Il ne faut pas se fier à son thermomètre local. L'hiver a été clément sur l'hémisphère nord. Même s'il s'est prolongé sur les premières semaines de mars au grand dépit des Européens. La clé du climat de ce côté de la terre, c'est l'Atlantique nord qui la détient. Et là, la couverture glaciaire est plus faible à l'orée de ce printemps... faute de grands froids persistants. Le réchauffement ne se dément pas. Il menace même d'être légèrement plus rapide. L'opinion mondiale en devient de plus en plus attentive à l'évolution de l'effet de serre. Et à l'identité des plus gros émetteurs de gaz carbonique (CO2). Pour la première fois, une liste des entreprises internationales les plus pollueuses est disponible pour le public. C'est le fruit d'une étude de Ernest and Young qui établit un tableau des indicateurs de la performance environnementale et sociale des grandes multinationales. Sans surprise. Les compagnies pétrolières tiennent le haut de l'affiche... de la contre-performance. Exxon Mobil, seul, a envoyé dans l'air 138 millions de tonnes équivalents CO2 en 2004. Les cimentiers ne sont pas loin derrière. Pour exemple, le français Lafarge pour un chiffre d'affaires 18 fois plus faible que Exxon Mobil émet à peine 1,3% moins que lui de gaz à effet de serre (GES). Cet observatoire grand public de la production de GES est promis à un avenir aussi brillant que celui des plus grandes places boursières. Il va sans doute accroître très rapidement les pressions dans le monde en faveur de l'application du protocole revu de Kyoto. Il faudra d'autant moins utiliser de sources d'énergie fossile, à haute teneur de carbone, que leur disponibilité tire historiquement vers sa fin. Comme le montre désormais l'incapacité de l'offre OPEP additionnelle à calmer les marchés du brut de pétrole. Les solutions de rechange énergétiques « propres » sont nombreuses mais butent invariablement sur un paramètre de coût qui explique leur immaturité technologique. Il n'en est pas de même du nucléaire civil. Réponse stratégique face au premier choc pétrolier de 1973, il marquait discrètement son retour en grâce dans les pays de l'OCDE. Discrètement jusqu'à jeudi dernier où les ministres de l'Energie du G8, réunis à Moscou, ont donné un signal fort à la communauté internationale en appelant au développement du nucléaire civil comme réponse à la sécurité des approvisionnements énergétiques. Tout le monde, certes, n'est pas d'accord au sein du G8, ou les Allemands par exemple sont engagés dans un plan de démantèlement à long terme de leurs centrales nucléaires. L'option « nucléaire civil » est proposée par la Russie, soutenue par les Etats-Unis, la France se dit très intéressée. Largement suffisant pour parler d'un second âge du nucléaire civil. Les arguments en sa faveur ? Ses déchets ne vont pas dans l'atmosphère, son rendement énergétique est supérieur à la plupart des autres sources alternatives. En sa défaveur ? Personne n'a oublié Tchernobyl. Même si le vrai test de fiabilité disent les Occidentaux ce sont « nos centrales nucléaires à nous qui elles n'ont rien subi de grave depuis Three Miles Island ». Le nucléaire civil est un colossal enjeu d'indépendance énergétique du proche futur. Tout le monde en convient maintenant. Le spectaculaire accord Etats-Unis-Inde en atteste. Qui vendra à l'autre de l'énergie nucléaire dans quarante ans ? Il serait temps à Alger d'écouter la revendication iranienne au nucléaire civil autrement qu'avec les oreilles d'un Bernard Henry Levy effarouché par « la bombe atomique entre les mains de barbus ».