La contagion a fini par gagner l'économie réelle. Il n'y a plus de doute, la crise financière prend la forme d'un malaise social qui commence à se manifester dans les économies les plus vulnérables de la planète. Après les mises en garde de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le tour est venu pour la Banque mondiale (BM) de prendre la parole. A la veille des réunions de printemps de la BM et du FMI, son président, Robert Zoellick, plaide pour « une nouvelle politique alimentaire pour faire face à la hausse des prix en Afrique ». Celle-ci fait partie du nouveau deal pour une politique alimentaire mondiale à laquelle l'institution de Bretton Woods veut rallier les ministres des Finances et les membres des délégations de ses 185 pays membres. Ce sera ainsi une des problématiques fortes des réunions des 12 et 13 avril prochain. L'objectif de cette nouvelle politique est de « lutter contre la faim dans le monde au moyen d'une combinaison d'aide d'urgence et d'efforts à long terme pour accroître la productivité agricole des pays en développement », soutenait le premier responsable de la BM lors d'un discours prononcé le 2 avril. Pour parer à l'urgence, le président de la Banque mondiale appelle les pays développés à débloquer une aide de 500 millions de dollars US. « Le programme alimentaire mondial des Nations unies a besoin d'au moins 500 millions de dollars de denrées alimentaires supplémentaires pour répondre aux appels d'urgence », a précisé Robert Zoellick en s'adressant, spécifiquement aux Etats-Unis, à l'Union européenne, au Japon et à d'autres pays de l'OCDE. D'après de récentes enquêtes, 33 pays du monde entier sont en proie à des troubles sociaux suite à la flambée des prix des aliments et de l'énergie. « Dans ces pays, souligne la Banque mondiale, où l'alimentation représente entre la moitié et les trois quarts de la consommation, il n'y a pas de marge de survie. » A plus long terme, le regard de la BM s'oriente vers les fonds souverains. Le timing n'est pas innocent. A quelques jours des réunions printanières, ces institutions veulent prendre à témoin l'opinion internationale sur le rôle que peut avoir la transformation des pétrodollars. Le plan de M. Zoellick veut amener les fonds souverains à consentir 1% de leurs actifs dans le développement en Afrique. En valeur, cela représente 30 milliards de dollars US sur des actifs s'élevant à 3000 milliards USD. Face au dérèglement de l'économie mondiale, la BM veut explorer la voie du commerce équitable. Ainsi, rémunérer les agriculteurs à la juste valeur de leurs efforts et tenter une redistribution plus conforme à la structure des coûts que subit l'ensemble de la chaîne du commerce mondiale. Aujourd'hui, les effets spéculatifs prennent le dessus. « Les prix des denrées alimentaires se sont envolés parallèlement à l'effondrement des marchés des capitaux », a fait observer Robert Zoellick.