Situé à quelques encablures de la commune de Ouled Driss, un hameau appelé communément mechta Bit el mel donne l'impression de sortir d'une page d'histoire ou de faire partie du décor d'un film retraçant des événements d'après-guerre. Les cinquante familles qui y vivent parlent encore avec fierté de ce lieu de transit pendant la guerre de libération, mais aussi d'enclavement du manque de moyens de transport, d'arrogance de la part des élus locaux qui se sont succédé à la tête de la commune de Ouled Driss et de « misère chronique ». Ces habitants vivent toujours dans de précaires maisons en terre et utilisent les animaux pour le transport des malades et ne parlent des commodités existantes dans d'autres agglomérations, le gaz et l'électricité entre autres, que pour exprimer l'inaccessible. Quelques-uns parmi les hommes en âge de travailler doivent quotidiennement quitter leur hameau à destination de Ouled Driss ou Souk Ahras où ils sont employés comme journaliers, notamment dans le secteur du bâtiment. Les moins jeunes se contentent du petit élevage ou la culture de quelques lopins de terre. Leur rêve d'occuper un poste permanent s'estompe chaque jour un peu plus dans une région où le taux de chômage demeure des plus élevés et où l'investissement se fait toujours attendre. Le relief accidenté de Mechta bit el mel rend encore la vie plus dure aux habitants de ce hameau où le nombre d'écoliers se compte sur les doigts d'une seule main et où nombre de femmes ont accouché sans assistance médicale. Ses sentiers inaccessibles, devant l'absence d'une route ou d'une piste, donnent à un hypothétique visiteur l'impression d'être perdu au milieu d'un labyrinthe de broussailles et de chemins escarpés. Pis, la terre argileuse devient une véritable patinoire dans les premières pluies d'hiver, perturbant ainsi le mouvement de ces habitants vers et depuis les hameaux voisins pour s'approvisionner en eau potable. « L'unique établissement scolaire situé à El Gueria est distant d'environ 6 km... », nous déclare, pessimiste, un quinquagénaire qui, après avoir énuméré toutes ces contraintes, reproche aux responsables de sa commune un manque d'engagement et des réactions sélectives, pour renchérir ensuite, résigné, « ... Ici, on perd très tôt l'envie de lire et d'écrire ». Allusion faite à l'inexistence des moyens de transport et à l'enclavement de la région. Un hameau qui porte mal son nom.