La situation environnementale de l'Algérie est très préoccupante et ne prête guère à l'optimisme. Si rien n'est fait pour trouver des solutions immédiates, notre pays ne saurait échapper au risque d'une catastrophe sanitaire et écologique. C'est ce qu'il faut retenir du dernier rapport de l'Association nationale de protection de l'environnement et la lutte contre la pollution (ANPEP). S'appuyant sur des données officielles, jusque-là tenues confidentielles par le ministère de tutelle, l'association vient, en effet, de dresser un état des lieux sur la gestion des déchets urbains et agro-industriels en 2012. En la matière, les indicateurs sont au rouge, les données sans appel : les 124 611 tonnes de déchets hospitaliers issus des établissements et structures sanitaires, publics ou privés, sont en grande partie déversées dans la nature ou finissent dans les décharges publiques implantées un peu partout à travers le pays. En ces lieux, les 66 503 tonnes de déchets ordinaires, 21 900 tonnes à risques infectieux, 29 200 tonnes toxiques, radioactifs y compris, et les 7008 tonnes de déchets spéciaux servent d'aliments à des milliers d'animaux domestiques - vaches surtout - ou errants et sont manipulées, mains nues, par des milliers d'enfants et de jeunes adultes vivant aux abords. A cela viennent s'ajouter les 23 000 tonnes/an de produits alimentaires périmés - conserves de tomate, de confiture, de sardines, chocolats et fromages - qui y sont récupérées pour être remis à la consommation sur les marchés informels, notamment dans les zones les plus reculées. Irresponsabilité des autorités directement ou indirectement concernées aidant, des centaines voire des millions de tonnes de déchets liquides sont, dans l'impunité absolue, larguées dans les oueds. Les dernières statistiques officielles font ressortir que les 5 millions de voitures, parc automobile arrêté à octobre 2012, en Algérie déversent pas moins de 20 millions de litres d'huile tout les 5000 km. Seulement 10% de ces huiles sont recyclées, le reste étant déversé dans les oueds et les tranchées qui, à leur tour, les déversent dans les terres agricoles, les barrages, les eaux superficielles et souterraines ainsi que les eaux de mer, causant ainsi des dégâts incommensurables à l'homme et à l'environnement. Le cas Oued Seybouse Sans bien s'en rendre compte, les pouvoirs publics ont sous les yeux l'exemple le plus édifiant des ravages que peuvent provoquer leur laxisme et laisser-faire devenus chroniques : l'oued Seybouse où les industriels n'hésitent pas à larguer près de 4,5 millions de m3/jour de différents déchets liquides et substances chimiques dangereuses, en plus des 3,7 millions m3/an d'eaux usées. Fort de 240 kilomètres de long, cet oued, faut-il le souligner, traverse 7 wilayas de l'Est du pays. Ce laxisme dont font preuve nos autorités et cette impunité dont jouissent certains industriels, la catastrophe écologique que vient de frôler la commune d'Essebt relevant de la daïra de Azzaba peut en témoigner. Il y a quelques jours, certains habitants de cette commune située à moins de 50 km au sud-est de Skikda ont, en effet, été surpris, à leur réveil, par la présence d'une étrange couche blanche et poudreuse qui recouvrait les toits de leurs maisons. D'autres, intrigués par l'épais nuage qui s'appesantissait, tard dans la nuit et pendant plus d'une semaine, sur l'oued Fendek A la surface de l'eau, s'élevait sur une dizaine de centimètres une couche mousseuse. L'origine de ce qui a causé la mort à des milliers de poissons, plusieurs vaches et des irritations aux yeux ainsi que sur la peau dont se sont plaints les riverains ? Des rejets récurrents d'effluents liquides contenant des substances chimiques, auxquels a recours, à l'abri des regards indiscrets, la société italienne Sicilsaldo, intervenant dans la réalisation du gazoduc GK 3, accusent les responsables du bureau de l'ANPEP Skikda. Cette organisation a d'ailleurs déjà réagi en portant plainte ce dimanche auprès du tribunal de Azzaba contre la société italienne, a indiqué Ali Halimi, son président. Affaire à suivre.