L'Union européenne (UE) suit de près l'évolution des «réformes» politiques en Algérie, mais ne se prononcera qu'à la fin de l'aboutissement du processus actuel. Une idée parmi tant d'autres discutées, hier, à la faveur d'un déjeuner de presse organisé par Laura Baeza, ambassadeur, chef de la délégation de l'Union européenne en Algérie. Comme chaque année en cette période, la délégation de l'UE invite un groupe de journalistes et d'enseignants universitaires pour leur présenter les vœux du nouvel an et le bilan de l'année. Lors d'un toast, Mme Baeza est revenue sur le soutien apporté par l'UE au Printemps arabe et a évoqué les visites de Catherine Ashton, Haute représentante de l'UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité en Tunisie, en Libye et en Egypte, après la chute des dictatures. Bruxelles a dégagé une aide d'urgence de 153 millions d'euros pour notamment les réfugiés qui fuyaient la Libye durant la guerre et un soutien supplémentaire à la Tunisie avec une enveloppe annuelle passée de 80 à 140 millions d'euros. «A côté de ces mesures ponctuelles, l'Union européenne a élaboré, en mars dernier, une révision de sa politique vis-à-vis de ses voisins du sud de la Méditerranée. Cette démarche prend en compte les exigences exprimées par les populations durant le Printemps arabe», a-t-elle indiqué. Cette politique s'exprime à travers notamment un soutien ciblé à la mutation démocratique, un partenariat étroit avec la société civile et un appui à la croissance économique. NOUVELLE STRATEGIE Selon la diplomate, la Politique européenne de voisinage (PEV) a été révisée pour s'adapter aux changements politiques majeurs en Afrique du Nord. «Cette démarche se veut une réponse adaptée à l'évolution rapide des pays de voisinage et à leurs besoins de réformes. Elle bénéficie d'une enveloppe de 7 milliards d'euros», a-t-elle indiqué. La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) soutient également cette politique. «Le texte de cette nouvelle stratégie souligne que le renforcement du soutien de l'UE à ses voisins sera conditionné notamment aux progrès qu'ils auront accomplis en ce qui concerne l'établissement et la consolidation de la démocratie ainsi que le respect de l'Etat de droit», a-t-elle souligné. Des experts de l'UE sont venus à Alger discuter avec les autorités de la nouvelle démarche et tenter d'assouplir la position algérienne sur la PEV. Alger a, dès le départ, défendu l'idée qu'il fallait laisser le temps à l'application de l'Accord d'association, entré en vigueur en 2005, avant de s'engager dans d'autres processus. Mme Baeza semble satisfaite de l'évolution des relations avec l'Algérie parlant «d'une nouvelle dynamique». Elle a évoqué la tenue, en octobre dernier à Alger, de la première session du sous-comité «Dialogue politique, sécurité et droit de l'homme». Ce sous-comité a enregistré beaucoup de retard avant de se réunir. Pour la période 2011-2013, le programme de coopération entre l'UE et l'Algérie bénéficie d'un budget de 172 millions d'euros. En 2014, Bruxelles, où l'on sait parfaitement que l'Algérie n'a pas réellement besoin d'argent, envisage de revoir à la hausse cette enveloppe qui sera orientée vers le financement de projets techniques. En 2011, par exemple, 13 millions d'euros ont été affectés à un programme de mise en œuvre d'une nouvelle stratégie des transports en Algérie. Les négociations sur le démantèlement tarifaire se poursuivent. Des difficultés techniques sont enregistrées pour la liste des biens industriels, alors que celle des produits agricoles est déjà bouclée. L'assouplissement des procédures liées à l'investissement en Algérie est toujours demandé par les opérateurs économiques. Le refus de rapatrier les dividendes est perçu comme un frein important à l'engagement de nouveaux investissements européens en Algérie. L'UE espère que l'Algérie, deuxième fournisseur du continent européen en gaz naturel, se joindra d'une manière plus prononcée au mégaprojet Desertec portant sur la production d'électricité à partir de l'énergie solaire. Dans ce domaine, la Libye, aussi vaste et ensoleillée que l'Algérie, pourrait devenir un sérieux concurrent. Sur le plan sécuritaire, la coopération entre Alger et Bruxelles s'est accélérée ces dernières semaines. L'UE et l'Algérie ont convenu d'un plan opérationnel d'action pour lutter contre le terrorisme dans la zone sahélo-saharienne. Une région où des groupes armés, de plus en plus actifs, s'adonnent au «commerce» lucratif de l'enlèvement des ressortissants européens. Alger souhaite que Bruxelles prenne une position claire sur la criminalisation du paiement de rançons à des groupes armes, considéré comme un financement du terrorisme. Contrairement à Londres, Moscou ou Washington, l'Union européenne n'a pas encore tranché cette question. Bruxelles ne cache pas son inquiétude sur le contenu du projet de loi sur les associations, actuellement en examen à l'APN. Un projet qui interdit le financement étranger aux ONG algériennes. L'aide financière qu'apporte habituellement l'Union européenne aux associations dans tous les pays fait l'objet d'une publication transparente communiquée aux gouvernements en place. Sur le plan culturel, Laura Baeza a annoncé la tenue, fin janvier 2012, d'une rencontre entre des écrivains algériens et européens et la publication d'un livre d'art contenant les photographies réalisées à la faveur du projet «Regards croisés». Des photographies qui ont fait l'objet d'une exposition au Bastion 23, à Alger, en octobre 2011.