La chanson raï est une chanson de la masse par excellence. Pour preuve, la deuxième soirée du Festival du raï s'est déroulée à guichets fermés. Dimanche soir, les retardataires se sont vu refuser l'accès au stade des Trois Frères Amarouche faute de places. «J'ai fait le pied de grue durant une heure devant la porte du stade, sans pouvoir accéder à l'intérieur», regrette Kamel, jeune étudiant, qui tenait, coûte que coûte, à assister au concert de Houari Dauphin. La chanson raï est aussi une chanson de mélomanes noctambules, puisque la soirée s'est prolongée, sous un crachin d'été, jusqu'à 3h du matin. Les organisateurs du festival, qui ont supprimé la billetterie cette année, ne s'attendaient certainement pas à un tel engouement de la part d'un public jeune et moins jeune. Moins d'une heure après le début de la soirée, on comptait déjà près de 10000 spectateurs dans des gradins transformés, pour la circonstance, en une immense salle des fêtes. La cadence s'accélère, les balancements timides cèdent vite la place à des déhanchements cadencés, séducteurs. Le spectacle est total. Comme attendu, la seconde soirée a entamé son baroud de transe sur des chapeaux de roues avec au programme neuf chanteurs, aux origines différentes et aux registres multiples. Cheb Anouar, Houari Dauphin, Cheb Akil et Kader Japonais ont été incontestablement les vedettes de cette soirée bien plus fraîche que la précédente. Cheb Allam, qui a donné le coup d'envoi de cette veillée musicale, a choisi de revisiter un répertoire typiquement bélabésien, cher à feu Ahmed Zergui. Il reprendra ainsi ses anciens tubes tels que Ya hbabi ana dâat (mes amis je suis perdu), sayi glebt l'vista (ça y est, j'ai retourné ma veste). Ch'ir el melhoun De son côté, Mohamed El Abassi, qui a été instantanément adopté par le public, a convié l'assistance à une balade tout en mélodie à travers les quartiers du Petit Paris d'antan. Tout en interprétant Meriem, chanson au verbe posé, signé par le parolier Guatter Mahieddine, il profita de l'occasion pour évoquer les grands noms du chant bedouin comme Mestfa Ben Brahim, cheikh Abdelmoula et cheikh El Madani. Interprétant plusieurs chansons à succès, Cheb Bousmaha Mohamed, admis au concours jeunes talents, et une fois débarrassé de son trac, a fait vibrer les gradins. Cheb Anouar, qui ne s'était pas produitlors de la première soirée alors qu'il était programmé, a su faire un amalgame subtil entre les genres raï et maghrabi avec welli ya welli, une belle reprise de Hadja Hmadaouia. Avec Tahya harraga mena l'malaga (que vivent les harraga d'ici jusqu'à Malaga, Houari Dauphin change de cap et s'installe dans une parfaite symbiose avec un public venu, essentiellement, pour danser. Enfin, cheb Kader Japonais et Akil ont su, lors de leur passage, donner le meilleur d'eux pour susciter l'adhésion du public qui les a fortement ovationnés.