellement, la liquidation automatique le lendemain à l'ouverture de la position de l'intervenant fautif. Pour une échéance donnée, les contrats qui donneront in fine lieu à règlement et livraison sont généralement en très faible proportion du nombre total de transactions réalisées. La plupart de celles-ci sont en fait annulées avant l'échéance par une transaction inverse, par exemple un achat par une vente.
1. Marché à terme ferme :
Dans ce marché s'échangent des contrats standardisés et donc fongibles, représentatifs d'une certaine quantité et qualité d'actifs sous-jacents. La livraison effective n'a lieu qu'à l'échéance standardisée du marché si aucun échange de contrats de sens inverse n'a lieu dans l'intervalle. Tout agent qui achète un contrat se met en position longue et celui qui vend un contrat se met en position courte (2).
Les principaux dérivés financiers fermes sont :
a. Les contrats forwards (forward, (un terme anglais qui veut dire : précoce, en avance)
Historiquement, les premiers produits dérivés ont été des transactions à terme de gré à gré (appelées en anglais : forwards) sur des marchandises, c'est-à-dire l'engagement ferme de réaliser dans l'avenir une transaction, achat ou vente à une date à un prix et pour une quantité tous les trois fixés au départ, sur l'actif sous-jacent, généralement une matière première standardisée comme le blé en Europe ou le riz en Asie. L'huile d'olive semble avoir été, dans l'antiquité, la première marchandise traitée à terme. C'est le type de contrat à terme le plus ancien et le plus simple qui existe aujourd'hui. Ce décalage dans le temps permet deux choses impossibles à réaliser avec une simple transaction au comptant :
- La vente à découvert (au comptant, il faudrait réussir à emprunter préalablement le sous-jacent);
- L'effet de levier pour spéculer à la hausse (au comptant, il faudrait financer l'intégralité du sous-jacent et de ses coûts de stockage - là, il ne faut financer qu'une partie, le dépôt de garantie que peut exiger le vendeur pour couvrir des mouvements de prix contraires).
Sont donc attirés naturellement vers ce type de transactions :
- Des professionnels désirant fixer un prix à l'avance pour une quantité d'actif sous-jacent qu'ils doivent recevoir ou livrer dans l'avenir ;
- Des spéculateurs, qui sont statistiquement la contrepartie naturelle des premiers.
Les transactions réalisées restent exclusivement bilatérales. Prenons l‘exemple d'une société qui achète une matière première dont le prix sont très volatil (pétrole, cuivre, zinc) et qui souhaite maîtriser son coût d'achat sur une durée de 06 mois afin de s'assurer de la rentabilité de sa production. Elle achète pendant les 6 mois à venir, à l'aide d'un ou de plusieurs contrats forward, les matières premières dont elle a besoin à un prix fixé à l'avance. Cette société ne pourra effectivement pas bénéficier d'un éventuel abaissement du coût de la matière première, alors qu'elle aurait pu en bénéficier en achetant au comptant cette marchandise. En revanche, en cas de progression du cours de la matière première sous-jacente, la société maîtrisera son coût d'approvisionnement.
Les contrats forward permettent également de vendre le sous-jacent à terme et selon un prix négocié à la conclusion du contrat. A la lumière des données précédentes, la société peut souhaiter vendre sa production à terme sans connaître de contraintes de fluctuations des prix. Les contrats sont des contrats de gré à gré. Le contrat doit aboutir à son terme, mais rien ne garantit que les parties à ces contrats assureront leur obligation à la fin du contrat. Les profits et pertes constatés ne sont réalisés qu'à la terminaison du contrat. C'est la raison pour laquelle les contrats forward font l'objet de garanties bancaires et sont généralement souscrits par des entreprises multinationales dont le risque de défaillance est faible. Le principal risque en matière de contrat forward est le risque de contrepartie. Il peut être atténué par la fixation dans le contrat, d'un dépôt de garantie.
b. Les contrats futurs
Lorsqu'un contrat à terme standardisé est conclu sur un marché, il est appelé contrat futur, à la différence des contrats forwards qui sont taillés sur mesure et s'échangent de gré à gré (3). Les contrats futurs ou à terme, concernent aussi bien les contrats échangés sur les marchés organisés que les contrats échangés de gré à gré.
En France, les contrats futurs sont cotés sur un marché spécifique principal, le MATIF (marché à terme International de France), qui est une organisation dont l'objectif principal est de mettre à la disposition des intervenants les moyens de se couvrir. L'avantage essentiel d'un contrat futur, comparativement à un contrat forward, outre la possibilité de déboucher un contrat à tout moment sur le marché, réside dans la standardisation du contrat. Les standards financiers existants permettent de gérer plusieurs types de risques : Le risque de taux d'intérêt, le risque de marché sur action, indices ou matières premières, le risque de change (4).
2. Les warrants :
Les warrants sont des options particulières, d'achat (call warrant) ou de vente (put warrant), émises par des contreparties financières, le plus souvent des banques, ayant le statut juridique de valeur mobilière, généralement d'une durée initiale de plusieurs années, cotées sur une bourse. D'autres caractéristiques les distinguent aussi des options : type d'échéance, sens (uniquement des achats). Le premier warrant a été émis en 1989 par la banque Société Générale qui est aujourd'hui un des principaux acteurs mondiaux sur ce marché, aux cotés d'autres grandes banques internationales. Contrairement aux bons de souscription, les warrants ne sont émis que par des établissements financiers et fonctionnent comme des options. Les warrants sont assimilables à des options call alors que les warrants puts sont comparables aux options puts.
