Le coordinateur du Mouvement touareg pour la Libye a dénoncé les exactions dont font l'objet les Touareg libyens de la part des pro-Gueddafi et des rebelles. Certains se sont agglutinés non loin de la frontière algérienne, alors qu'une soixantaine de familles ont pu entrer à Djanet Dans un communiqué rendu public hier, le coordinateur du Mouvement touareg pour la Libye, Ishaq Ag Al Husseyni, fait état «de chasse aux Touareg et d'exécutions» par les rebelles au lendemain de la prise de Tripoli, qui ont suscité «des fuites collectives vers la frontière algérienne». Selon le signataire, le Sud libyen, «connu comme étant le territoire touareg, n'abrite pour ainsi dire plus aucun Touareg à l'heure actuelle. Ils ont tous été chassés manu militari. Un génocide qui doit cesser et l'opinion internationale doit contribuer activement à sa fin». Ishaq Ag Husseyni affirme que «depuis mercredi, les pro-Guedhafi se sont, à leur tour, donné à des exactions contre les Touareg au motif qu'ils auraient décidé de se ranger du côté du Conseil national de transition. Depuis, tous les Touareg du Sud libyen ont fui vers les localités algériennes de Tarat et de Tinalkom, à 150 km de Djanet. Les insurgés et les pro- Guedhafi ne font plus la différence entre un Touareg libyen et un autre des pays limitrophes». Ils semblent décidés à les mettre «hors de la Libye», lit-on dans le communiqué du coordinateur. Or, précise ce dernier, «les 600 000 Touareg libyens n'ont pas l'intention de se sacrifier, de quitter leur nation et de se retrouver exilés au motif qu'ils auraient, dans un premier temps, soutenu un camp et dans un second temps l'autre camp». Le coordinateur a appelé à «la cessation immédiate de ces exactions pour l'intérêt et pour la cohésion de toute la Libye». Colonnes entières Selon lui, la Libye de demain aura besoin de toutes ses forces vives pour se reconstruire et «pour ne pas laisser une porte ouverte au chaos, à la guerre civile et à la mise sous tutelle étrangère». Il rappelle que les participants à la conférence d'Alger sur la sécurité et le développement dans le Sahel doivent féliciter l'Algérie pour avoir accueilli les réfugiés touareg et l'encourager à ouvrir davantage ses frontières pour les nouveaux et ce, jusqu'à ce qu'une solution durable soit trouvée. Ces parties ne doivent pas abandonner les nombreuses familles qui appellent au secours «au prétexte qu'elles représentaient une source d'insécurité et d'instabilité dans la sous-région, du seul fait qu'elles reviennent de la Libye, fuyant les atrocités et autres crimes dont elles font l'objet». La coordination a par ailleurs «regretté le silence préoccupant de la France sur ce sujet, elle qui a œuvré pour la libération de la Libye et qui a toujours eu et entretenu des liens étroits avec le peuple touareg». Cette déclaration poignante et alarmante intervient au moment où des colonnes entières de Touareg quittent la Libye en direction de la frontière algérienne. Un important groupe, dont des femmes et des enfants, ayant fui la région de Oubari, a été signalé au village de Tarat, non loin de la frontière avec Illizi. «Elles sont dans le dénuement le plus total, vivant une situation des plus dramatiques. Privées de tout, sans aucun soutien, elles ne peuvent ni rebrousser chemin, de peur de subir des représailles, ni avancer vers l'Algérie, qui a refusé de les accueillir…», déclare notre interlocuteur. Maisons brûlées Il cite d'autres personnes, installées à Tinalkom, à près de 150 km de Djanet, sur le territoire libyen et qui souffrent le martyre, en ces temps où la température ne descend que rarement sous les 40 °C. «Bon nombre de ces fuyards étaient soupçonnés par les hommes d'El Gueddafi, d'être proches des rebelles. Situées dans la zone de Gatte, leurs maisons ont été brûlés et leurs jardins dévastés et tous leurs biens pillés. D'autres, qui avaient adopté une position de neutralité vis-à-vis de la rébellion, ont subi le même sort. Les hommes d'El Gueddafi les ont sévèrement châtiés à Sabha, Oubari, Tahalat et Ghat, et parmi eux, il y a eu de nombreux morts et blessés. Quelques-uns ont pu rejoindre Djanet et sont actuellement en Algérie, loin de tous les regards et sans aucun soutien humanitaire», note un autre membre du Mouvement. Selon lui, la situation devient inquiétante, d'autant que l'Algérie n'ouvre ses portes qu'a quelques Touareg. «Des régions entières ont été vidées de leurs habitants. C'est le cas de Ghadamès, Diridj, Mazda et Sinewen abandonnées par leur population après qu'une trentaine de personnes eurent été exécutées par des hommes armés. Un drame humanitaire que l'Occident, notamment les pays engagés auprès des rebelles libyens, ne veut pas voir.»