Le vernissage a été étrenné jeudi soir à la galerie Zino Kebilène à Cherchell. Une rétrospective en l'honneur du grand plasticien Noureddine Chegrane. En dépit de sa simplicité, il n'en demeure pas moins que la dimension de ce geste culturel avait été énorme, pour ceux qui étaient présents lors du vernissage. Un débat sur les 18 œuvres s'est installé spontanément et d'une manière sympathique. L'écrivain Sari Mohamed, venu d'Alger, le sculpteur sur pierre Boutrif Lounis, venu de Hadjret Ennous, l'artiste-peintre Bakhti Aberrahmane, de Sidi Moussa (Tipasa) et Salah Hioun, l'artiste peintre dont la notoriété a dépassé les frontières algériennes, étaient là en cette soirée ramadhanesque à Cherchell pour provoquer, faire sortir l'artiste peintre Chegrane Noureddine de sa tanière et le faire parler. Une collection de pastels : 18 dessins qui s'articulaient autour d'un aggloméré en forme de bâtonnets. Chegrane Noureddine faisait dominer deux couleurs, le jaune et le bleu dans ses aquarelles. L'artiste peintre a d'emblée plongé dans son univers ses visiteurs à travers ses œuvres qui exprimaient, selon ses propos, ses visions personnelles. D'ailleurs, si certaines œuvres ne portent pas de titres, ce n'est qu'une volonté affichée par l'artiste peintre, afin de laisser le libre choix aux visiteurs de trouver le titre de l'œuvre exposée. «Je suis dans le symbole et le signe, déclare-t-il. Cela se voit dans mon exposition qu'il y a un mélange entre le signe et le symbole, ajoute-t-il, j'essaye de composer des dessins et des paysages avec des lettres berbères. Ce qui m'intéresse dans une galerie, c'est d'abord l'œuvre, les thèmes peuvent effectivement changer, et ce qui m'importe c'est la vision et l'interprétation de mon œuvre par le visiteur», enchaîne-t-il. Empreintes L'artiste peintre insiste sur la beauté de l'art : «Il faut qu'il soit attrayant, séduisant, même s'il exprime la douleur, la tristesse». Il exprime son travail artistique selon son propre regard, à l'état brut.Au bout de 35 années de peinture, l'artiste peintre reconnaît qu'il est passé par plusieurs étapes et naturellement par des styles différents. Il peut entamer une œuvre par un thème, mais qui, au fil des minutes qu'il passe devant son œuvre, l'artiste peintre produit une autre vision à lui. Chegrane Noureddine s'est étalé dans ses interventions dans les explications et les interprétations dans chacune de ses œuvres, suscitant parfois les interrogations et les questions. «L'œuvre d'un artiste peintre doit interpeller», dira Bakhti Abderrahmane. «L'artiste peintre devra avoir quand même son emprunte quand on se met face son œuvre», réplique Sari Mohamed. «Une peinture est d'abord une interrogation pour le visiteur», explique Salah Hioun. Bien entendu, l'artiste peintre algérien Chegrane Noureddine, né à Rabat (Maroc) le 26 mai 1942, a rétorqué par des exemples. Il a terminé sa longue intervention sur la situation actuelle de l'art algérien dans le domaine de l'art plastique, portant un doigt accusateur vers ces bureaucrates qui ont pris en otage la peinture algérienne : «Il s'agit d'un patrimoine algérien qui doit être défendu par les artistes peintres créateurs des œuvres, quand l'Algérie participe à des manifestations culturelles à l'étranger et non pas par des personnes qui n'ont aucun lien avec les œuvres exposées dans les pays étrangers.» La petite galerie de Kebilène venait d'abriter un débat culturel instructif. Il est déjà 1h. Il était temps de se quitter. Les tableaux de Chegrane sont exposés jusqu'au 3 septembre 2011.