Normalement, un accord tripartite (les deux Etats et le HCR) est toujours négocié et agréé par l'ensemble des parties. Le passage de la frontière fait parties des modalités pratiques et logistiques qui en sont partie intégrante», cette réponse de Kamel Deriche, Team Leader (chef des opérations) du HCR pour le gouvernorat de Tataouine (Tunisie) où il est depuis plusieurs semaines en mission d'urgence, à la question de savoir si la fermeture par l'Algérie de ses frontières extrême-sud avec la Libye pouvait compromettre le retour, sous l'assistance de son organisation (HCR) de réfugiés bloqués en Libye, suscite une autre interrogation : notre pays serait-il en pourparlers, de quelque nature qu'ils soient, avec les autorités de transition libyennes bien qu'il ne les ait toujours pas reconnues ? A moins que ces négociations n'aient été engagées avant la chute du régime d'El Gueddafi. Toutefois, le responsable onusien qui devrait retrouver dans quelques jours la capitale jordanienne Amman où il s'occupe du Hub d'appui pour le programme du HCR en Irak, ajoutera que «si le HCR devait s'engager dans un programme de retour volontaire, il est naturel qu'il se réalise en total accord avec les pays d'asile et d'origine». Il a, par ailleurs, souligné que le nombre de réfugiés libyens a considérablement baissé avec des retours observés juste avant le Ramadhan sur les régions des montagnes de Nafoussa. «Beaucoup de familles ont préféré passer ce mois sacré auprès des leurs et retrouver leurs foyers. Le mouvement de retour s'est accéléré à la veille de la célébration de l'Aïd, les familles ont souhaité retourner chez elles et célébrer la fête avec leurs communautés», a-t-il relevé. Pour appuyer ses dires, il fera savoir que sur les quelque 10 000 familles libyennes enregistrées en mai 2011 (environ 55 000 personnes), seules près de 3000 familles demeurent encore en Tunisie. «Une mise à jour du recensement est actuellement menée par nos services. Pour les familles restantes, nous continuons à leur délivrer une assistance humanitaire», précise notre interlocuteur tout en insistant sur les difficultés auxquelles se heurtent les représentants du HCR dans l'accomplissement de leur mission humanitaire : «La sécurité en Libye n'est pas encore établie et certains services essentiels tels que l'eau, l'électricité, la disponibilité de produits alimentaires, le carburant font encore cruellement défaut.» A ce titre, et toujours selon M. Deriche, outre une possible prise en charge progressive par les diverses agences de développement ainsi que par les instances libyennes elles-mêmes, un programme devant accompagner les populations rapatriées ou déplacées jusqu'à une stabilisation de la situation est développé par l'équipe déployée sur la Libye par le HCR. S'agissant de la traque et les exactions par les populations et les rebelles libyens dont sont victimes des milliers de migrants subsahariens, le représentant du HCR les a reconnues et confirmées en affirmant : «Ce problème réel a été effectivement tristement vécu par un grand nombre de populations qui souffrent de la confusion entre la présence effective de mercenaires et des populations migrantes ou réfugiées qui se sont retrouvées sans véritable protection.» C'est pourquoi, il lance un appel à l'adresse de la communauté internationale à l'effet de rester très vigilante sur la situation humanitaire de ces populations. «La nécessité d'insister sur le respect du droit international et les droits de l'homme en Libye demeure de toute actualité», insistera-t-il et fera savoir que «certains rapports indiquent que la moitié des détenus incarcérés dans des prisons en Libye seraient des Africains subsahariens. Des Libyens noirs ont été pris également pour cibles du fait de leur couleur.» Et, dans un style propre à la communication diplomatique auquel l'ont initié ses 23 années d'expérience managériale dans l'action humanitaire et plus d'une vingtaine d'opérations d'urgence qu'il a dirigées dans le monde, M. Deriche s'est gardé de commenter l'accueil par l'Algérie des proches d'El Gueddafi et de dire si le HCR pouvait leur reconnaître le statut de réfugiés et de là, leur assurer une protection. Il se contentera d'affirmer : «Toute personne a le droit de demander l'asile si elle se sent persécutée. Les considérations humanitaires sont nombreuses et peuvent certainement être établies.»