Il n'y a pas une réelle application de la loi 01-08 de 2001. “La justice n'est pas indépendante. Elle continue de subir des pressions extra-judiciaires. Tout citoyen n'est pas à l'abri d'une incarcération injuste”, a soutenu maître Ghachir Boudjemaâ, lors du séminaire sur la dépénalisation de l'acte de gestion, organisé, hier, à l'initiative de la Confédération des cadres de la finance et de la comptabilité. Il ressort la même conclusion au cours des débats. L'intervention la plus attendue a été celle de M. Chettih, ex-PDG de Sider, incarcéré pendant plus de 40 mois suite à l'affaire Sider et réhabilité après les actions des cadres de l'entreprise, de la société civile et de la presse. Sa communication sur la réhabilitation des cadres injustement incarcérés montre que la justice a du pain sur la planche. L'actuel P-DG d'Algérie Télécom rappellera qu'il avait été emprisonné pour des actes de gestion. En particulier, on lui reprochait d'avoir confié à une société privée le transport des travailleurs et institué une prime de panier de 25 DA pour la restauration en cantine (30 DA en dehors de l'entreprise). En un mot, d'avoir profité de ces opérations. Or, l'audit réalisé par les cadres de Sider après son incarcération ainsi que les P-V du syndicat d'entreprise montrent qu'il n'y a eu aucune infraction. Il relèvera que le responsable d'entreprise ne peut être emprisonné pour faute de gestion. Car la gestion suppose la prise de risques. Les organes sociaux de l'entreprise sont les seuls habilités à apprécier la gestion du dirigeant d'entreprise. Suite aux remous liés à l'affaire de l'incarcération des cadres, il y a une avancée de la loi, dira-t-il. La loi 01-09 (de 2001) dépénalise l'acte de gestion. Les articles sur lesquels s'appuyaient les juges pour emprisonner les responsables d'entreprises publiques ont été abrogés. Mais il n'y a pas une réelle application. Par exemple, une chambre d'accusation continue de poursuivre un cadre sur la base d'anciens articles. D'autres responsables sont toujours en prison alors que d'autres ont leurs afffaires en instruction sur la base d'articles abrogés. Or, l'action en justice s'éteint à l'abrogation des articles, objets de l'affaire. M. Chettih, abordant la question de la réhabilitation des cadres incarcérés, dira que des responsables, lavés des accusations, n'ont toujours pas réintégré leurs postes qu'ils occupaient initialement. Le règlement des salaires et frais de justice pendant la période de détention pose problème. “Il n'y a pas de réhabilitation. Il y a des traces qui ne disparaîtront pas tout au long de la vie (blessure sur le plan psychologique)”. Autre tache indélébile : l'ex-premier responsable de Sider et P-DG actuel d'Algérie Télécom soulignera que même réhabilité, le cadre est l'objet de suspicion. Enfin, le président de la Confédération des finances indiquera que 6 385 cadres ont été incarcérés (à partir de 1995). En moyenne, 85% ont été par la suite relaxés ou ont bénéficié de non lieu. Reste la condamnation des organisateurs de cette véritable chasse aux sorcières. N. R.