Une fois n'est pas coutume, les réunions de printemps du Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM), tenues du 15 au 17 avril à Washington, ont été dominées cette année par l'actualité dans les pays arabes. Les institutions de Bretton Woods s'inquiètent des conséquences du «printemps arabe» sur l'économie mondiale à court et moyen terme. Le président de la Banque mondiale Robert Zoellick a notamment prévenu qu'il y avait dans les pays arabes le potentiel de déstabiliser l'économie de la planète. «Une aggravation des conditions au Moyen-Orient et en Afrique du Nord pourrait faire dérailler la croissance mondiale», a prévenu la BM devant le Comité monétaire et financier international (CMFI), instance de 24 pays chargée de définir les grandes orientations politiques du Fonds monétaire international (FMI). La Banque a toutefois estimé que les «perturbations économiques directement liées aux bouleversements politiques» dans le monde arabe, si elles en restaient au stade actuel, «devraient avoir des répercussions limitées au niveau mondial». Il en va de même, selon elle, du séisme, du tsunami et de l'accident nucléaire au Japon. Selon la Banque mondiale, les révolutions en Tunisie et en Egypte ont amputé la croissance de ces deux pays d'environ trois points en 2011, par rapport à ce qui était prévu il y a trois mois. «La croissance en Egypte et en Tunisie devrait donc être d'environ 2,5% et 1,5% respectivement», indique-t-elle. Par ailleurs, «si les prix du pétrole devaient augmenter fortement et durablement, que ce soit à cause d'incertitudes croissantes ou d'une perturbation significative de la production pétrolière, la croissance mondiale pourrait ralentir de 0,3 point de pourcentage en 2011 et de 1,2 point en 2012», a-t-elle prévenu. La Banque mondiale a rappelé que la volatilité des prix du pétrole et des produits agricoles avait été «encore plus forte» que d'ordinaire ces dernières semaines. Pour prévenir les risques d'aggravation, les 187 Etats membres du FMI ont chargé l'institution de « veiller » sur les économies arabes, qui souffrent aujourd'hui des retombées des révoltes populaires. Le CMFI a estimé que «les répercussions économiques immédiates des événements tragiques au Japon et des développements dans certains pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord demandent (...) une attention particulière». Le FMI a d'ailleurs été chargé jeudi «d'une évaluation économique» en vue d'un «plan d'action commun» de cinq institutions internationales d'aide au développement pour la région Afrique du Nord, Proche et Moyen-Orient. D'après ses projections, les pays arabes importateurs de pétrole devraient afficher en 2011 une croissance autour de 2%, très insuffisante par rapport à leur croissance démographique, dans un contexte de prix de l'énergie et de l'alimentation élevés. «Certaines sources de revenus, le tourisme par exemple, pourraient être moins élevées qu'elles ne l'étaient l'année dernière», a souligné le directeur général de l'institution Dominique Strauss-Kahn, en ajoutant que le fonds se tient «prêts à aider, sur le versant de l'assistance technique, et sur le versant du financement». Il a dans ce cadre insisté sur la nécessité de partager plus équitablement les fruits de la croissance économique. «L'exemple du Moyen-Orient a mis en lumière cette question, le fait que vous pouvez avoir de bons chiffres au niveau de la croissance sans viabilité», a-t-il souligné. De son côté, le secrétaire au Trésor américain Timothy Geithner a indiqué dans sa déclaration qu'«aujourd'hui, le changement en cours au Moyen-Orient appelle à repenser et réorienter l'engagement de la communauté internationale. Ces transitions concernent au final les gens: accroître leurs chances et leur liberté».