De par leur mouvement de protestation, ils souhaitent obtenir satisfaction quant à leur plate-forme de revendications. Dans cette plateforme, il est relevé en résumé la nécessité impérieuse de trouver une « solution à la situation précaire des étudiants en fin de cursus et dont les soutenances sont à ce jour suspendues ». Ils souhaitent en parallèle « l'implication du ministère de l'Enseignement supérieur, tutelle pédagogique de l'établissement, dans la gestion de l'enseignement supérieur artistique et une remise à niveau de l'école, conformément aux normes universitaires qui régissent l'enseignement supérieur national ». Sachant qu'après plus de vingt ans d'existence, le statut de l'école « ne permet pas aux étudiants d'être intégrés au même titre que les autres. En effet, lorsque l'on sait qu'une simple attestation fait office de diplôme sanctionnant cinq ans d'études, nous ne sommes pas étonnés que les étudiants des beaux-arts ne bénéficient pas d'œuvres universitaires, à savoir le transport, l'hébergement, la restauration, au sein des structures de l'Office national des œuvres universitaires (Onou) ». « Provocation » Autre revendication soulevée, la « mise en place de commissions de réforme de l'enseignement artistique sur la base d'un dialogue franc et honnête avec la collaboration de toutes les parties concernées ». De son côté, la tutelle administrative, en l'occurrence le ministère de la Culture, doit « dégager un budget conséquent qui permettrait l'amélioration du niveau de l'enseignement, par l'acquisition d'outils technico-pédagogiques, et des conditions de vie des étudiants internes, notamment en édifiant une nouvelle cité universitaire sur le site actuel d'hébergement ». Ainsi, rappellent des étudiants rencontrés sur les lieux où est observé le sit-in : « Nous avons tenu une réunion avec des représentants du ministère de la Culture samedi et rencontré le jour d'après des représentants du ministère de l'Enseignement supérieur pour discuter de cette plate-forme, en vain. Ces deux rencontres n'ont pas été sanctionnées par des PV. Elles sont officieuses. Nous voulons du concret. » De leur côté, les enseignants de l'école ont repris leur grève depuis dimanche. Dans une déclaration rendue publique hier, ils dénoncent « les provocations répétées, les décisions machiavéliques honteuses du directeur de l'école, traduites notamment par l'officialisation de la structure pédagogique clandestine, l'élaboration d'emplois du temps contraires à tout entendement ». Aussi, ils relèvent en résumé « le non-respect par le ministre de la Culture de ses engagements et du calendrier de rencontres » avec les syndicalistes, « le non-règlement des trois mois d'arriérés de salaires, la non-levée du harcèlement judiciaire, la prise en otage des étudiants et des enseignants dont trois de ces derniers ont été éloignés de la pédagogie par mesure de représailles ». Et la « non-restitution de la salle des enseignants et du bureau syndical ». Rencontrés à l'Ecole supérieure des beaux-arts, des enseignants rappellent avoir « organisé durant cette année plusieurs journées de protestation et grèves ». « Nous avons suspendu notre dernière grève en juillet dernier sans pour autant organiser les examens et assurer les soutenances. Nous avons fini par signer les PV en octobre pour reprendre, car la tutelle nous a promis de répondre favorablement à nos revendications, à savoir débloquer les trois mois d'arriérés de salaires des enseignants, l'annulation des poursuites judiciaires entamées contre les enseignants grévistes et le règlement des questions pédagogiques. En d'autres termes, il s'agit de tenir des élections pour pourvoir les postes du président du conseil pédagogique, de sous-directeur d'études et de chefs de département. Nous avons alors organisé les examens et les rattrapages et remis les notes. Mais, comme la tutelle n'a pas tenu ses engagements, nous n'avons pas assuré les soutenances. », ajoutent-ils. Et de poursuivre : « Les emplois du temps n'ont été affichés que le 22 du mois en cours alors que les vacances d'hiver sont fixées à la fin décembre. Ces emplois du temps sont catastrophiques, des modules sont improvisés. Comme des matières ne sont pas affectées à des spécialistes indiqués à cet effet. » « Confusion » Rencontré à son tour, un des responsables à la direction de l'Ecole supérieure des beaux-arts indique que sur quarante enseignants que compte l'établissement, vingt-quatre sont en grève. Les seize restants travaillent. « D'ailleurs, les étudiants en première année ont entamé les cours. » Il rappelle que les enseignants contestataires ont organisé des journées de protestation et des grèves dont la dernière a été enclenchée à la mi-juin, « à la veille des examens. Cela a créé la confusion. Nous avons retenu les étudiants jusqu'au 6 juillet. Le même jour, les professeurs suspendent leur grève sans pour autant assurer les examens et les soutenances. Ils reviennent le 4 septembre pour signer les PV d'entrée, mais le directeur a posé une condition au préalable. Elle consiste à annuler la grève. Ils ont refusé. Après des négociations avec la direction et des représentants du ministère de la Culture, ils signent les PV et organisent les examens et les rattrapages mais suspendent les soutenances ». Il dira encore : « Pour notre part, nous souhaitons comme eux l'implication des ministères de la Culture et de l'Enseignement supérieur dans la gestion de l'école. Mais nous ne sommes pas d'accord à ce que des étudiants soient pris en otage à la fin de l'année. Nous soutenons l'idée d'élaborer le statut de l'enseignant-chercheur pour avancer dans la promotion de la pensée intellectuelle. Comme il est légitime de revendiquer des instances concernées par la prise en charge des problèmes socio-professionnels des enseignants. Mais il est inacceptable de tolérer les agressions verbales à l'égard des personnes. » Aujourd'hui, après avoir organisé les examens et les rattrapages, constate le même interlocuteur, « ils refusent d'assurer les soutenances. Or ils ont signé les PV de la reprise. Dans leurs revendications initiales, ils demandent l'accès au titre de maître assistant par ancienneté, alors que beaucoup parmi eux ne répondent pas aux critères requis. Pour devenir maître assistant, il faut être titulaire d'un magistère. Ils ont fini par abandonner ce point de revendication ». Concernant le point relatif au recours aux élections pour accéder à certains postes de responsabilité, il rappelle que dans les textes régissant l'école, il est stipulé que « le président du conseil pédagogique, le sous-directeur d'études et les chefs de département sont désignés par le directeur de l'établissement pour être ensuite nommés par le ministère de la Culture. Ne sont élus que les représentants des enseignants au niveau du conseil. Quant aux emplois du temps actuels, ils sont conformes à 99% aux programmes indiqués dans le statut de la création de l'école de 1985. Aussi, les professeurs grévistes dans leur majorité se sont succédé aux postes de responsabilité, président du conseil pédagogique, sous-directeur d'études entre autres. Quand ils étaient à ces postes, ils ont commis des aberrations et n'ont pas respecté les textes relatifs au statut de la création de cette école. De notre côté, nous travaillons conformément à ces textes. Il serait plus raisonnable aussi d'intégrer dans la plateforme de revendications la question ayant trait à la moralisation de la profession. » Un des responsables du ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique affirme, pour sa part, que sa tutelle n'est pas concernée par ce problème. Nous avons contacté, en vain, le ministère de la Culture pour recueillir son avis.