3. Les dérivés financiers optionnels :
Les principaux dérivés financiers optionnels sont :
a. Les options
L'option est un contrat entre deux parties par lequel l'une accorde à l'autre le droit mais non l'obligation de lui acheter (option d'achat, appelée aussi « call ») ou de lui vendre (option de vente, appelée aussi « put ») une quantité donnée d'un actif financier (action, obligation, indice boursier, devise, matière première ou un autre produit dérivé), appelé actif sous-jacent, moyennant le versement d'une prime à un prix précisé à l'avance (prix d'exercice), et à une échéance convenue, c'est-à-dire à une date d'échéance donnée (option européenne) ou avant une date donnée (option américaine) ou encore à une série de dates données («mid-Atlantic» ou «Bermuda»).
Techniquement, la valorisation d'une option dépend ainsi principalement des éléments suivants :
- Du sous-jacent, en particulier : la valeur sous-jacente est la valeur du bien (actions, indice, taux d'intérêt, matière première…) sur lequel portera le droit du détenteur du contrat d'option. Elle est la différence, si elle est positive, entre le cours de l'actif sous-jacent et le prix d'exercice de l'option de l'achat. Pour une option de vente, c'est l'opposé (5) ;
- De son prix : le prix d'exercice d'option porte sur le prix auquel le droit d'acheter ou de vendre pourra être exercé. Il existe des prix d'exercice : « dans la monnaie » lorsque le prix d'exercice est inférieur au cours du sous-jacent au jour de la souscription, « à la monnaie » lorsque le prix d'exercice est égal au cours du sous-jacent, « en dehors de la monnaie » lorsque le prix d'exercice est supérieur au cours du sous-jacent (c'est ici encore à l'inverse pour les options de vente).
- De la volatilité de la valeur d'action : La volatilité d'une action est sa propension à s'écarter de son cours de bourse ;
- De la durée de l'option : la valeur d'une option d'achat croît avec la durée de vie de l'option. De même, la valeur d'une option de vente croît avec la durée de vie de l'option ;
- Des taux d'intérêt sans risque : la valeur d'une option d'achat croît avec le taux d'intérêt sans risque. Inversement, la valeur d'une option de vente décroît avec le taux d'intérêt sans risque.
Il convient de signaler dans cet ordre d'idée que l'analyse de l'option se base sur deux valeurs :
• La valeur intrinsèque : la valeur intrinsèque d'une option est la marge théorique que l'on obtient si l'on exerce le contrat au cours actuel du sous-jacent.
• La valeur temps ou valeur d'attente : c'est la différence entre la valeur intrinsèque et la prime de l'option. La valeur temps est donc cette indemnité supplémentaire que l'émetteur réclame pour le risque qu'il court. Plus le risque est grand, plus la valeur temps et la prime sont grandes.
2. Les swaps
Le swap est un contrat d'échange de flux financiers entre deux intervenants.
Les deux contrats les plus courants sont : le swap de taux d'intérêt, qui échange les intérêts d'un prêt ou dépôt à taux variable contre des intérêts à taux fixe, le swap de change (de devises), qui échange les intérêts et la valeur à l'échéance d'un prêt ou dépôt dans une devise contre sa valeur dans une autre devise.
A l'origine, il s'agissait de pouvoir modifier les caractéristiques d'actifs financiers, par exemple de taux fixe en taux variable, sans les faire sortir du bilan et sans encourir les conséquences fiscales ou comptables d'une telle sortie. On superposait ainsi un produit hors bilan, le swap, à un actif existant. Le premier swap, qui était un échange de taux d'intérêt, fut arrangé en 1981 par Salomon Brothers, entre IBM et la Banque mondiale. Au cours des années 1980, les banques d'investissement ont traité les swaps pour leur propre compte, entre elles et face à leur clientèle, et le marché des swaps de taux d'intérêt a cru de manière exponentielle, jusqu'à devenir le deuxième plus actif marché de taux au monde, juste derrière celui de la dette négociable des principaux Etats (Etats-Unis, Allemagne, Japon, France, Royaume-Uni, etc). Il sert de référence aux marchés de la dette des entreprises, des collectivités locales et de la plupart des pays souverains.
La formidable dynamique des marchés de swaps réside dans ce qu'il n'y a pas d'échange de capital, seulement l'échange de flux d'intérêt. Dans le cas d'un swap de taux d'intérêt, il s'agit donc d'un prêt débarrassé de l'essentiel de son risque de crédit. Des appels de marges ou des dépôts de collatéral en garantie peuvent même le faire disparaître presque totalement et le swap devient alors pur taux d'intérêt, réductible à ses coefficients d'actualisation (en anglais : discount factors) et donc fongible. Une banque peut alors gérer aisément et de façon centralisée des myriades de swaps et autres produits de taux taillés sur mesure pour les besoins particuliers de sa clientèle.
Références bibliographiques :
1. Comptabilité internationale : les IAS/IFRS en Pratique. Decock & Donse. Ed. Economica. P.216
2. Les marchés des produits dérivés : problèmes économiques n°2567 du 06/05/1998
3. Comptabilité internationale : les IAS/IFRS en Pratique. Decock & Donse. P.195
4. Principes de gestion financière. Ouvrage collectif. Editions Pearson 2006. P 783
5. Finance d'entreprise : Pierre Vernimmen. Editions Dalloz 1998. P 440


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