N'ayant jamais fait l'objet d'une mise à niveau, l'administration publique algérienne est devenue un obstacle majeur à l'émergence de l'économie de marché, à la promotion de l'investissement et à l'épanouissement de la vie sociale en général. Tous les gouvernements qui se sont succédé à la tête de l'Etat en avaient pris conscience, sans toutefois, parvenir à remédier à ce fléau qui a fini par constituer, au fil des ans, un véritable péril pour le développement économique et social du pays. L'Algérie compte en effet aujourd'hui près d'un million et demi de fonctionnaires dont la tâche effective semble consister beaucoup plus à compliquer la vie des citoyens et des agents économiques qu'à les assister dans l'accomplissement de procédures administratives incontournables. On s'étonne en permanence de voir à quel point la société algérienne est sous l'emprise de comportements bureaucratiques visant à dresser constamment des barrières pour bloquer plutôt qu'à faciliter les initiatives des citoyens. Ce ne sont pas les textes de lois et règlements qui seraient à l'origine de cette dérive bureaucratique, entend-on souvent de la part des gouvernants et responsables d'institutions administratives, mais leurs mauvaises applications par des fonctionnaires très mal formés en matière de droit et management. Mais nous demeurons convaincus que de nombreux problèmes d'application auraient facilement pu être évités si les décideurs prenaient des mesures moins ambiguës et avaient conçu des procédures capables de protéger les lois édictées contre les mauvaises interprétations et les applications tendancieuses. Une réforme administrative visant à relever le niveau de connaissance des fonctionnaires concernés et à clarifier les procédures s'avère de ce fait indispensable si on ne veut pas que nos administrations perdent de vue leur devoir de servir l'intérêt général et deviennent, comme c'est malheureusement aujourd'hui le cas, de redoutables machines à entraver le changement et à décourager l'initiative. Des prédateurs au sein de l'administration Faute de mise en œuvre de cette réforme, à laquelle s'était pourtant attelée dès 1999 une commission placée sous l'autorité du chef de l'Etat, les différents rouages de l'administration algérienne ont fini par devenir des prédateurs d'initiatives plutôt que des accompagnateurs comme la législation leur indiquait pourtant de l'être. En grande partie, c'est ce qui explique que des milliers de projets retenus par les agences nationales et locales de promotion d'investissement (Calpi et ANDI) depuis de longues années n'arrivent pas à se concrétiser par la faute de cette bureaucratie tatillonne. Le respect des procédures doit primer, quand bien même le pays serait en proie à de graves difficultés de croissance et d'emploi. L'incertitude et les tracasseries administratives s'accommodant mal avec la promotion de l'investissement, bon nombre d'opérateurs économiques, notamment étrangers, sont évidemment partis fructifier leurs capitaux sous d'autres cieux, privant le pays d'importants leviers de croissance et de développement social. En raison des graves dysfonctionnements qu'elle a fait subir à la société en général et à l'économie en particulier, l'administration algérienne doit impérativement être réformée et le plus tôt serait le mieux, l'enjeu étant de hisser l'efficacité de nos fonctionnaires à un niveau acceptable. Si le principe d'une réforme administrative est aujourd'hui admis par les plus hautes autorités politiques du pays, on reste toutefois aujourd'hui encore dans l'ignorance des actions à mener en priorité pour débureaucratiser au maximum les prestations fournies par les administrations et les services publics. Le défi majeur consiste à émettre dès à présent des idées constructives à même d'aider nos administrations à avoir une vision plus rationnelle en y injectant, notamment un management global de qualité capable de mobiliser efficacement les ressources collectives. Des procédures inutiles à éliminer Le projet est si important qu'il ne peut évidemment faire l'économie d'un débat auquel prendraient part les principaux acteurs sociaux et, bien entendu, les promoteurs intéressés au premier chef par une réforme susceptible de stimuler leurs affaires. Mais on peut déjà évoquer quelques pistes de travail qui pourraient être prises en considération dans le cadre de ce projet de mise à niveau. Partant du principe que moins un pays a de bureaucrates mieux il se porte, l'action fondamentale à entreprendre consiste à faire l'inventaire des procédures en vigueur dans chacune des administrations concernées, le but étant d'éliminer toutes celles qui seraient inutiles ou superfétatoires (pièces d'état civil quand on dispose d'une carte nationale d'identité, casier judiciaire, recours excessif aux notaires etc.). Bien d'autres actions de nature à huiler les rouages de l'administration pourraient être entreprises pour, à la fois, simplifier la vie des citoyens et dynamiser l'activité économique et sociale. Il s'agit, entre autres, de la formation du personnel des administrations dans le sens d'une spécialisation par activité, de l'obligation d'informer le public par voie d'affichage des procédures en vigueur et des délais requis pour chacune des prestations fournies et de l'imposition d'un contrat de performance à l'ensemble des responsables d'institutions administratives. La mise à niveau des administrations publiques constitue à l'évidence une garantie pour la réussite des réformes économiques et sociales qui restent à accomplir et pour la qualité de la conduite des missions du service public qui leurs sont dévolues. Les faibles performances de l'administration publique algérienne sont en effet, à bien des égards, dues au fait qu'elle n'ait jamais bénéficié d'une mise à niveau de ses moyens et méthodes de travail. L'administration est restée archaïque et peu performante. Les collectivités locales en sont de parfaits exemples.
D. F. : Post-graduante en management /Université de Tizi Ouzou