Les Tunisiens ne veulent pas se contenter de voter. Ils tiennent à observer et à s'assurer que leur voix parvienne telle quelle. Contre la fraude électorale et la manipulation, le réseau Mourakiboune (Observateurs) recrute des milliers de Tunisiens pour observer et signaler tout dépassement constaté lors des élections du 23 octobre. Armés de la volonté d'en finir avec les procédés populistes de l'ancien régime, les jeunes Tunisiens ont mis en place un réseau composé de six associations, dont l'Association tunisienne pour l'éveil démocratique (ATED) de Anis Ghodbane. Ce jeune consultant indépendant en commerce international et ses collègues ont eu l'aval de la Commission européenne pour financer le réseau Mourakiboune qui a vu le jour en juillet dernier. Depuis, 4000 observateurs ont été recrutés et formés. «Nous tenons depuis le 14 janvier à être utiles dans cette étape importante de l'histoire de notre pays et de mise en place de processus démocratique», précise Anis. L'objectif du réseau est d'atteindre 5000 observateurs potentiels d'ici 2012 pour la surveillance des différentes élections dans le pays, ce qui «permettrait le renforcement de la société civile, seule garante de la démocratie en Tunisie», selon le président de l'ATED. La formation a débuté il y a quelques mois, visant d'abord les coordinateurs du réseau et les superviseurs qui, à leur tour, recrutent et forment des observateurs. Ils ne peuvent accomplir leur mission, sans l'autorisation de l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) qui encourage ce genre d'initiatives. A l'étranger aussi Les 4000 observateurs auront pour mission d'assister aux élections dans les 27 circonscriptions du pays, en plus des 250 qui seront déployés en France, en Allemagne ainsi que dans les pays du Golfe. Et pour obtenir le titre d'observateur, le désengagement politique est de mise. L'observateur ne doit appartenir à aucun parti politique ni se présenter en tant qu'indépendant. En revanche, le niveau d'instruction et la profession de l'observateur demeurent de moindre importance. Que vont faire concrètement les observateurs le jour du vote ? Ils vont observer le déroulement des élections le 23 octobre de 6h30 du matin jusqu'au dépouillement des urnes et l'annonce des résultats. Le réseau Mourakiboune dispose d'un formulaire, avec des cases à cocher, qui guidera les observateurs tout au long des procédures du vote. Ils pourront accomplir leur mission dans leurs bureaux de vote respectifs afin de leur faciliter la tâche, et auront à communiquer avec leurs superviseurs par SMS, via un système codifié. De son côté, l'équipe d'analyse récupèrera les informations dès le lendemain, après avoir débriefé les observateurs. Deux jours plus tard, Mourakiboune organisera une conférence de presse avec un rapport préliminaire avant de publier le rapport final, deux mois après les résultats des élections. Il est à signaler que Mourakiboune n'est pas le seul réseau d'observation créé pour ce rendez-vous électoral. Ils seraient près de 10 000 observateurs dans les différentes associations et partis politiques. «Tout ceci est une préparation pour les futures élections. S'il y a fraude, nous le dénoncerons au grand public», prévient Anis Ghodbane.