En déplacement en Arménie vendredi, le président français, Nicolas Sarkozy, pensait marquer un point important en remettant sur le tapis l'événement historique du massacre arménien par l'empire ottoman au début du XXe siècle. Lyon De notre correspondant En conseillant au régime turc de reconnaître le génocide arménien, il s'agissait, pour Nicolas Sarkozy, en mal dans les sondages pour la présidentielle 2012, de tendre la perche à la communauté d'origine arménienne estimée à 500 000 personnes. Le président français a déclaré que la France modifierait sa législation pour que le négationnisme du génocide de 1915 soit condamné au pénal, si la Turquie ne reconnaissait pas officiellement le massacre de plus d'un million et demi d'Arméniens. «1915-2011, il me semble que pour la réflexion c'est suffisant», a expliqué Nicolas Sarkozy lors d'une conférence de presse avec son homologue arménien Serge Sarkissian. Côté turc, la réaction ne s'est pas fait attendre. Le ministre Ahmet Davutoglu a conseillé vendredi à la France d'«affronter son passé». Il aurait pu ajouter qu'un délai entre 1830 et 1962, pour la réflexion sur le massacre colonial est suffisant. Il a en tout cas sous-entendu le passé colonial, et particulièrement le passé colonial en Algérie qui, historiquement, rappelle des souvenirs cinglants aux Turcs eux-mêmes qui étaient la puissance dominante dans l'Algérie de 1830 lors du débarquement colonial. Ils étaient aux premières loges de la souffrance, eux qui ont été rejetés vers la mer sans plus de précaution. Le ministre turc des Affaires étrangères a également insisté sur la situation des étrangers, considérés comme des «citoyens de seconde zone» dans l'Hexagone, selon lui. Il n'en fallait pas moins pour que des journalistes interrogent le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, présent vendredi à Ankara pour la signature d'un accord de coopération sécuritaire. Ils lui ont demandé quelle serait la réaction de la France si la Turquie lui demandait de reconnaître «le génocide des Algériens». Le ministre a répondu que le «président de la République française est allé en Algérie, il a eu des propos extrêmement forts sur ce moment douloureux de notre passé entre l'Algérie et la France. Il a tourné la page». Depuis quand décide-t-on unilatéralement que la page a été tournée ?