Est-ce la réponse israélienne aux déclarations mardi du président palestinien, Mahmoud Abbas, qui annonçait son refus d'un Etat aux frontières imprécises ? C'en est une, et celle-ci devient récurrente puisqu'elle accompagne le refus israélien de s'engager dans un processus de paix sérieux, entendre par là avec des échéances en vue de la satisfaction des droits nationaux des Palestiniens. Comme la création d'un Etat palestinien dans le cadre de frontières sûres et reconnues comme le stipulent justement les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité, la première remontant à 1967. Dans cet ordre d'idées, l'approche des élections législatives anticipées israéliennes pourrait faire croire à une surenchère propre à chaque campagne. Il n'en est rien, et les premiers à le savoir sont les Palestiniens A moins de trois semaines des législatives en question, le Premier ministre par intérim et chef du parti favori Kadima, Ehud Olmert, a affirmé vouloir fixer les frontières définitives d'Israël et se séparer des Palestiniens d'ici 2010. C'est ce qu'on appelle le fait accompli colonial doublé du traitement unilatéral qui pose un grave problème, celui du droit de la force. C'est Olmert qui le dit, en fixant unilatéralement la date, et très probablement les limites, donnant raison à tous ceux qui disaient qu'Israël n'a pas de frontières définies. M. Olmert s'est dit décidé, en cas de victoire, à fixer les frontières permanentes d'Israël « dans les quatre ans ». Ces frontières permettront à Israël « de se séparer de la majorité de la population palestinienne et de préserver une importante et stable majorité juive », a-t-il ajouté sans bien entendu en préciser le tracé exact. Selon lui, ces frontières incluraient en Cisjordanie le pourtour d'El Qods ainsi qu'un bloc de colonies et une zone de sécurité dans la vallée du Jourdain. M. Olmert a aussi affirmé vouloir ordonner la construction de 3500 logements dans cette Palestine, dont il avait annoncé le gel suite aux pressions des Etats-Unis. Ces déclarations recoupent plus ou moins des recommandations de la haute hiérarchie militaire israélienne. M.Olmert a exclu de rencontrer après le scrutin le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, si le mouvement Hamas dirige le prochain cabinet sans avoir renoncé à la violence, reconnu Israël ainsi que les accords signés par l'OLP, la Feuille de route et le plan international de paix. Du côté palestinien, le Hamas et le Fatah ont repris jeudi soir au plus haut niveau leurs discussions à Ghaza en vue de la formation d'un gouvernement palestinien de coalition dirigé par ce mouvement. M. Abbas, dirigeant du Fatah, ainsi que le Premier ministre désigné, Ismaïl Haniyeh, issu du Hamas, se sont rencontrés en tête-à-tête à Ghaza. Au cours de cet entretien, M. Abbas a indiqué qu'il était disposé à accorder deux semaines supplémentaires au Hamas pour constituer un gouvernement, a indiqué Nabil Abou Roudeïna, porte-parole de la Présidence. Mahmoud Abbas avait formellement chargé le 21 février Ismaïl Haniyeh de former le gouvernement après la victoire du mouvement islamiste aux élections législatives du 25 janvier. Aux termes de la Constitution, M. Haniyeh dispose d'un délai de trois semaines pour former un gouvernement et éventuellement de deux semaines supplémentaires. M. Haniyeh s'est pour sa part engagé à donner hier une réponse écrite à M. Abbas à propos des négociations en cours et des intentions du Hamas. Auparavant jeudi, le chef du groupe parlementaire du Fatah, Azzam Al-Ahmad, avait affirmé que les deux mouvements n'étaient pas parvenus à une formule d'entente. M. Azzam avait affirmé le 22 février que le Fatah était d'accord « en principe » pour se joindre au gouvernement dirigé par M. Haniyeh. Plusieurs ténors du Fatah s'opposent toutefois à une telle participation. Ces discussions surviennent trois jours après une première séance houleuse du Conseil législatif (CLP, Parlement) au cours de laquelle les députés, majoritaires, du Hamas ont abrogé une série de mesures votées par la précédente Chambre dominée par le Fatah. Les députés du Fatah avaient quitté le Parlement en signe de protestation et saisi la Cour suprême palestinienne pour faire annuler la décision du CLP. Pour l'heure, les divergences ne sont pas fondamentales. Ce sont surtout des griefs du Fatah à l'encontre du Hamas accusé d'avoir sabordé sa politique de négociations par ses opérations armées. Quant à leur opposition à la politique israélienne, elle ne comporte aucun soupçon de divergence. Là est l'essentiel pour les Palestiniens.