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L'Etat a mis à terre des familles entières Hassaïne Zemmouri. Ancien PDG de l'Enapal (produits alimentaires). Six ans et demi d'incarcération à El Harrach, dix-sept ans de quête de réparation
- La réhabilitation des cadres injustement emprisonnés passe-t-elle par un dédommagement de la période d'incarcération ? Dans un Etat qui se respecte, lorsque vous avez été injustement incarcéré et que la justice a reconnu votre innocence, l'Etat doit prendre l'initiative d'une réhabilitation, qui passe par de nouvelles fonctions au sein d'une entreprise et par un dédommagement financier qui doit comprendre tous les préjudices qui vous ont été causés. Aujourd'hui en Algérie, ce n'est pas le cas puisque vous devez entamer, pour votre dédommagement, une nouvelle procédure judiciaire auprès des tribunaux une fois votre innocence avérée. Cette justice qui proclame le droit au nom du peuple algérien doit se rendre compte des préjudices qu'elle fait subir aux familles et aux proches par ses décisions arbitraires. - Sur la base de quel article de loi la justice incarcère-t-elle les cadres ? Le code de procédure pénal, que je connais aujourd'hui par cœur, est un code arbitraire qui offre la possibilité à n'importe quel magistrat de maintenir éternellement en détention les cadres. Cela est voulu, car il n'y a pas de justice dans ce pays. Il n'y a que des règlements de comptes que la justice exécute en se faisant complice d'intérêts supérieurs. Une bonne partie des cadres emprisonnés ne l'a pas été sur une base légale. - Comment vit-on une liberté retrouvée après des années d'incarcération arbitraire ? Cela dépend de la force de caractère de chacun et de son assise familiale. Certains ne peuvent pas supporter l'opprobre du repris de justice. Je connais personnellement trois hauts cadres dirigeants qui ont sombré dans la folie une fois leur liberté retrouvée parce qu'ils n'ont pu supporter le regard des autres. C'est le pouvoir qui est responsable de cette situation. Il a mis à terre des familles entières en visant le chef de famille. Je voudrais rappeler qu'en 2005, l'ancien directeur général de la Sûreté nationale, Ali Tounsi, avait ordonné à ses services de brûler les dossiers qui avaient été «fabriqués» par leurs soins, sur la base de rapports tendancieux, qui ont justifié l'incarcération de cadres honnêtes. - Comment expliquez-vous qu'une fois sorti de prison, un cadre ne retrouve que très rarement un emploi ? Lorsque vous avez exercé des fonctions importantes au sein d'une entreprise, il est bien difficile de retrouver un emploi. L'entreprise considère soit que vous êtes surqualifié, soit que votre incarcération, alors que vous avez été blanchi par la justice, pose problème. - Quelle procédure les cadres doivent-ils enclencher pour leur indemnisation ? La plupart des cadres n'entament pas les démarches pour leur indemnisation. C'est pour cela que je pense que c'est à l'Etat de prendre l'initiative d'une telle procédure. Mais il est aujourd'hui très difficile d'évaluer le préjudice financier subi par un cadre qui a passé des années en prison.