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Bâle II et les banques algériennes
Publié dans El Watan le 26 - 12 - 2005

Bâle I s'est fait sans nous, Bâle II se fait encore sans nous, mais Bâle III, en 2012, se fera très certainement pour nous.
A cet horizon temporel, l'Algérie sera peuplée de grands groupes bancaires qui seront, comme ils l'ont été jusqu'à présent, partie prenante dans les consultations que le régulateur mondial, qu'est le Comité de Bâle, ne manquera pas de lancer pour recueillir et peaufiner son approche prudentielle dont le ratio le plus significatif à cette date de 2012 se fondera très certainement (c'est ce qui se mijote) sur un taux de rentabilité financière (ROE) supérieur à 15% qui sera la mesure de survie ou de liquidation d'une banque. Mais d'ici là, le ratio de solvabilité aura vécu. Bâle I, ou ce que tout le monde désigne par « ratio Cooke » et sa transposition en Algérie dans une formule adaptée à notre contexte, a permis à nos banques publiques de se mouvoir dans l'environnement international et de s'inscrire dans ce qui se fait de mieux en matière de réglementation prudentielle. Simple dans son énoncé mais compliqué dans son calcul en raison de beaucoup d'incompréhensions de la part de nos banques, le ratio actuel de solvabilité considère toutes les contreparties sur un pied d'égalité. Ce qui signifie qu'une grande entreprise, ou ce qu'on appelle dans le jargon spécialisé un « grand compte », est affectée du même statut en termes de risques qu'une petite entreprise de dix ou vingt personnes ou même le commerçant du coin. Le traitement est fondé sur la nature de la contrepartie et non sur la qualité, ce qui conduit évidemment à des aberrations. Et c'est un peu le sens des reproches adressés par beaucoup d'opérateurs aux banques. Dans Bâle I, les banques sont encadrées par une réglementation qui ne leur permet pas de développer une gestion à la marge. La pondération des risques de contrepartie est dictée par le régulateur. Et c'est précisément là où Bâle 2 innove dans la mesure où le dispositif adopté permet aux banques d'affecter à chaque risque une pondération qui tient compte de la qualité de la relation et non plus de la nature (Etat, banque, particulier, entreprise) de cette relation. Cette nouvelle procédure suppose que les banques après une quinzaine d'années d'application de Bâle I sont arrivées à développer un système d'information performant avec des outils d'analyse pertinents pour l'évaluation de leur portefeuille crédit. Ce qui, tout le monde en convient, est loin d'être le cas. L'objectif de Bâle I devait conduire les banques à maîtriser le coût en fonds propres des risques qu'ils gèrent au quotidien. C'est donc une réglementation à base de ratios (ratio de solvabilité, ratio de grands risques ou division des risques...), c'est-dire une réglementation quantitative. Chemin faisant, on s'est aperçu que les ratios à eux seuls ne suffisaient pas à contenir l'appétit des banques à vouloir trop s'engager. Le régulateur mondial suivi en cela par tous les régulateurs nationaux ont mis en œuvre un contrôle qualitatif qui complète le contrôle quantitatif, c'est toute la problématique du contrôle interne, compris comme processus et non comme fonction, qui est venu au secours de Bâle I, qui en cinq ans d'application a tout de suite montré ses limites. Cela a commencé en 1995 par l'adéquation des fonds propres en ajoutant au dénominateur du ratio de solvabilité en plus des risques de crédit, les risques de marché pour les banques qui ont une activité de marché (risques de taux, risques de change...). Les scandales retentissants de la première moitié des années quatre vingt dix (l'affaire de la banque Baring's) ont ainsi accéléré le processus d'adéquation des fonds propres. Les fameux vingt cinq principes pour un contrôle efficace diffusés par le comité de Bâle en 1995 ont fait le tour du monde et tous les pays les ont transposés dans leur législation interne, y compris l'Algérie en 2002. Mais tout cela était considéré par les experts de Bâle comme du replâtrage et il fallait passer à une étape supérieure dans l'affinement de la réglementation prudentielle pour pouvoir consolider et conforter le système financier mondial. Ce qui a donné naissance en 1998 à une réflexion sur ce qui a été appelé le nouveau ratio international de solvabilité ou « ratio Mc Donought », du nom du président du comité de Bâle. Le processus de consultation s'est mis en branle durant cinq ans, et en juin 2004 est né Bâle II qui entrera en application progressivement à partir de janvier 2006 et sera généralisée à toutes les banques internationales dans toute sa complexité en 2007. Il est évident que tel qu'il est décliné dans toutes ses composantes, le nouveau ratio de solvabilité ne sera applicable par les banques d'un pays donné que si la réglementation bancaire interne le restitue. Le problème qui va se poser ou qui se pose pour nombre de pays est qu'est-ce qu'il faut prendre de Bâle II, comment le prendre et surtout comment l'appliquer parce qu'il demande une sacrée préparation et surtout un niveau de compréhension élevé à moins de rester uniquement dans l'approche standard du risque de crédit qui est la méthode la plus simple préconisée dans Bâle I mais améliorée pour les pondérations. Des trois piliers sur lesquels s'articule Bâle II, le pilier 1 à lui tout seul est tout un programme en ce sens où il met en scénario pour le dénominateur trois catégories de risques (risque de crédit, risque de marché et risque opérationnel) qui ont chacun une charge en fonds propres spécifique et qu'il va falloir quantifier et calculer. En l'absence en l'état actuel d'agences de notations pour donner un rating aux contrepartie, en l'absence d'outils d'évaluation performants dans nos banques à l'exception des filiales des groupes bancaires étrangers implantées en Algérie qui s'appuient sur l'instrumentation développée par leurs groupes, la tâche sera ardue pour le régulateur pour organiser le passage de Bâle I à Bâle II.

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