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«Il faut un tissu productif pour éradiquer le change parallèle»
Rachid Sekak. Economiste et expert en finances
Publié dans El Watan le 28 - 11 - 2012

Economiste et spécialiste reconnu des questions financières, Rachid Sekak analyse, dans cet entretien, le phénomène de la prolifération du change informel. Selon lui, le niveau actuel des réserves de change autorise une certaine flexibilité pour ce qui touche à l'allocation voyage et à certains paiements invisibles comme les dépenses de santé et d'éducation.
- Comment expliquer l'existence et l'expansion d'un marché parallèle des devises dans une économie censée être à la fois libre et bien régulée, selon les règles du marché ?

La monnaie est une marchandise comme les autres. Un marché parallèle des devises se forme de la même manière qu'un marché parallèle du ciment ou de la brique. Il apparaît lorsque le prix appliqué sur le marché officiel n'équilibre pas l'offre et la demande réelles exprimées sur ce marché.

- L'alignement des taux de change officiel et informel est-il la seule mesure efficace pour éradiquer le marché noir des devises ? Quelles autres mesures est-il souhaitable de mettre en œuvre ?

Une telle solution est «trop simple» pour être «vraie». L'équation est beaucoup plus complexe. Une large part de cette dernière réside dans l'économie réelle. L'éradication du phénomène passe par la reconstruction d'un tissu productif compétitif, en dehors de la rente des hydrocarbures.
Bien sûr, l'atténuation de certaines restrictions touchant l'allocation voyage et certains paiements invisibles comme les dépenses de santé et d'éducation aurait très certainement un effet positif bien que marginal. Cela éloignerait une bonne partie des citoyens de ce «marché». Le niveau actuel des réserves de change autorise une certaine flexibilité en la matière.

- L'entrée en activité de bureaux de change agréés peut-elle constituer un remède contre la prolifération du commerce informel des devises ?

Pour mémoire, les bureaux de change sont autorisés depuis décembre 1996. Il semblerait que de nombreux bureaux de change aient été agréés par les autorités monétaires. Ces derniers n'ont néanmoins pas débuté leurs opérations, pourquoi ? Une partie de la réponse à cette question est probablement à rechercher dans le cahier des charges associé à ces agréments. Mais l'élément essentiel de cette inactivité résidait dans l'incapacité de ses bureaux à collecter des ressources en devises en dehors du guichet Banque centrale. Alors oui, les bureaux de change seront une solution quand notre pays disposera d'une économie productive diversifiée et d'un flux important de touristes.

- Le taux de change officiel, tel que calculé actuellement, est-il réaliste ?

Depuis le milieu des années 1990, nos autorités mettent en œuvre une politique de change plus dynamique au travers d'un régime de flottement dirigé, dont l'objectif ultime est de stabiliser le taux de change effectif réel du dinar algérien. Cette politique est conduite dans le cadre d'un marché des changes interbancaire. Par ailleurs et depuis 1997, la convertibilité du dinar algérien pour les transactions extérieures courantes est une réalité, notre pays ayant accepté les obligations imposées par l'article VIII des statuts du FMI.
Les finalités conjoncturelles de la politique de change mise en œuvre par les autorités sont multiples. On peut citer notamment la préservation de la stabilité financière interne et externe, la compétitivité externe de l'économie, l'atténuation des effets de l'inflation importée et l'optimisation des recettes budgétaires, largement tributaires des hydrocarbures. La tâche n'est pas aisée dans un contexte d'économie très dépendante des hydrocarbures car les finalités peuvent être contradictoires.
Pour conclure, le taux de change officiel me semble réaliste compte tenu des contraintes actuelles de notre économie, mais surtout vis-à-vis de la nécessité de préserver nos générations futures.


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