L'aménagement d'un cimetière est un acte urbanistique comme un autre. L'extension du cimetière de Zef-Zef n'a pas eu lieu à cause de l'appétit vorace de certains. Cinquante ans après l'Indépendance, on a fini par rouvrir El Kobbia, l'ancien cimetière de la ville car celui de Zef-Zef, saturé déjà depuis des années, a fini par afficher complet. Ainsi, les Skikdis sont frappés par la fatalité et par l'inertie des responsables et autres élus, beaucoup plus portés sur les «maquillages», les jets d'eau et les trottoirs. Plusieurs citoyens se sont rapprochés de nos bureaux pour exprimer leur «rancœur» et signaler qu'ils ont été contraints d'inhumer leurs proches dans le carré réservé aux tirailleurs sénégalais, enterrés durant l'ère coloniale. «C'est une honte pour Skikda et les Skikdis», déplorent nos interlocuteurs. «Même si, d'un point de vue religieux, la chose reste faisable car les Sénégalais enterrés à El Kobbia étaient des musulmans, on ne comprend pas le fait qu'aucun responsable n'ait daigné tirer la sonnette d'alarme, bien avant, pour trouver une solution et nous éviter de telles situations», s'indigne un autre citoyen, qui ajoute: «les Skikdis passent leur vie à attendre un logement, que beaucoup n'auront jamais, et voilà que maintenant ils apprennent qu'ils craignent de ne pas trouver un trou à leur dépouille.» D'autres citoyens parlent d'enterrements dans des tombes de personnes enregistrées sous X. Nous apprenons, par ailleurs, que, voulant certainement éviter tout amalgame, certains préfèrent, dans le strict respect des préceptes de notre religion, enterrer leurs proches dans d'anciennes tombes familiales. La population locale est aujourd'hui devant un fait accompli, et dire qu'une solution aurait pu être trouvée il y a des années, car la saturation du cimetière de Zef-Zef n'est pas si récente. En 2004 déjà, Dhili Karim, l'ancien maire de Skikda, avait initié une réflexion à ce sujet et a même entamé des démarches visant, soit à «empiéter» légalement, sur les terres jouxtant le cimetière se trouvant sous la juridiction administrative de la commune d'El Hadaïek, soit opter pour un nouveau terrain. Les péripéties politiques de l'époque et moult entraves l'en avaient dissuadé. Actuellement, l'équipe aux commandes de l'Hôtel de ville tente timidement d'évoquer le sujet. Contacté à cet effet, le vice-président de l'APC chargé des affaires sociales et culturelles, a tenu à apporter certaines précisions en déclarant: «Normalement, le cimetière Zef-Zef devait connaître une extension sur une parcelle de plus de 10 ha. Toute la procédure administrative existe, mais il se trouve que des citoyens, prétendant disposer d'actes de propriété, se sont manifestés pour arrêter les travaux de terrassements de la parcelle en question. Certains ont même ouvert des chantiers sur ce terrain quand ils ont appris qu'il allait être annexé au cimetière.» Il ajoutera qu'au niveau de l'exécutif communal une démarche visant à acquérir un terrain à Sidi Ahmed, pour servir de cimetière, a été entreprise. En attendant, mourir à Skikda devient aussi compliqué que d'y vivre.